The Saint's Magic Power is Omnipotent - L'EXTRAordinaire Apothicaire (Francais Light Novel) : Tome 4 - Yuka Tachibana - E-Book

The Saint's Magic Power is Omnipotent - L'EXTRAordinaire Apothicaire (Francais Light Novel) : Tome 4 E-Book

Yuka Tachibana

0,0
8,49 €

-100%
Sammeln Sie Punkte in unserem Gutscheinprogramm und kaufen Sie E-Books und Hörbücher mit bis zu 100% Rabatt.
Mehr erfahren.
Beschreibung

La prochaine mission de Sei, qui est désormais capable d’activer la magie des saintes, consiste à purifier une forêt regorgeant d’herbes médicinales précieuses. Alors qu’elle progresse dans ces bois, rassurée et protégée par des chevaliers et des mercenaires à la musculature imposante, apparaît « ce » monstre résistant aux attaques physiques !
Après avoir sollicité des renforts auprès de l’ordre des sorciers de la cour, Sei prend à cœur sa mission et se prépare méticuleusement pour l’affrontement à venir. Entre la confection de provisions pour les expéditions et la culture d’herbes médicinales…
Ah, mais attendez, il y a erreur de ma part, c’est plutôt pour le plaisir, ça !
Quoi qu’il en soit, rien n’a été laissé au hasard ! Avec le soutien d’une solide escorte, elle se met en route pour sauver la forêt en péril grâce à la puissance de la sainte !

Das E-Book können Sie in Legimi-Apps oder einer beliebigen App lesen, die das folgende Format unterstützen:

EPUB
MOBI

Seitenzahl: 218

Bewertungen
0,0
0
0
0
0
0
Mehr Informationen
Mehr Informationen
Legimi prüft nicht, ob Rezensionen von Nutzern stammen, die den betreffenden Titel tatsächlich gekauft oder gelesen/gehört haben. Wir entfernen aber gefälschte Rezensionen.



Table des matières

Cover

Pages couleur

Chapitre 1 — En route !

Chapitre 2 — Des complications plutôt gênantes

Chapitre 3 — Expérimentations

Chapitre 4 — Résurgence

Chapitre 5 — Régénération

Bonus — Recueil d’histoires courtes

Postface

A propos de JNC Nina

Copyright

Points de repère

Pages couleur

Table des matières

Chapitre 1 — En route !

Une fois les conditions d’activation de la magie des saintes élucidées, je fus en mesure de l’invoquer à ma guise, même si cette découverte m’avait plongée dans l’embarras. Jamais je n’aurais pu imaginer que penser au commandant serait la clé pour déclencher le sortilège. Ç’avait été une surprise totale !

Et quelle humiliation à chaque activation du sort !

Bien que réticente à l’idée de l’exprimer à voix haute, je ne pouvais m’empêcher de le crier intérieurement…

J’étais toutefois reconnaissante du fait que la maîtrise de cette aptitude me permette enfin d’avancer dans mes expérimentations avec les herbes médicinales, longtemps restées au point mort. Ces expériences portaient sur la culture de plantes nécessitant une bénédiction, exigence peu commune dans le domaine de l’horticulture traditionnelle. Celle-ci s’apparentait en réalité à la magie des saintes. Jusqu’à présent, mon incapacité à l’activer avait suspendu mes recherches, mais maintenant que je pouvais enfin les poursuivre, je me sentais revigorée.

Je me hâtai donc vers la distillerie pour faire part à Corinna de mon intention d’utiliser la bénédiction. Ensemble, nous nous dirigeâmes vers les parcelles d’herbes médicinales situées à l’arrière du château. Les préparatifs achevés, l’expérience pouvait commencer.

Quoique très enthousiaste, je fus surprise par la simplicité du protocole : il suffisait de bénir un pot de fleurs avant d’y semer des graines. Rien de plus. Il ne restait plus qu’à observer la croissance des plantes.

Après avoir semé diverses variétés, je m’apprêtais à regagner la distillerie lorsque Leo fit son apparition. Au début, j’avais cru à une coïncidence, mais il s’avérait qu’il était venu expressément pour me suggérer d’intégrer la troupe de mercenaires.

Bien que flattée par cette sollicitation, je ne pouvais me joindre à eux, ma présence étant requise ailleurs qu’au domaine de Klausner.

Le commandant apparut soudainement au moment où j’allais poliment refuser l’offre. Je ne pus m’empêcher de retenir mon souffle. Devant moi se tenait un homme dont l’aura correspondait parfaitement à son surnom de « chevalier de glace », en contraste total avec son attitude habituelle. Néanmoins, son regard glacial était dirigé sur Leo.

Dans son zèle à me recruter, ce dernier m’avait saisi l’épaule, ce qui avait amené le commandant à croire que nous avions un différend. Après clarification, la tension se dissipa et, tandis qu’on lui expliquait pourquoi je ne pouvais intégrer leur troupe, le mercenaire eut une illumination.

— Non, attends… Ne me dis pas que c’est toi, la sainte ? s’exclama-t-il, stupéfait, au milieu du champ d’herbes médicinales.

Face à son étonnement, je réalisai ne lui avoir jamais révélé mon statut.

— Est-ce que j’aurais omis de vous le dire ?

Alors que je tentais de masquer mon embarras par un sourire gauche, la réponse que j’avais anticipée ne se fit pas attendre.

— Absolument, tu ne l’as jamais mentionné ! s’écria-t-il avec une verve digne d’un comédien.

Cette réaction lui valut peu après une correction de la part de Corinna.

— Aïe, ça fait mal !

À bien y réfléchir, il me semblait n’avoir effectivement partagé que mon nom.

J’avais donc bien oublié de le mentionner…

— Permettez-moi de me présenter de nouveau, je suis Sei Takanashi, la sainte. 

Le fait de me nommer moi-même de la sorte était légèrement gênant.

Est-ce que je vais devoir me présenter ainsi à chaque fois désormais ? Je préférerais de loin m’en abstenir.

Je grimaçais en silence. Le mercenaire, à qui j’avais confié mon identité, paraissait lui aussi mal à l’aise, murmurant des propos incompréhensibles tels qu’« Avec tout mon respect ». L’apothicaire l’observait, consternée.

À cet instant, le commandant profita de l’opportunité pour s’adresser à Leo.

— Il est impensable que Sei, la sainte, se joigne à une troupe de mercenaires. Avez-vous d’autres questions ?

— Ah, non…

— Dans ce cas, c’est tout ce qu’il y avait à dire. J’ai moi aussi des affaires à régler avec elle.

Malgré une expression moins sévère que lors de leur première rencontre, l’absence d’émotions conférait à son visage une austérité inhabituelle. Sa voix, d’un ton plus incisif, ne laissait pas de place au doute. Leo, qui partageait ce ressenti, parut renoncer à l’idée de poursuivre, même s’il semblait avoir encore des choses à dire. Après nous avoir adressé une révérence, il quitta les lieux.

— Eh bien, je pense qu’il est temps pour moi de retourner à mes occupations.

Le départ inattendu de Corinna m’avait prise de court, ce qui m’arracha malgré moi une exclamation.

— Comment ?

Elle se retourna vers moi et fit remarquer :

— Vous avez des sujets à aborder, n’est-ce pas ?

Ah, c’est vrai. Le commandant a mentionné avoir des affaires à régler avec moi.

Voyant à mon visage que je venais de me le rappeler, elle poussa un léger soupir et se dirigea alors de nouveau vers la distillerie.

Au final, il ne resta plus que messire Hawke et moi. Tandis que j’observais l’apothicaire s’éloigner d’un œil distrait, une voix retentit près de moi. En levant les yeux, je constatai que son attention se portait sur un pot de fleurs disposé sur l’estrade.

— Vous étiez en plein travail ?

Son visage, d’abord impassible, se mua soudain en une mine désolée. Je me hâtai de l’assurer que mes tâches étaient déjà achevées.

— Ah, non, j’avais justement terminé.

À ces paroles, son expression s’adoucit.

— Que cultivez-vous donc ? En fait, je suppose qu’il est inutile de demander.

— Des herbes médicinales.

— Je m’en doutais.

— « Je m’en doutais » ? Comment ça, « Je m’en doutais » ?

Devant ma moue de protestation, le commandant ne put s’empêcher de rire.

Je travaillais avec Corinna, responsable de la distillerie, il s’avérait donc évident que ce que nous cultivions était des plantes médicinales. Je souhaitais croire que ce n’était pas parce qu’il considérait que j’avais une obsession pour les herbes.

— Au fait, vous avez mentionné avoir quelque chose à régler avec moi ?

— Ah, oui, c’est vrai. J’aimerais effectivement discuter de quelque chose avec vous. Ce n’est pas idéal de parler debout ici. Que diriez-vous de changer d’endroit ?

De quoi peut-il bien vouloir me parler ?

L’invitation à se déplacer vers un autre lieu semblait annoncer une discussion prolongée. Il était donc judicieux de chercher un cadre plus confortable. Avec cette idée en tête, je me laissai guider par le commandant.

En chemin, la conversation s’orienta curieusement vers Leo. Or, je n’avais guère de détails à partager. Nos interactions s’étaient limitées à de simples salutations, ponctuées de temps à autre de banalités anodines. Si bien que je ne saurais quoi dire si l’on me demandait de décrire nos échanges. Les rares fois où nous avions discuté, c’était principalement à propos de potions, ce qui fit naître un sourire sur les lèvres de messire Hawke.

— L’autre jour, j’ai reçu des compliments de la part de plusieurs mercenaires, tous impressionnés par l’efficacité de mes potions.

Quand je mentionnai que non seulement Leo, mais aussi les autres membres de sa troupe m’avaient félicitée, il ne put s’empêcher de laisser échapper un rire étouffé.

— Ah, vraiment ?

Lorsque je lui demandai ce qui le faisait rire, le commandant, toujours amusé, me fit part d’un souvenir datant de mes premières livraisons de potions à l’ordre des chevaliers. Maintenant qu’il en parlait, il était vrai qu’au début, ces derniers avaient réagi de manière similaire aux mercenaires. En me remémorant ces moments, un sourire se dessina sur mes lèvres.

Au fil de notre discussion, il sembla redevenir lui-même. J’étais soulagée de ne pas devoir marcher en silence à ses côtés. Se retrouver seule en compagnie de quelqu’un qui, il y a encore peu, dégageait une aura de tension aussi intense s’avérait être un exercice éprouvant pour les nerfs.

— On dirait qu’il avait vraiment envie de vous recruter. Est-ce qu’il en avait déjà parlé auparavant ?

— Non, c’est la première fois qu’il me le proposait.

Plongé dans ses pensées, le commandant se caressa le menton, perplexe.

— C’était donc la première fois…

Les rides de son front s’accentuèrent, comme s’il ne trouvait pas de réponse à la question qu’il se posait.

— Avez-vous une quelconque idée de la raison pour laquelle il vous a fait cette proposition ?

À y réfléchir, j’avais bien déjà une idée des motifs qui avaient poussé Leo à m’approcher.

— Récemment, j’ai utilisé la magie pour soigner des mercenaires de retour de mission. Je pense que c’est pour cela.

— Vous avez utilisé la magie ?

— Oui. J’avais d’abord pensé leur donner des potions de la distillerie, mais on m’a fait comprendre que ce serait malavisé…

Tandis que je narrais les événements récents, le commandant me scrutait avec intensité, les sourcils toujours froncés, un geste que je perçus comme un reproche silencieux.

Euh, ce n’était probablement pas la meilleure idée, n’est-ce pas ? Oui, ça ne l’était sûrement pas.

J’entendis le son d’un profond soupir au moment où je détournais doucement mon regard.

Je suis vraiment désolée.

Alors que je me confondais en excuses intérieurement, nous parvînmes à notre destination. Il m’avait guidée jusqu’à la salle de garde de l’ordre des chevaliers.

À peine étions-nous entrés dans son bureau qu’il m’invita à m’asseoir sur un des canapés réservés aux visiteurs.

Cela veut-il dire que notre conversation va se concentrer sur les expéditions de chasse aux monstres ?

Une fois installée et après un court instant de répit, je décidai de briser le silence.

— Alors, de quoi souhaitiez-vous parler ?

— De nos projets à venir.

— Quand vous dites « projets », vous parlez des expéditions de chasse ?

— Oui, les reconnaissances alentour étant achevées, il est temps de lancer l’offensive de façon plus intensive.

L’heure était donc venue. Je me mis aussitôt en posture de travail, me redressant instinctivement.

J’avais déjà pris connaissance des comptes rendus des chevaliers ; ceux-ci avaient poursuivi leurs investigations approfondies. La veille s’était terminée la reconnaissance prévue du territoire, et le commandant me fit alors part de nouvelles informations concernant les monstres peuplant les environs de la ville.

Selon les derniers rapports, leur nombre était resté élevé, comparable à ce que l’on avait connu aux abords de la capitale. Les locaux confirmaient eux aussi qu’il y en avait plus que par le passé. Cependant, les mercenaires constataient une diminution depuis peu. Certains avançaient même que l’arrivée des chevaliers avait significativement réduit leur présence.

J’avais bien ma petite idée sur la cause de ce changement.

— Des histoires semblables couraient également dans la capitale, lâcha le commandant avec un sourire crispé.

Je ne pus que lui en offrir un équivalent en retour.

— En effet.

Notre présence dans le domaine de Klausner avait manifestement eu des répercussions positives sur la quantité de monstres. Cependant, le problème principal concernait plutôt la nature de ces derniers. Ceux apparaissant près du domaine étaient de rang supérieur à ceux rencontrés à proximité de la capitale, et un rang élevé signifiait, inévitablement, une force accrue.

Cela me rappelait les RPG auxquels je jouais au Japon, où les monstres devenaient plus forts à mesure que l’on s’éloignait de la ville de départ.

Peut-être que dans ce monde également, plus on s’éloigne de la capitale, plus les monstres rencontrés sont puissants ? Ça me semble difficile à croire…

Plus sérieusement, même si leur nombre restait identique, la présence de monstres de haut rang rendait bel et bien leur élimination plus ardue.

Les chevaliers du palais, élite parmi l’élite et réputés pour leur force, avaient récemment focalisé leurs efforts sur les zones avoisinant la capitale royale. Les créatures menaçant cette dernière et celles rencontrées dans le domaine de Klausner différaient, ce qui impliquait d’adapter les tactiques de combat. Bien entendu, le commandant prévoyait d’aborder la situation avec prudence, mais je redoutais une augmentation du nombre de blessés comparativement aux missions précédentes. Il y avait une limite à ce que les potions pouvaient guérir. C’est là qu’intervenaient les sorts de soin.

— Cela signifie que je me joindrai à vous pour les futures expéditions de chasse, c’est bien ça ?

— J’en suis navré. Nous avons bien des membres de l’ordre des sorciers de la cour parmi nous, mais peu sont capables d’utiliser la magie de soin.

— Cela ne me dérange pas. De toute façon, j’avais l’intention de participer.

Eh oui, ma mission principale ici est la chasse aux monstres ; préparer des potions, c’est pour le plaisir.

Je gardai cette pensée pour moi, sans la verbaliser.

— Nous avons exploré chaque jour aussi loin que nous le pouvions tout en revenant avant la tombée de la nuit, mais pour l’instant, le fameux marais reste introuvable. Les monstres que nous rencontrons sont redoutables, mais il est peu probable que nous soyons confrontés à des hordes aussi importantes que celles de la forêt ouest.

— Le fameux marais ?

— Oui, le marais noir que nous avions trouvé dans la forêt de Goshe. Nous pensions qu’il pourrait y en avoir un similaire ici, vu la multiplication des monstres…

Je vois, toujours aucune trace du marais.

Lors de mon arrivée dans le domaine de Klausner, j’étais incapable d’activer la magie des saintes de mon propre gré, et, pour être honnête, je craignais ce qu’il adviendrait si un marais noir était découvert.

Mais maintenant, la situation avait changé. Je parvenais, quoique maladroitement, à maîtriser le mana doré. Il était quelque peu décevant de ne pas en avoir trouvé un, car il avait suffi de purifier le marais noir pour voir la population de monstres diminuer en un clin d’œil. Je m’étais dit que si l’on en découvrait un sur les terres du domaine, nous pourrions résoudre le problème de la même manière.

En même temps, l’activation de cette magie est particulièrement… délicate, il faut bien le dire.

………

— Quelque chose ne va pas ?

— Euh ?

— Vous avez le visage un peu rouge, vous ne vous sentez pas bien, peut-être ?

Paniquée, je m’empressai de dire non de la tête.

— Oh, non, ce n’est rien du tout !

Tandis qu’il persistait à se soucier de mon état, je m’efforçai tant bien que mal de le tranquilliser en lui assurant que tout allait bien, parvenant de justesse à désamorcer la situation. Il m’était impossible de lui expliquer pourquoi mes joues s’étaient empourprées.

Peu après le lever du soleil, seul le cliquetis des instruments résonnait dans la distillerie. De temps à autre, on pouvait entendre les apothicaires échanger quelques mots, mais en général, le silence régnait pendant le travail. Je ne dérogeais pas à la règle, et moi aussi je préparais des potions sans un bruit.

Plusieurs jours s’étaient écoulés depuis mon entretien avec le commandant, et c’était le lendemain que débuterait la véritable traque des monstres.

Bien que je sois de la partie, cela ne signifiait pas pour autant que les potions deviendraient superflues. Comme disait le proverbe, « mieux vaut prévenir que guérir ». Ainsi, j’avais l’intention d’en emmener comme à l’accoutumée et je me lançai dans leur préparation.

— J’avais entendu des rumeurs, mais toi, t’es vraiment hors norme.

Cette remarque, émise derrière moi, me fit sursauter et je ne pus réprimer un frisson. En me retournant vers l’origine de cette voix emplie d’étonnement, je découvris Leo, dont l’expression du visage reflétait fidèlement l’intonation de ses paroles. Quand était-il arrivé, au juste ?

Habituellement, son entrée dans la distillerie ne passait pas inaperçue, tant il avait l’art de se faire remarquer par des bruits ostentatoires. Mais ce jour-là, absorbée par mon travail, je n’avais rien entendu des sons alentour. Cela dit, il avait prononcé un mot qui avait retenu mon attention.

— Des rumeurs ?

— Ouais. On raconte que l’apothicaire fraîchement arrivée peut produire des tas de potions.

Son regard, posé sur les fioles alignées sur la table, me rappelait celui de Jude, du directeur, de Corinna ou de bien d’autres encore. Face à son air ébahi, je me sentis quelque peu embarrassée et laissai échapper un sourire contrit.

— Et d’où vient cette rumeur ?

— Évidemment de la distillerie, et peut-être de mes hommes aussi.

— Les mercenaires aussi ?

— Ils viennent régulièrement ici chercher des potions, n’est-ce pas ? Certains t’ont vue à l’œuvre dans ces moments-là.

Il semblait qu’ils m’aient observée sans que je m’en aperçoive. Non pas que j’avais cherché à me cacher, mais j’avais comme l’impression d’avoir été prise sur le fait, ce qui me mit quelque peu mal à l’aise. Je plissai les yeux involontairement, ce qui fut mal interprété par Leo, le poussant à réagir à la hâte.

— Ah… Veuillez m’excuser. Je vais surveiller mon langage.

— Pardon ?

— Hein ? J’ai mal compris ?

— Vous avez mal compris quoi ?

— Eh bien, je pensais que… tu trouvais que je ne m’adressais pas correctement à… toi, la sainte.

— Pas du tout. Parlez-moi normalement, s’il vous plaît. Ça me gênerait si vous changiez votre manière de me parler.

Mon air légèrement désapprobateur l’avait amené, par erreur, à penser qu’il m’avait offensée. Une méprise totale. Si cela avait été une décision prise dès le départ, soit, mais changer en cours de route, c’était déplaisant… Les rapports plus informels me convenaient ; toutefois, être traitée avec trop de révérence me donnait l’impression d’être mise à l’écart, ce qui me peinait quelque peu.

— Ah, je vois. Alors je vais continuer comme avant, si ça te va.

— Oui, s’il vous plaît.

— En fait, ça m’arrange aussi. J’ai toujours eu du mal avec les formules de politesse.

À ces mots, un large sourire illumina le visage de Leo, m’incitant à faire de même. Rassurée de constater qu’il me traitait comme avant, je saisis l’occasion pour aborder de nouveau le sujet des rumeurs.

Selon lui, dès le retour du premier mercenaire témoin, l’annonce de l’arrivée d’une nouvelle apothicaire capable de concocter des potions en quantité phénoménale avait suscité un émoi considérable. Ce dernier avait décrit la scène telle qu’il l’avait vue, mais au début, personne ne le croyait. Ce n’était guère surprenant. Il était impensable qu’un apothicaire, généralement apte à produire uniquement une dizaine de potions intermédiaires par jour, se retrouve avec une paillasse presque engloutie sous les fioles fraîchement préparées.

Pourtant, l’insistance de ce mercenaire quant à la véracité de son récit avait poussé certains curieux à se rendre à la distillerie sous couvert de récupérer des potions, afin de vérifier par eux-mêmes. Cela expliquait pourquoi on ne voyait jamais les mêmes visages à chaque visite. Inutile de dire que les affirmations du premier témoin n’avaient pas tardé à être confirmées.

— C’est pour vérifier cela que vous êtes venu vous-même, Leo ?

— Ah, eh bien, oui, c’est ça.

Je croyais qu’il était apparu pour confirmer la rumeur, à l’instar des autres mercenaires. Pourtant, sa réponse s’était révélée étrangement évasive. Y avait-il un autre motif à sa visite ?

Intriguée, je l’interrogeai du regard, et le vis se gratter la tête avant de prendre la parole avec hésitation.

— Ces potions, elles sont destinées à l’ordre des chevaliers ?

— Oui, celles destinées aux mercenaires ont déjà été préparées.

— Je vois… En fait, ce n’est pas vraiment ce que je voulais dire…

Je pensais qu’il était préoccupé par le fait que les potions pour les mercenaires soient reléguées au second plan, mais apparemment, ce n’était pas le cas. Comme il mettait du temps à poursuivre, je me remis à mon ouvrage en attendant qu’il se décide à parler. L’air gêné, il me questionna au sujet de la chasse contre les monstres.

— Alors, toi aussi, tu vas participer à la prochaine expédition ?

— Oui, c’est pour cela que j’ai fait le voyage depuis la capitale.

— Avec l’ordre des chevaliers, c’est ça ?

— C’est bien ça.

Alors que je m’interrogeais sur la raison de sa question, nos regards se croisèrent et je perçus de l’anxiété dans son regard.

— Il y a un problème ?

— Non, en fait, je me demandais… Tout ira bien pour toi ?

— Par rapport à quoi ?

— La chasse aux monstres.

— Comment ça ?

— Je sais que tu as déjà participé à des expéditions en forêt, mais je suis quand même inquiet.

Qu’est-ce qui peut bien le préoccuper de la sorte ?

— Vous faites allusion à notre capacité à faire face ?

— Oui, enfin, pas seulement ça…

Leo se mit à me fournir une explication entrecoupée. Il m’informa qu’il avait eu vent de mon incursion dans la forêt de Goshe, pour y affronter des monstres. Les rumeurs se doublaient des confidences du commandant sur les chasses précédentes.

Ainsi, il était au courant que j’avais apporté mon soutien aux chevaliers, comme l’aurait fait un sorcier de la cour ordinaire. Toutefois, les créatures qui peuplaient la forêt de Klausner étaient plus dangereuses que celles de la forêt de Goshe. Malgré mon expérience, il était extrêmement inquiet pour ma sécurité lors de cette nouvelle expédition.

La population de monstres de la région de Klausner avait diminué, mais leur présence demeurait importante. Qui plus est, cette baisse concernait principalement ceux apparaissant dans les étendues proches de la capitale du domaine, tandis que ceux peuplant les forêts éloignées étaient aussi abondants qu’auparavant.

Dans ce monde, les monstres qui peuplaient les bois étaient en général plus redoutables que ceux des plaines, et ceux de la région de Klausner étaient de surcroît réputés pour être plus féroces. Il devenait alors clair que la prochaine expédition, à l’inverse de celle dans la forêt de Goshe, s’annonçait particulièrement éprouvante. Les inquiétudes de Leo étaient donc tout à fait légitimes.

— Comme je n’ai encore jamais mis les pieds dans ces bois, je ne peux pas l’affirmer avec certitude, mais je doute qu’on nous envoie directement dans ses profondeurs sans reconnaissance préalable.

— Les monstres sont nettement plus puissants au cœur de la forêt qu’à sa périphérie. Si tu me disais qu’ils avaient l’intention de s’aventurer jusque dans ses tréfonds, ordre des chevaliers ou non, je m’y opposerais !

— Je suis d’accord. Moi aussi, je m’y opposerais.

— Bien. Si, comme tu dis, ils ont l’intention d’y aller prudemment tout en restant à l’affût, alors ça devrait le faire, non ?

Avec un sourire malicieux, je lançai sur un ton badin :

— Absolument. Et puis, malgré les apparences, je suis plus forte qu’il n’y paraît.

Ce à quoi il répondit par une réplique tout aussi espiègle :

— Oh ? Quelle assurance !

Sérieusement, ce n’est pas pour plaisanter. Pour ce qui est du niveau de base, je figure sûrement parmi les meilleurs.

Cela dit, je me gardais de le dire à haute voix.

— Bien que je prenne part à l’expédition, mon rôle se limitera essentiellement au soutien ; je ne serai pas en première ligne, et les chevaliers me protégeront.

— Je vois. J’avais tort de m’inquiéter, alors.

— Non, votre inquiétude me va droit au cœur, merci.

C’est avec gratitude que j’accueillais ses préoccupations à mon égard ; cela soulignait la nature profondément altruiste de Leo, qui commandait sa troupe de mercenaires avec bienveillance. Le fait qu’il vienne voir comment j’allais, alors même que je n’avais pas rejoint sa compagnie, en disait long. Après un court échange sur la situation dans les bois, il quitta la distillerie.

Le lendemain, dès l’aube, je me dirigeai vers le bureau du seigneur en compagnie de messire Hawke. Cette rencontre protocolaire, préalable à notre départ, servait de cérémonie formalisant ma participation à l’expédition. Le discours du seigneur, qui usait d’une pléthore de formules de politesse propres à la noblesse, pouvait être résumé en un conseil : « Soyez prudents. »

Selon les indications fournies par le commandant, il n’était pas question de nous lancer tambour battant dans l’action dès le premier jour, ce qui me laissait donc penser que tout irait pour le mieux.

En chemin vers le point de rendez-vous, nous échangeâmes sur le programme à venir.

— Nous nous rassemblons avant de partir, c’est bien ça ?

— En effet. Après une allocution de ma part, nous prendrons le départ.

— Je n’ai rien à faire de particulier, n’est-ce pas ?

— Hum ? Vous souhaitiez aussi adresser quelques mots d’encouragement ?

— Non, merci, je préfère m’abstenir.

J’avais bien failli me retrouver dans une situation délicate, mais fort heureusement, j’étais parvenue à l’éviter. L’idée de prendre la parole devant tant de personnes me paraissait inconcevable. Je préférais de loin rester en retrait.

Sans doute s’agissait-il d’une plaisanterie de sa part. À l’instant où j’avais refusé catégoriquement, j’avais vu ses épaules tressaillir légèrement. Il avait porté sa main à sa bouche, comme pour réprimer un éclat de rire. Ces derniers temps, son comportement envers moi n’était pas sans me rappeler celui du directeur. Je me disais qu’étant amis depuis l’enfance, il était probable qu’ils aient en commun ce sens de l’humour si particulier.

Mon regard réprobateur, les yeux mi-clos, le fit craquer ; il se mit à rire en se cachant, incapable de retenir son hilarité plus longtemps.

À notre arrivée au lieu de rassemblement, je fus impressionnée par la foule présente, bien plus importante qu’à l’accoutumée. La participation des mercenaires, en plus de celle de l’ordre des chevaliers, expliquait sans doute cette affluence. C’était la première fois que je voyais une telle mobilisation.

On m’avait dit que l’événement servirait à officialiser par la même occasion la première participation de la sainte, ce qui justifiait la présence exceptionnelle des membres de la troupe de mercenaires.

Alors que je marchais à proximité de ces derniers pour rejoindre le carrosse qui m’avait été assigné, je ne suscitai aucune attention particulière. Vêtue d’une robe similaire à celle des sorciers de la cour, et le visage dissimulé sous une capuche, je passais sans doute inaperçue, d’autant plus qu’un autre sorcier de la cour se trouvait à proximité, contribuant certainement à accentuer mon anonymat.

Tandis que je m’apprêtais à monter dans le carrosse, mon regard s’attarda involontairement sur la main que le commandant me tendait.

— Je vous en prie.

Lorsque mon regard se porta sur son visage, il m’offrit un sourire rayonnant.

Ah… oui, c’est vrai, il me propose son escorte.

— Merci beaucoup.

Avec une pointe de nervosité, je le remerciai en souriant et plaçai délicatement mes doigts sur sa paume ouverte.

Oh là là… Je ne me fais décidément pas à ce genre d’attentions.

À la capitale, nous avions l’habitude de monter à cheval ensemble, partageant rires et complicité. Je pensais m’être accoutumée à sa présence, mais le simple fait qu’il me prenne la main, même si ce n’était que pour m’assister, me rendait toujours nerveuse.

Comme s’il avait lu en moi, au moment précis où j’allais grimper dans le carrosse et où je m’apprêtais à retirer ma main, il resserra brièvement ses doigts autour des miens. Ce geste fugace suffit à faire naître une vive chaleur sur mes joues.

Une fois assise, je lui décochai un regard de reproche, auquel il répondit par un sourire triomphant, clairement satisfait de son effet.

C’était un acte prémédité.

Une fois la porte du carrosse refermée, il se dirigea vers les rangs de chevaliers. Peu de temps après, une fois son discours terminé, nous nous mîmes en route.