Erhalten Sie Zugang zu diesem und mehr als 300000 Büchern ab EUR 5,99 monatlich.
"Sayonara" dépeint l’histoire d’un Canadien dont la quiétude de vie est violemment chamboulée par le décès de sa fille. Ce tragique événement, tout à fait inattendu pour sa femme et lui, non seulement bouleversera leur existence et brisera leur couple, mais plongera également le protagoniste dans un abîme de désespoir, ce qui le pousse jusqu’à envisager le pire. Il trouvera néanmoins dans la préparation et la réalisation d’un voyage exceptionnel au Japon un apaisement partiel et une source de réflexion.
À PROPOS DE L'AUTEUR
S’inspirant de ses nombreux périples, particulièrement au Japon,
Alain Bongard immortalise, par l’écriture, les souvenirs et les expériences riches vécus lors de ces voyages. Il est auteur du roman "Henriette et Henri", publié en 2022 chez Le Lys Bleu Éditions.
Sie lesen das E-Book in den Legimi-Apps auf:
Seitenzahl: 309
Das E-Book (TTS) können Sie hören im Abo „Legimi Premium” in Legimi-Apps auf:
Alain Bongard
Sayonara
Roman
© Lys Bleu Éditions – Alain Bongard
ISBN : 979-10-422-2776-0
Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Du même auteur
Roman
Henriette et Henri, 2022, Le Lys Bleu Éditions.
Sophie était morte d’un mal de vivre que ni Jean ni Hélène ne parvenaient à comprendre. Dans la chambre froide de la morgue, silencieux devant le corps décharné de leur fille, ils restaient assommés, incapables de réaliser la terrible réalité. Le policier américain leur redemanda si c’était bien Sophie Bouvard, leur fille. Jean acquiesça d’un signe de tête. Il ne pouvait détacher son regard du petit visage dont les traits creusés laissaient deviner un tourment, une souffrance, que la mort n’avait pu effacer.
De retour au poste, le policier leur expliqua que Sophie s’était suicidée trois jours plus tôt en prenant des barbituriques. Sa colocataire, surprise de voir sa porte de chambre ouverte, l’avait trouvée inconsciente, et avait immédiatement appelé une ambulance. Quand Sophie était arrivée à l’hôpital, il était trop tard. Elle avait succombé et on n’avait rien pu faire pour la sauver, d’autant que son organisme affaibli n’avait plus les ressources nécessaires pour lutter contre la mort. Une courte enquête avait été faite. Le médecin légiste avait confirmé qu’elle ne se droguait pas, mais qu’elle était anorexique et qu’elle avait dû cesser de s’alimenter depuis plusieurs mois. En fouillant dans sa chambre, la police avait trouvé une feuille d’inscription à l’université pour l’année précédente, mais renseignements pris, elle n’avait suivi aucun cours cette année.
C’était eux qui leur avaient donné l’adresse de ses parents, ce qui avait permis d’envoyer le télégramme leur demandant d’appeler la police de Boston. D’après la propriétaire du logement, qui habitait dans le même immeuble, elle ne sortait pratiquement jamais. Elle avait pensé bien faire en lui proposant cette colocataire, mais celle-ci lui avait confié qu’elles ne se rencontraient pratiquement jamais.
Le policier qui les avait accompagnés leur fit signer plusieurs papiers, et leur dit qu’il leur ferait parvenir les affaires personnelles de leur fille dès que l’enquête serait terminée, ce qui ne devait pas prendre très longtemps, puis il les poussa gentiment hors de son bureau. Ces parents immobiles et silencieux le gênaient un peu. Il avait plus l’habitude des grandes démonstrations avec larmes et cris, ou du triste fatalisme des gens qui savent déjà depuis longtemps que ça finirait comme ça, ou encore de l’indifférence de ceux qui s’en foutent et que l’on dérange. Mais ces deux Canadiens accablés, pétrifiés, le mettaient mal à l’aise et il se sentait une sorte de complicité diffuse avec ce monde qui avait détruit leur fille et ce sentiment ne lui plaisait pas.
Un taxi les ramena à leur hôtel. Pendant le trajet, Jean et sa femme ne se dirent pas un seul mot. En arrivant ils furent accueillis par le petit vent froid qui soufflait sur la ville, un petit vent mêlé de neige et de glace et malgré leurs chauds vêtements d’hiver ils se sentaient gelés jusqu’au plus profond d’eux-mêmes. Hélène avait le regard fixe et ses gestes étaient mécaniques et saccadés. Rentrés dans leur chambre, elle s’écroula sur le lit et pleura, laissant échapper son désespoir en gros sanglots où se mêlaient de petits cris.
Ils avaient reçu la veille 6 décembre 1980, un télégramme rédigé en anglais leur demandant de rappeler un service de police à Boston. Hélène avait immédiatement appelé pensant que sa fille avait besoin d’aide, mais elle était à cent lieues d’imaginer cette communication terrible quand une voix nasillarde et sans émotion lui demanda si elle était la mère de Sophie Bouvard et qui du même souffle lui annonça sa mort et la nécessité de venir l’identifier. Hélène resta plusieurs des minutes sans voix à côté de l’appareil, puis elle poussa un hurlement qui fit accourir Jean. La voix étranglée, elle lui annonça la terrible nouvelle. Il crut d’abord à un canular de mauvais goût ou bien que sa femme qui ne comprenait pas très bien l’anglais avait dû se tromper. Il rappela, vérifia, demanda à parler à un responsable et dut se rendre à l’évidence : c’était vrai.
Il neigeait à Montréal et il avait renoncé à se rendre à Boston en voiture. Il n’aimait pas beaucoup conduire, et c’était surtout Hélène qui se servait de la voiture. Les avions décollaient de Dorval sans problème. Jean réserva deux places par téléphone et après une nuit horrible ils partirent pour Boston le lendemain matin. Ils prirent une chambre dans un hôtel près de l’aéroport. Jean appela le service de police, parla avec l’officier responsable qui lui proposa de passer les prendre à leur hôtel pour aller identifier leur fille. Il était arrivé un peu plus tard et il les avait conduits à la morgue pour faire l’identification de Sophie.
De retour dans leur chambre d’hôtel, ils restaient prostrés, chacun dans son coin, submergés par la douleur. Hélène avait repoussé Jean qui essayait de la consoler et il restait recroquevillé dans un fauteuil, incapable de supporter la peine de sa femme et étouffant la sienne sans pouvoir, comme elle, la laisser s’exprimer.
Il essayait de comprendre ce qui s’était passé, mais n’y parvenait pas. Sophie, la petite fille parfaite, celle qui leur avait donné tant de joies et de satisfactions, avait choisi de disparaître comme ça sans explications, sans raison apparente. Il se souvenait qu’ils l’avaient trouvée maigrichonne et pas très en forme pendant les quelques jours qu’elle avait passés avec eux pendant les vacances de Noël, mais ils n’y avaient pas trop fait attention. Elle avait toujours très peu mangé et on avait trouvé amusant cette vocation pour le régime végétarien qu’elle avait adopté. Elle était pleine d’enthousiasme pour les cours de traduction qu’elle suivait à l’université et elle parlait d’étudier d’autres langues, tout comme son père, quand elle aurait terminé son doctorat. En riant, elle donnait son avis sur les traductions de son père, parfaites de l’anglais au français, mais qu’elle trouvait discutables du français à l’anglais. Elle avait passé de longs moments à chuchoter avec sa mère, et leurs gazouillis mêlés de rires et d’inflexions joyeuses étaient une bien agréable musique. Mourir comme ça, sans raison, il ne comprenait pas.
Le lendemain matin, les services de police le rappelèrent pour lui demander de revenir pour diverses formalités et il dut laisser Hélène seule. Elle le laissa partir sans un mot ni un regard complètement absorbé par sa peine. Quand il revint à l’hôtel, il retrouva la chambre vide. Hélène avait laissé un petit mot lui annonçant qu’elle rentrait à Montréal, toute seule.
Il dut rester plusieurs jours à Boston pour régler les dernières formalités, assurer le retour du corps de Sophie, ranger ses affaires. Dans son appartement, sa colocataire ne lui fournit que peu de renseignements sur les derniers jours de Sophie. Elle n’était là que depuis un mois et elle ne lui avait pratiquement jamais parlé. Elle n’était entrée dans sa chambre que par hasard, car pour une fois sa porte était ouverte et comme elle voulait lui parler, elle était entrée et l’avait trouvée étendue sur le sol.
Dans la chambre, pas de photos, pas de lettres, pas de souvenirs. Tout était vide à part ses livres bien rangés sur une étagère. Jean avait l’impression que Sophie avait éliminé tout ce qui avait pu appartenir à son passé. Il ramassa ce qui restait dans une valise, en se disant que c’était tout à fait inutile, et après un dernier regard sur cette pièce qui ne lui disait rien, il quitta l’appartement et retourna à son hôtel. Le soir même, il reprenait l’avion pour rentrer à Montréal.
Arrivé chez lui, il trouva la maison vide. La voiture n’était plus dans le garage, mais il ne s’en étonna pas. Il pensa qu’Hélène n’avait pas voulu rester seule et qu’elle était allée chercher refuge chez ses parents. Il aurait bien aimé faire la même chose qu’elle, mais il n’avait nulle part où aller. Il décida d’attendre le lendemain matin pour appeler Hélène. Il ne parvint pas à aller se coucher et il finit par s’endormir sur le canapé du salon d’un sommeil agité, rempli d’images terrifiantes qui le réveillaient en sursaut.
Le lendemain matin, bien qu’il fût réveillé depuis longtemps, il attendit neuf heures pour appeler chez les parents d’Hélène en espérant lui parler, mais ce fut son beau-père qui lui répondit. Sans même lui laisser le temps de poser une question, il l’informa qu’Hélène s’était bien réfugiée chez eux en rentrant de Boston, mais qu’elle n’y était plus. Elle était partie en cure de repos dans un endroit qu’elle avait demandé de ne pas lui donner et qu’elle le contacterait quand elle serait prête à le revoir. Avant que Jean ait le temps de parler, il avait raccroché. La politesse froide de ses beaux-parents reprenait le dessus et, accablés par le sort, ils protégeaient leur fille.
Il resta abasourdi à côté de son téléphone. Il avait dû fournir un tel effort pour faire cet appel qu’il en tremblait. Cette absence et cette désertion face au malheur qui les frappait étaient un coup dur qu’il ressentait profondément. Il voulait être aux côtés de sa femme pour la soutenir et en même temps il avait besoin d’elle, près de lui, pour ne pas sombrer dans la folie qui le menaçait. Il se retrouvait privé de cet exutoire privilégié qui lui aurait permis de moins penser à sa peine tout en pouvant s’appuyer sur elle. Il réalisait qu’il aura à supporter cette terrible réalité, et l’immense chagrin qui l’envahissait, sans elle, seul. À Boston, Hélène avait pleuré toute la nuit et l’avait repoussé quand il avait voulu la consoler. Ils étaient restés chacun dans leur coin, et curieusement les larmes de sa femme l’avaient empêché de pleurer. Mais là, tout à coup, la gorge serrée, il fut incapable de retenir de lourds sanglots qu’il ne cherchait plus à étouffer. Cela dura longtemps et il en perdit connaissance. La sonnerie du téléphone placé à côté de lui le réveilla en sursaut. Il décrocha l’appareil fébrilement, espérant que c’était Hélène qui l’appelait, mais ce n’était qu’une publicité en anglais et il raccrocha. Il resta assis sur le sol pendant plusieurs heures, incapable de faire quoi que ce soit. Il n’avait envie de rien, ni de manger, ni de se laver, ni de sortir de la maison.
Quand il essayait de fixer ses idées, ses pleurs reprenaient et le laissaient anéanti. Il passa la journée dans une demi-réalité éveillée et il finit par se rendre dans sa chambre où il s’écroula sur le lit, tout habillé, et resta éveillé de longues heures avant de sombrer dans un sommeil agité plein de rêves et de cauchemars.
Les jours qui suivirent furent terribles. Il attendait un appel d’Hélène qui ne venait pas. La solitude dans laquelle il vivait lui pesait, mais il était incapable d’en sortir. Jour après jour, le quotidien, la routine des actes les plus simples, tout lui était insupportable et chaque fois qu’il ébauchait une activité quelconque : allumer du feu dans la cheminée, se faire à manger, se laver ou se raser, il abandonnait presque tout de suite.
Il passait ses journées, prostré pendant des heures au même endroit, assis à même le sol, fuyant son lit et dormant un peu n’importe où. Il était prisonnier de ses pensées, rabâchant des souvenirs qui surgissaient dans les rêves qu’il avait dans des demi-sommeils épuisants. Il s’interrogeait sans cesse sur les raisons qui avaient poussé Sophie à en arriver là et il ne trouvait pas de réponses. Il échafaudait toutes sortes de scénarios qui ne parvenaient pas à le satisfaire. Les raisons que lui fournissait son imagination, quelles qu’elles soient, ne faisaient qu’augmenter son trouble et son désespoir. Il ne savait pas grand-chose de ce que sa fille avait vécu depuis qu’elle était à Boston et il pensait que peut-être Hélène en savait plus que lui, mais comme elle refusait de lui parler, il n’avait pas la moindre idée de ce qui s’était passé.
Il ressentait dans le comportement d’Hélène, une accusation, un reproche, comme si elle voulait qu’il soit coupable de ce qui était arrivé à Sophie. Pourtant il avait beau s’interroger, repenser à ce qu’avait été leur vie durant ces dernières années, il ne trouvait rien pour justifier cette attitude.
La vie qu’ils avaient menée jusque-là, centrée sur eux-mêmes, heureux dans leur petit monde douillet, ce monde s’effondrait et ne lui laissait que peu de ressources. Il n’avait ni famille ni amis vers qui se tourner et l’aider à passer ce terrible moment. Hélène avait ses parents qu’elle allait voir régulièrement et qui venaient chez eux de temps en temps, et un peu de famille qu’ils voyaient rarement, surtout au moment des fêtes de fin d’année ou pour l’anniversaire de Sophie qui était toujours un moment privilégié. Mais lui, il avait tout au plus quelques connaissances, quelques relations d’affaires, personne avec qui partager cette peine énorme. Tout s’était écroulé et il restait seul avec ses pensées.
Il avait rencontré Hélène à l’université où il étudiait en traduction et elle en psychologie. Son petit côté bohème et ses cheveux longs avaient séduit cette jeune fille de bonne famille qui vivait encore avec ses parents et devait rentrer tous les soirs dans leur maison de banlieue. Quand les choses devinrent un peu plus sérieuses entre eux, elle passa quelques nuits chez lui ce qui entraîna une vive dispute avec ses parents et quand elle décida de le leur présenter cela n’arrangea pas les choses.
Finalement, ils décidèrent de vivre ensemble dans le minuscule appartement qu’il occupait près de l’université.
Ce furent quelques mois d’une petite vie amusante d’étudiants fauchés se contentant de peu, très occupés par leurs études et par toutes les activités qui tournaient autour de leur vie étudiante. Très amoureux l’un de l’autre, ils éprouvaient beaucoup de plaisir à être ensemble et n’avaient besoin de rien d’autre. Hélène s’était réconciliée avec ses parents, mais il n’était toujours pas le bienvenu et elle y allait seule leur rendre visite de temps en temps.
Quand Hélène était tombée enceinte, ils s’étaient mariés sans inviter personne. Ses beaux-parents, très catholiques, et qui espéraient un meilleur mariage pour leur fille, avec une grande cérémonie et tout le décorum allant avec, les avaient presque traités de criminels pour avoir conçu un enfant si jeunes, alors qu’ils n’avaient pas terminé leurs études et surtout hors du mariage. Il s’en était suivi une nouvelle petite brouille qui s’était apparemment dissipée avec la naissance de Sophie.
Jean avait coupé ses cheveux longs et son air bohème et pour faire vivre sa petite famille il avait travaillé comme professeur d’anglais tout en terminant ses études tandis qu’Hélène abandonnait les siennes, sans regret, pour se consacrer à sa fille. Ils avaient déménagé dans un appartement un peu plus grand et il avait rapidement quitté l’enseignement pour faire de la traduction. Tout d’abord dans un bureau, puis ayant acquis une certaine notoriété, il avait pu travailler chez lui, ce qui lui avait permis de rester près de sa femme et de sa fille. Une certaine réussite matérielle avait suivi et il avait fait construire cette maison confortable, dans une jolie banlieue pleine d’arbres et de jolis jardins et y avait installer son bureau. Peu après leur installation, il avait acheté une voiture, mais c’était surtout Hélène qui s’en servait. Il n’avait pas besoin de se déplacer pour son travail, des services de messagerie lui apportaient les traductions à faire et délivraient les travaux terminés. La bonne qualité de son travail et sa célérité faisaient qu’il était apprécié.
Ses beaux-parents adoraient Sophie et ils durent admettre que les choses n’allaient pas si mal, mais il resta toujours un froid entre eux. À part quelques phrases de politesse, ils ne se parlaient pour ainsi dire pas. Souvent quand ils venaient à la maison voir Sophie et Hélène, il prétextait du travail pour rester enfermé dans son bureau le plus longtemps possible.
Sophie avait été un bébé adorable dont ils s’étaient beaucoup occupés tous les deux, se partageant les tâches sans que cela ne crée le moindre conflit. Ils s’étaient mis d’accord pour permettre à ses grands-parents de l’avoir chez eux une fois par semaine et cela se faisait facilement. Ils en profitaient pour aller au cinéma ou au théâtre et tout le monde était content.
Elle avait été une petite fille charmante et surdouée qui, sans pression, réussissait tout ce qu’elle entreprenait et terminait parmi les meilleures sans effort. Ses grands-parents avaient insisté pour qu’elle fréquente la même école que sa mère, offrant même d’en payer les frais. Cela faisait plaisir à Hélène et Jean ne s’y opposa pas. Lui, qui n’avait jamais connu de vie de famille, adorait ce monde qu’ils formaient tous les trois et passait le plus de temps possible avec sa fille. Il avait perdu ses parents, tués dans un accident de voiture alors qu’il était bébé. Il avait été élevé loin de Montréal par une grand-mère qui avait dû se charger de lui bien malgré elle, et qui l’avait envoyé en pension dès qu’il eut l’âge d’entrer à l’école. Élève moyen et timide, il avait franchi sans grandes prouesses les différents degrés scolaires ne se faisant remarquer que par une extraordinaire faculté à apprendre les langues étrangères ce qui l’avait amené à se diriger vers la traduction tout en apprenant sans grands efforts l’allemand, l’espagnol et le russe, langues qu’il maîtrisa suffisamment bien en peu de temps. Hélène avait été une étudiante bien plus brillante que lui dans toutes les matières et sortie dans les premières d’une école privée prestigieuse, elle était entrée très jeune à l’université. Mais sans but précis, elle suivait les cours qui l’intéressaient et n’envisageait pas de faire une carrière. Sophie était entrée à l’université à dix-sept ans comme sa mère, mais elle savait ce qu’elle voulait et ne se dispersait pas. Elle termina, sans difficulté, les trois premières années d’études avec des notes impressionnantes. Elle enchaîna avec une maîtrise qu’elle termina en un temps record. Elle voulait faire un doctorat et enseigner à l’université. Sophie était restée très proche de ses parents et continuait à vivre chez eux. Les dernières années, Hélène avait été très occupée à la conduire à l’université et à revenir la chercher, quelle que soit l’heure, trop heureuse qu’elle n’ait pas demandé à vivre en ville comme beaucoup d’autres jeunes étudiants le faisaient. Elle s’était beaucoup rapprochée de sa mère et elles pouvaient passer de longs moments ensemble à se parler de toutes sortes de choses dans des conversations dont Jean était exclu et qui cessaient quand il s’approchait d’elles. Mais il n’y avait pas fait attention et il trouvait cela normal.
Elle avait obtenu une bourse d’une prestigieuse université américaine située à Boston, pour y faire son doctorat. Elle décida d’en profiter et de partir à Boston. Ce fut un moment difficile pour Jean et Hélène surtout pour Hélène qui ne vivait que pour sa fille. Leur vie changea radicalement. Un grand vide s’installa. Sophie était le lien qui conditionnait tout ce qu’il faisait auparavant : les repas en famille, les sorties dans les musées ou au cinéma, les promenades, les vacances à Cape Cod où ils allaient passer quelques semaines en été dans une maison qu’ils louaient près de la plage, les BBQ dans le jardin, même les visites des parents d’Hélène se passaient bien grâce à Sophie.
Depuis le qu’elle ni vivait plus avec eux, le lien qui les unissait s’était brisé et ils vivaient chacun de son côté. Jean se laissait absorber par son travail sans trop se préoccuper de ce que faisait Hélène qui ne lui parlait presque plus. Ils soupaient encore ensemble, mais parfois ils n’échangeaient pas deux mots de tout le repas. Elle partait souvent passer la journée chez ses parents et le laissait seul jusque tard dans la soirée.
Hélène devint distante et froide au point de faire chambre à part sous prétexte que Jean la dérangeait en se couchant plus tard qu’elle.
La vie reprenait de temps en temps quand Sophie venait passer quelques jours avec eux. Mais ses visites étaient devenues de plus en plus rares, de même que ses coups de téléphone, mais ils n’y firent pas trop attention, croyant que ses études lui prenaient tout son temps et que cela allait s’arranger sous peu. Jean avait compris que depuis longtemps, Sophie était ce qui les unissait et que depuis des années, plus rien n’existait ni ne se créait qui ne soit directement relié à elle, mais il espérait que les choses s’amélioreraient quand Sophie aurait terminé son doctorat et serait revenue à Montréal. Il s’était résigné à cette relation un peu froide avec sa femme sans jamais envisager que cela puisse conduire à une rupture.
Il ne mangeait presque pas, il ouvrait une des boîtes de conserve qu’il y avait au sous-sol ou l’un des pots de confitures qu’Hélène faisait chaque année et il y touchait à peine. Il se mit à boire, et vida tout ce que la maison pouvait contenir de vins et d’alcools. Cela le maintenait de façon permanente à un niveau d’ivresse avancée bien qu’il développa une résistance incroyable à l’alcool. Il s’était désintéressé de son travail et lui, si consciencieux et ponctuel, n’avait plus retourné les travaux de traduction qu’on lui avait confié et avait refusé ceux qu’on lui apportait. Il y eut quelques visites de clients fâchés qui en le voyant comprirent qu’il n’y avait plus rien à espérer dans l’immédiat. Noël arriva sur ces entrefaites. Sophie n’avait jamais manqué un réveillon de Noël et il se retrouva terriblement seul et blessé par cette atmosphère du temps des fêtes qui avait toujours été si joyeuse dans le passé. Au dernier Noël, elle était venue de Boston et avait passé quelques jours de bonheur calme avec eux ; même le réveillon chez les beaux-parents avait été agréable. On s’était fait des cadeaux : Sophie lui avait offert ces magnifiques aquarelles qu’il avait mises dans son bureau. On avait ri, on avait bu du champagne, Hélène s’était mise au piano et ils avaient chanté tous ensemble.
On lui avait trouvé mauvaise mine, et pas beaucoup d’appétit. Elle suivait un régime végétarien et avait à peine touché à la dinde de Noël préparée par sa grand-mère. Hélène un peu inquiète avait essayé de lui parler, mais elle n’avait pas retrouvé cette intimité qu’elles avaient avant son départ. Sophie restait très évasive sur sa vie à Boston et ses projets. Elle parlait de finir son doctorat, mais ne voulait pas en parler. C’était la dernière fois qu’ils l’avaient vue. Par la suite, elle avait prétexté trop de travail pour ne pas avoir le temps de venir au Québec. Jean espérait bien qu’elle viendrait les voir à Cape Cod pendant les vacances, c’était tout près de Boston, mais elle leur annonça au mois de mai qu’elle partait en Europe pour faire des recherches et qu’elle ne serait plus là pendant l’été. Elle leur promit de venir les voir à son retour. Sans Sophie, Hélène ne voulait plus aller à Cape Cod et ils passèrent donc l’été à la maison.
Sophie ne leur avait laissé ni adresse, ni numéro de téléphone et pendant l’été, ils ne reçurent d’elle qu’une carte postale d’Amsterdam dans laquelle elle ne disait rien, et depuis pas de nouvelles. Inquiet, Jean avait téléphoné à l’université et on lui avait dit qu’elle était en rédaction de thèse et qu’elle avait quitté la résidence universitaire. À moitié rassurés, ils avaient parlé d’aller à Boston, mais comme il ne savait pas quand elle prévoyait rentrer d’Europe et qu’ils ne savaient pas où la trouver ils avaient attendu qu’elle donne signe de vie. Et le temps avait passé. Maintenant, il était seul et l’évocation du dernier réveillon de Noël lui amenait les larmes aux yeux. Il s’en voulait de ne pas être intervenu plus tôt, mais c’était trop tard.
Depuis quelques jours il neigeait régulièrement et tout était blanc, une belle neige propre qui s’harmonisait avec le temps des fêtes. Les enfants en vacances jouaient dans les jardins, faisaient des bonhommes de neige. Les plus vieux jouaient au hockey dans la rue et leurs cris joyeux étaient difficiles à supporter. Les voisins avaient mis des arbres de Noël devant leur maison et des lumières un peu partout. Le soir, à la nuit tombée, la rue était très jolie et pour ne pas la voir, car cela lui faisait trop mal, Jean avait tiré les rideaux et ne les ouvrait plus. Il vivait dans une pénombre permanente qui accentuait sa confusion.
Seul dans sa grande maison vide, sa vie se mit à ressembler à un lent cheminement dans l’absurde. Le temps des fêtes passa et les autobus scolaires recommencèrent à ramasser les élèves chaque matin et à les ramener chaque soir, mais pour lui il n’y avait pas d’amélioration. Les coups de téléphone auxquels il ne répondait pas s’étaient espacés et ça faisait longtemps qu’on ne lui envoyait plus de travail. Fin janvier, c’était le silence total. Les gens ne firent pas trop attention à son histoire et on l’oublia. Il passait de longues journées enfermé chez lui à ne rien faire, sans se laver, sans changer de vêtements, en proie à un désarroi extrême. Chaque fois qu’il essayait de réagir, il abandonnait dès les premières minutes. Il essaya de déblayer la neige devant sa maison, ou de rentrer du bois pour allumer un feu dans la cheminée, mais ne se livra à cette activité que quelques minutes qu’il abandonna complètement gelé, car il n’avait pas pris la peine de s’habiller pour aller dehors. Il pouvait passer de longs moments enfoncé dans un fauteuil, le regard vague et l’esprit perdu dans la contemplation d’une photo, d’un tableau, d’une ombre sur le mur.
Il plaçait tous ses espoirs dans le retour d’Hélène en se disant que quand elle serait là, ils pourraient ensemble faire face à cette terrible épreuve. Il ne sortait jamais de chez lui et raccrochait le téléphone dès qu’il constatait que ce n’était pas la voix d’Hélène. Chaque jour, espérant une lettre d’elle, il regardait son courrier qu’il laissait, éparpillé sur le sol de l’entrée.
Un matin, il reconnut son écriture et sa fébrile, ouvrit la lettre. Malheureusement, elle lui annonçait qu’elle n’avait pas l’intention de revenir, que vivre avec lui dans cette maison avec le souvenir de Sophie était au-dessus de ses forces.
Il s’accrocha à l’idée qu’ils pourraient vivre ailleurs, dans d’autres conditions dans un autre décor et que s’ils étaient ensemble, ils pourraient surmonter cette affreuse situation. Il pensait que s’il lui parlait, il pourrait la convaincre. Il appela chez ses parents. Ce fut son beau-père qui lui répondit et qui lui annonça que sa fille ne voulait plus le voir que la rupture était définitive et qu’elle avait déjà entamé les procédures de divorce. Il se rendit chez eux, mais ne put franchir le seuil de la porte et comme il insistait, ils appelèrent la police.
Une voiture arriva rapidement et on lui intima l’ordre de partir. Son aspect extérieur faisait peur à voir et son beau-père n’eut pas de peine à convaincre le policier qui était prêt à l’arrêter. Jean réalisa que la rupture était définitive et rentra chez lui, désespéré.
On était maintenant début février. Sophie était morte depuis deux mois. La décision d’Hélène l’anéantissait. Il se sentait infiniment coupable, mais il ne savait pas de quoi, et cette question l’obsédait.
Seul et sans espoir, dépourvu de toutes raisons d’exister, Jean se laissa glisser dans un abandon sans fin, dans un anéantissement complet de toute sa personnalité, dans un égarement qui touchait à la folie. Il adopta un comportement qui lui permettait, tout en restant dans un état second, de vivre dans un imaginaire où il pouvait côtoyer ses deux seules préoccupations : sa femme et sa fille.
Cela lui permettait d’échapper à la réalité et faisait vivre certains fantasmes et certaines hallucinations qu’il recherchait. Un jour ayant fait du feu dans la cheminée du salon, il crut voir le visage de Sophie lui apparaître dans les flammes. Pour entretenir cette illusion, il maintint le feu en permanence, s’endormant sur le tapis et se réveillant en sursaut. Son sommeil était baigné de rêves et de cauchemars qui l’impressionnaient beaucoup et qui agissaient sur lui comme une drogue qu’il désirait toujours retrouver. Ces rêves et ces cauchemars faisaient partie de son monde et il ne parvenait pas à faire la différence entre la réalité et l’irréel. Deux pensées l’obsédaient : qu’avait-il fait pour qu’Hélène le quitte et qu’avait-il fait pour que Sophie se suicide. Il se rendait à sa table de travail et essayait de mettre par écrit les raisons qu’il pouvait trouver, mais il abandonnait très vite ne trouvant pas de réponses à ses questions.
Pour Hélène, il finit par trouver une réponse qui le satisfaisait à peu près : leur amour était mort, depuis longtemps et ils ne s’en étaient pas aperçus. Depuis le départ de Sophie pour Boston, il n’y avait plus entre eux ni tendresse ni dialogue. Ils vivaient un peu comme des étrangers liés par les habitudes et maintenant, face à ce terrible drame, elle ne voulait pas partager sa peine avec lui ni le soutenir d’aucune façon. Leur amour n’existait plus, c’était évident, mais il s’était habitué à cette existence avec elle qui aurait pu continuer s’il n’y avait pas eu ce drame. En tout cas, elle ne voulait plus faire quoi que ce soit avec lui.
Il comprit qu’elle ne lui reprochait pas la mort de Sophie, mais qu’elle devait lui en vouloir de ne pas avoir agi l’année précédant sa mort, de ne pas être intervenu, de ne pas avoir senti que quelque chose n’allait pas. Elle devait se faire les mêmes reproches, mais elle lui en attribuait la responsabilité. IL cessa d’espérer son retour et son aide.
Pour Sophie, il ne parvenait pas à comprendre comment elle en était arrivée là. Il y avait trop de choses qu’il ne comprenait pas et cela le torturait. Il sentait bien qu’il aurait peut-être pu intervenir plus tôt, mais il l’avait toujours laissée agir à sa guise et n’avait jamais eu à s’en plaindre.
Quelques jours plus tard, les dernières gouttes d’alcool bues, il se retrouva sans rêves et sans sommeil. Il sortit de la maison et se rendit à pied en grelottant au centre d’achat le plus proche. Il acheta du cognac et tous les somnifères en vente libre qu’il put trouver à la pharmacie. La pharmacienne le regarda un peu de travers, haussa les épaules et passa à la cliente suivante. Si l’alcool continuait à produire le même effet, les somnifères, eux, n’en firent aucun ou du moins pas ce qu’il espérait. Il s’endormait et se réveillait longtemps après, abruti d’un sommeil sans rêves. Combinés à l’alcool, ils produisaient un effet secondaire qu’il détestait : il avait l’impression que ses pieds ne touchaient plus le sol et qu’il flottait. Il renonça aux somnifères.
Fin février, pour lui, rien n’avait changé, mais le bel hiver blanc, froid et lumineux se changea en pluie et grisaille. La neige se transformait en plaques de glace et les fils électriques se brisaient son le poids des glaçons qui pendaient. Il n’y avait là rien de joyeux ni de positif et cela s’ajouta à son abattement.
Il était rendu au point où il ne ressentait que dégoût de tout, un rejet du quotidien, manque d’envie et d’intérêt. Il y avait chez lui, un profond chagrin, une impuissance à modifier le destin, un regret, des remords et un sentiment de culpabilité indéfinissable car s’il se sentait coupable de la mort de sa fille, mais ne savait pas pourquoi. Il devait se rendre à l’évidence : il ignorait complètement ce qui avait poussé Sophie à prendre cette décision.
Dans ses moments de lucidité, il chercha à analyser sa propre situation afin de mieux comprendre celle de sa fille, mais son esprit confus ne parvenait pas à suivre une pensée ordonnée, et cela dans la mesure où il était possible de trouver une réponse cohérente à sa quête. Ce dont il était sûr c’était que la vie qu’il menait depuis que. Sophie était morte et qu’Hélène était partie le dégoûtait. Le vide dans lequel il vivait, il pouvait l’analyser, le sentir et il se demandait si Sophie avait vécu la même chose.
Fatigué, épuisé, des idées suicidaires s’installèrent lentement en lui et il en arriva à la conclusion que c’était la seule solution envisageable pour sortir de l’enfer dans lequel il vivait. Finalement, après quelques jours à soupeser le pour et le contre il décida de franchir le pas et de mettre fin à ses jours. C’était la seule issue. Il ne savait pas encore comment, mais il allait y penser. Il voulait le faire de la façon la plus simple et la moins dérangeante pour lui-même et les autres.
Sa décision n’avait rien d’une impulsion irréfléchie, c’était plutôt la conséquence d’un constat rationnel qui dans les circonstances l’amenait à penser que c’était la meilleure solution. Cette grande décision prise, il se sentit soulagé. Après ces semaines vides où il ne parvenait pas à prendre la moindre décision, celle-ci, aussi drastique soit-elle, lui faisait du bien et lui permettait de recommencer à penser. Il se méfiait cependant de lui-même et de l’état lamentable dans lequel il se trouvait. Il voulait que cette décision soit prise à froid, à jeun et en toute connaissance de cause. Il décida donc de changer son style de vie afin de se confirmer à lui-même la décision qu’il venait de prendre.
Il cessa de boire de façon exagérée, recommença à s’alimenter en commandant chaque jour un repas qu’on venait lui livrer, recommença à se laver, se changer, s’habiller.
Quelques jours plus tard, ayant quitté l’espèce de nuage éthylique dans lequel il flottait, il n’avait pas changé d’avis et était toujours décidé à mourir. La vie n’avait plus aucun attrait et il voulait en finir.
Il cherchait régulièrement, au fur et à mesure que son rythme de vie devenait plus cohérent, à analyser sa propre décision pour essayer de comprendre mieux celle de sa fille. La décision qu’il avait prise de mettre fin à ses jours et le chemin qu’il avait parcouru pour en arriver là le rapprochèrent d’elle. Il eut la vision de ce qu’elle avait dû vivre, de sa souffrance, de son désespoir, de cette attirance vers la fin d’une vie qui vous fait horreur et qu’on ne veut plus subir. Mais si pour lui-même il en connaissait la cause, pour sa fille il ignorait totalement ce qui avait provoqué ce glissement vers ce néant et il s’en voulait de ne pas avoir pu intervenir, d’avoir été si aveugle. Il s’interrogeait et faisait toutes sortes d’hypothèses sans jamais en être satisfait, car s’il comprenait qu’elle n’ait pas demandé d’aide, qu’elle ne soit pas venue leur parler, ce devait être par peur d’être incomprise ou étouffée sous trop d’amour protecteur. Il réalisa qu’il ne saura jamais comment elle avait glissé mois après mois dans une dépression qui l’avait isolée du monde extérieur et même des gens qui l’aimaient ni pourquoi elle avait finalement mis fin à ses jours. Son imagination lui présentait toutes sortes de scénarios qui ne reposaient sur rien, mais il comprenait que c’était la conséquence d’une longue descente aux enfers et par là il se rapprochait d’elle. IL cherchait encore à comprendre, même s’il savait qu’il n’aurait pas de réponse.
Chaque fois qu’il pensait à elle, aux dernières semaines qu’elle avait dû vivre seule avec sa terrible angoisse, il pleurait, la gorge crispée sans parvenir à s’arrêter. Il voulut mettre cette recherche de côté provisoirement, mais elle revenait inexorablement le hanter et cela le confirmait dans sa décision.
Il revint progressivement à un rythme de vie plus conforme à ses anciennes habitudes sans que cela ne lui apporte la moindre satisfaction, mais il jugea que c’était indispensable s’il voulait remettre tout en ordre avant de mourir. Il avait toujours été un homme raisonnable, ordonné et fiable et c’est ainsi qu’il tenait à ce qu’on le perçoive, et c’est ce souvenir qu’il voulait laisser à ceux qu’il avait connus.