Erhalten Sie Zugang zu diesem und mehr als 300000 Büchern ab EUR 5,99 monatlich.
Extrait : "CIUTA : Ma belle dame, puis-je vous dire un mot ? MARIANNE : Que me voulez-vous ? CIUTA : Un jeune homme de cette ville est éperdument amoureux de vous ; depuis un mois entier, il cherche vainement l'occasion de vous l'apprendre ; son nom est Coelio ; il est d'une noble famille et d'une figure distinguée."
Sie lesen das E-Book in den Legimi-Apps auf:
Seitenzahl: 55
Veröffentlichungsjahr: 2015
Das E-Book (TTS) können Sie hören im Abo „Legimi Premium” in Legimi-Apps auf:
EAN : 9782335005486
©Ligaran 2014
CLAUDIO : podestat.
OCTAVE.
CÉLIO.
TIBIA : valet de Claudio.
PIPPO : valet de Célio.
MALVOLIO : intendant d’Hermia.
UN GARÇON D’AUBERGE.
DOMESTIQUE DE MARIANNE.
DOMESTIQUES D’HERMIA.
DEUX SPADASSINS.
MARIANNE : femme de Claudio.
HERMIA : mère de Célio.
La scène est à Naples.
(Costumes italiens du temps de François Ier.)
Les indications sont prises du public. Le premier personnage inscrit occupe le n° 1, à la gauche du spectateur, et ainsi des autres. Ces indications sont données pour éviter la confusion dans les entrées et les sorties, dans le cas où la pièce serait jouée ailleurs qu’à la Comédie Française.
Le théâtre représente une place publique. À droite, au premier plan, une grille de jardin, attenant à une maison dont la porte d’entrée est près de la grille. Un balcon en saillie est au premier étage, entre la porte et le tournant de la maison ; une jalousie et un rideau masquent la fenêtre. À gauche, au premier plan, une auberge avec une tonnelle au-devant, sous laquelle se trouvent une table et un banc.
Célio, Pippo.
(Ils entrent par la droite, du plan au-dessus de la maison.)
Eh bien, Pippo, tu viens de voir Marianne ?
Oui, monsieur.
Que t’a-t-elle dit ?
Plus dévote et plus orgueilleuse que jamais. Elle instruira son mari, dit-elle, si on la poursuit plus longtemps.
Ah ! malheureux que je suis ! je n’ai plus qu’à mourir ! Ah ! la plus cruelle de toutes les femmes !… Et que me conseilles-tu, Pippo ? quelle ressource puis-je encore trouver ?
Je vous conseille d’abord de ne pas rester là, car voici son mari qui vient de ce côté.
(Ils retirent dans le fond, du côté de la maison.)
Claudio et Tibia entrent par la grille ; Claudio est en longue robe rouge ; Tibia le suit en portant la queue de sa robe.
Es-tu mon fidèle serviteur, mon valet de chambre dévoué ? Apprends que j’ai à me venger d’un outrage.
Vous, monsieur ?
Moi-même, puisque ces impudentes guitares ne cessent de murmurer sous les fenêtres de ma femme. Mais patience ! tout n’est pas fini.
(Il aperçoit Célio et Pippo dans le fond et va à l’extrême gauche.)
Écoute un peu de ce côté-ci ; voilà du monde qui pourrait nous entendre. Tu m’iras chercher ce soir le spadassin que je t’ai dit.
Pourquoi faire ?
Je crois que Marianne a des amants.
Vous croyez, monsieur ?
Oui, il y a autour de ma maison une odeur d’amants. Personne ne passe naturellement devant ma porte ; il y pleut des guitares et des messages secrets.
Est-ce que vous pouvez empêcher qu’on ne donne des sérénades à votre femme ?
Non ; mais je puis poster un homme derrière la grille et me débarrasser du premier qui entrera.
Fi ! votre femme n’a pas d’amants… C’est comme si vous disiez que j’ai des maîtresses.
Pourquoi n’en aurais-tu pas, Tibia ? Tu es fort laid, mais tu as beaucoup d’esprit.
J’en conviens, j’en conviens.
Regarde, Tibia, tu en conviens toi-même ; il n’en faut plus douter et mon déshonneur est public.
Pourquoi public ?
Je te dis qu’il est public.
Mais, monsieur, votre femme passe pour un dragon de vertu dans toute la ville. Elle ne voit personne, elle ne sort de chez elle une pour aller à la messe.
Laisse-moi faire ; je ne me sens pas de colère. Après tous les cadeaux qu’elle a reçus de moi !… Oui, Tibia, je machine en ce moment une épouvantable trame, et me sens prêt à mourir de douleur.
Oh ! que non !
Quand je te dis quelque chose, tu me ferais plaisir de le croire.
(Ils sortent par le fond, à gauche.)
Célio, seul, rentrant par le fond, à droite.
Malheur à celui qui, au milieu de la jeunesse, s’abandonne à un amour sans espoir !… Malheur à celui qui se livre à une douce rêverie avant de savoir où sa chimère le mène et s’il peut être payé de retour ! Mollement couché dans une barque, il s’éloigne peu à peu de la rive ; il aperçoit au loin des plaines enchantées, de vertes prairies, et le mirage léger de son Eldorado ; les flots l’entraînent en silence, et quand la réalité le réveille, il est aussi loin du but où il aspire que du rivage qu’il a quitté : il ne peut plus ni poursuivre sa route, ni revenir sur ses pas.
(On entend un bruit d’instrument.)
Quelle cette mascarade ? N’est-ce pas Octave que j’aperçois ?
Célio, Octave.
(Octave entre du fond à droite ; il a par-dessus son habit un long domino tout ouvert, un loup sur le visage et une batte d’Arlequin à la main.)
Assez, mes amis, retournez au logis ; assez raclé pour aujourd’hui.
(Descendant la scène et ôtant son loup ; à CÉLIO)
Comment se porte, mon bon monsieur, cette gracieuse mélancolie ?
Octave, ô fou que tu es ! tu as un pied de rouge sur les joues ! D’où te vient cet accoutrement ? N’as-tu pas de honte, en plein jour ?
Ô Célio ! fou que tu es ! tu as un pied de blanc sur les joues ! D’où te vient ce large habit noir ? N’as-tu pas de honte, en plein carnaval ?
J’allais chez toi.
Et moi aussi j’allais chez moi. Comment se porte ma maison ? Il y a huit jours que je ne l’ai vue.
J’ai un service à te demander.
Parle, Célio, mon cher enfant. Veux-tu de l’argent ? je n’en ai plus. Veux-tu mon épée ? voilà batte d’Arlequin. Parle, parle, dispose de moi.
Combien de temps cela durera-t-il ?… Huit jours hors de chez toi !… Tu te tueras OCTAVE
Jamais de ma propre main, mon ami, jamais j’aimerais mieux mourir que d’attenter à mes jours.
Et n’est-ce pas un suicide comme un autre, cette vie que tu mènes ?