Katie et le roi guerrier - S.E. Smith - E-Book

Katie et le roi guerrier E-Book

S.E. Smith

0,0
6,99 €

-100%
Sammeln Sie Punkte in unserem Gutscheinprogramm und kaufen Sie E-Books und Hörbücher mit bis zu 100% Rabatt.
Mehr erfahren.
Beschreibung

Elle est née à la rue ; il est né pour diriger…
Le cheikh Raja Hadi, héritier du royaume de Simdan, a été enlevé par un étranger alors qu’il était enfant. Son enlèvement lui a sauvé la vie. Élevé loin de chez lui, il est forcé de regarder son oncle détruire l’héritage de son père.
Katie Ashe rêve d’aventure. Élevée par une mère sourde, sa vie consiste à garder une longueur d’avance sur les gangs locaux jusqu’à ce qu’un stage de six mois pour enseigner la langue des signes à Jawahir lui offre une chance de voir le monde. Mais ses rêves se transforment en cauchemars quand elle découvre un complot visant à tuer le légendaire sauveur de Simdan.
La fuite de Katie la conduit dans le désert et dans la tente d’un puissant chef rebelle. Se faisant passer pour un garçon muet, elle fait tout ce qu’elle peut pour que personne ne découvre sa véritable identité, tout en cherchant un moyen d’avertir le roi de Simdan.
Un roi, qui est revenu pour revendiquer la place qui lui revient, et une jeune Américaine à l’esprit vif, qui se cache sous les traits d’un garçon, dans un pays lointain peuvent-ils découvrir l’amour avant que les assassins ne finissent ce qu’ils ont commencé ?
Meilleures ventes USA Today et NY Times, l’auteur de renommée internationale S.E. Smith présente une nouvelle histoire avec l’humour et les rebondissements imprévisibles qui la caractérisent ! Des aventures excitantes, des romances torrides et des personnages iconiques lui ont valu de nombreux fans. Plus de DEUX MILLIONS de livres vendus !

Das E-Book können Sie in Legimi-Apps oder einer beliebigen App lesen, die das folgende Format unterstützen:

EPUB
MOBI

Seitenzahl: 337

Bewertungen
0,0
0
0
0
0
0
Mehr Informationen
Mehr Informationen
Legimi prüft nicht, ob Rezensionen von Nutzern stammen, die den betreffenden Titel tatsächlich gekauft oder gelesen/gehört haben. Wir entfernen aber gefälschte Rezensionen.



Katie et le roi guerrier

S.E. SMITH

Remerciements

Je voudrais remercier mon mari Steve de croire en moi et d'être assez fier de moi pour me donner le courage de suivre mes rêves. J'aimerais également remercier tout particulièrement ma sœur et meilleure amie, Linda, qui non seulement m'a encouragée à écrire mais a également lu le manuscrit. Et également mes autres amis qui croient en moi : Jennifer, Jasmin, Maria, Rebecca, Gaelle, Angelique, Charlotte, Rocío, Aileen, Julie, Jackie, Lisa, Sally, Elizabeth (Beth), Laurelle, et Narelle. Les filles qui m'aident à continuer !

Et un merci tout particulier à Paul Heitsch, David Brenin, Samantha Cook, Suzanne Elise Freeman, Laura Sophie, Vincent Fallow, Amandine Vincent, et PJ Ochlan, les voix fantastiques derrière mes livres audios !

—S.E. Smith

Katie et le roi guerrier : Filles des rues, Tome 4

Copyright © 2024 par Susan E. Smith

Publication E-Book en anglais Juin 2023

Publication E-Book en français Juillet 2024

Traduit Par : Charlotte Spender

Relu Par : Gaëlle Darde

Couverture par : Melody Simmons et Montana Publishing

TOUS DROITS RÉSERVÉS :

Cette œuvre littéraire ne peut être reproduite ou transmise sous quelque forme ou par quelque moyen que ce soit, y compris la reproduction électronique ou photographique, en tout ou en partie, sans l'autorisation écrite expresse de l'auteur. Aucune partie de l’œuvre de l'auteur ne pourra être utilisée pour l'entraînement d'une IA sans l'autorisation écrite expresse de l'auteur. Tous les personnages et événements de ce livre sont fictifs ou ont été utilisés de façon fictive, et ne doivent pas être interprétés comme étant réels. Toute ressemblance avec des personnes vivantes ou décédées, des événements réels ou des organisations est strictement fortuite et n'est pas voulue par l'auteur.

Résumé : En se faisant passer pour un garçon muet, Katie sauve la vie du légendaire sauveur de Simdan et découvre bientôt que l’amour complique tout.

ISBN : 9781963823226 (livre de poche)

ISBN : 9781963823219 (eBook)

Romance avec des scènes explicites | Aventure | Contemporain | Amants Internationaux

Publié par Montana Publishing, LLC

& SE Smith de Florida Inc. www.sesmithfl.com

Elle est née à la rue ; il est né pour diriger…

Le cheikh Raja Hadi, héritier du royaume de Simdan, a été enlevé par un étranger alors qu’il était enfant. Son enlèvement lui a sauvé la vie. Élevé loin de chez lui, il est forcé de regarder son oncle détruire l’héritage de son père.

Katie Ashe rêve d’aventure. Élevée par une mère sourde, sa vie consiste à garder une longueur d’avance sur les gangs locaux jusqu’à ce qu’un stage de six mois pour enseigner la langue des signes à Jawahir lui offre une chance de voir le monde. Mais ses rêves se transforment en cauchemars quand elle découvre un complot visant à tuer le légendaire sauveur de Simdan.

La fuite de Katie la conduit dans le désert et dans la tente d’un puissant chef rebelle. Se faisant passer pour un garçon muet, elle fait tout ce qu’elle peut pour que personne ne découvre sa véritable identité, tout en cherchant un moyen d’avertir le roi de Simdan.

Un roi, qui est revenu pour revendiquer la place qui lui revient, et une jeune Américaine à l’esprit vif, qui se cache sous les traits d’un garçon, dans un pays lointain peuvent-ils découvrir l’amour avant que les assassins ne finissent ce qu’ils ont commencé ?

Meilleures ventes USA Today et NY Times, l’auteur de renommée internationale S.E. Smith présente une nouvelle histoire avec l’humour et les rebondissements imprévisibles qui la caractérisent ! Des aventures excitantes, des romances torrides et des personnages iconiques lui ont valu de nombreux fans. Plus de DEUX MILLIONS de livres vendus !

Prologue

Treize auparavant :

— Dis-moi, Raja, ronronna Tasha.

Elle fit glisser ses doigts le long de son bras nu et les passa dans ses cheveux noirs. Elle se pencha plus près, ses lèvres touchant le lobe de l’oreille de Raja.

— S’il te plaît.

Raja Hadi se renfrogna et lança un regard à la belle femme allongée sur les draps défaits. Il était assis au bord du lit et se demandait pour la centième fois pourquoi il n’était pas parti des heures auparavant comme il l’avait prévu. Il se raidit lorsque Tasha tira douloureusement sur les cheveux sur sa nuque.

Il se dégagea de sa prise et se leva.

— Ce sujet n’est pas ouvert à la discussion.

Tasha retomba contre les draps en coton d’un blanc immaculé, une lueur calculatrice brillant brièvement dans ses yeux avant qu’elle ne baisse les cils. Elle fit ressortir sa lèvre inférieure pulpeuse et peinte en rouge dans une moue sensuelle.

Elle avait bien souvent utilisé cette technique sur lui depuis qu’ils avaient commencé à se fréquenter. Six mois plus tôt, il avait trouvé cela attirant, mais plus maintenant. À présent, il la voyait pour ce qu’elle était : une manipulation.

— Il faut que je me douche, annonça-t-il.

— Où est l’urgence ? Je croyais que tu restais pour la nuit, dit-elle, se redressant et reculant contre les oreillers.

Elle attrapa son paquet de cigarettes et Raja laissa son expression exprimer ce qu’il en pensait. La chambre d’hôtel dans laquelle ils se trouvaient était non-fumeur et elle savait qu’il ne voulait pas qu’elle fume en sa présence. L’odeur collait à ses cheveux, à sa peau et à ses vêtements. Ça pouvait être dangereux.

Levant les yeux au ciel en réaction à sa désapprobation, elle jeta le paquet de cigarettes sur la table de chevet sans en prendre. Elle croisa les bras, ce qui fit remonter ses seins de façon séduisante. L’excitation de voir la poitrine nue d’une femme n’était plus tout à fait la même que lorsqu’il avait dévoilé les globes doux et pâles pour la première fois.

— Je pourrais t’accompagner, suggéra-t-elle.

Elle leva son bras fin au-dessus de la tête et repoussa les couvertures du pied pour révéler une grande partie de sa cuisse lisse.

— Pas cette fois, répondit-il sèchement.

Il rassembla ses affaires et entra dans la salle de bain, veillant à verrouiller la porte derrière lui. Après avoir posé son sac de voyage sur le comptoir, il alluma la douche et suspendit une serviette sur le crochet près de la porte.

Son regard s’arrêta sur le verrou et le malaise le gagna.

« Ne fais confiance à personne, Raja.

— Pas même à Idella ? Et toi ? » se rappelait-il avoir demandé.

Les lèvres de Harlem avaient tressailli.

« J’aurais aimé pouvoir te dire que tu peux nous faire confiance, fiston, mais même ça, je ne peux pas le promettre. Si jamais tu bascules du côté obscur… »

Le côté obscur. Il s’était passé beaucoup de choses au cours des dix-sept années de la vie de Raja, mais il n’était toujours pas certain de savoir ce que cela signifiait. Harlem Jones était son père de substitution, mais également son officier traitant, Raja pouvait donc presque comprendre son conseil à propos de Harlem, mais pour Idella ? Il était prêt à remettre sa vie entre les mains de la jeune femme, et il l’avait fait, d’ailleurs.

Pour ce qui était de Tasha, en revanche… Raja contempla son reflet sans le voir. Ce qu’il savait sur elle était accablant — et pourtant, c’était difficile de se défaire de l’espoir qu’elle avait inspiré. Peut-être n’était-ce pas si grave que cela, peut-être avait-elle une bonne explication… mais il ne lui en avait pas parlé. Il savait ce qu’il savait et il était temps que cet espoir meure.

N’écoutant que son instinct, il mit la main dans son sac de voyage et en sortit son plus petit couteau. C’était un Microtech Ultratech OTF. Bien que peu pratique à utiliser au quotidien, Raja en gardait toujours un, car la lame à déploiement frontal en faisait une arme facile à cacher.

Il l’emporta avec lui sous la douche et le posa sur le porte-savon avant de fermer le rideau de douche. L’eau brûlante lui fit du bien.

Tout en se savonnant et en se shampooinant, il pensa à Tasha.

Est-ce que je l’aime ?

Lorsqu’il l’avait rencontrée au café du coin six mois auparavant, il était immédiatement tombé sous son charme. Tasha Rhodes avait des yeux bleus brillants, de superbes cheveux châtains et une silhouette en forme de sablier. Elle avait été à tomber dans une robe rouge courte et moulante, et perchée sur des talons de dix centimètres assortis.

En outre, elle était de treize ans son aînée et avait une grande expérience sensuelle. Elle l’avait envoûté. En moins de quelques heures, ils s’étaient retrouvés à un hôtel du coin, dans des draps défaits. Tasha lui avait montré non seulement comment satisfaire une femme, mais aussi comment prendre son propre plaisir.

Il se pencha en avant et posa les mains contre les parois en fibre de verre de la douche. La voix de Harlem lui martelait le crâne. Ses poings se serrèrent tandis qu’il se rappelait la dispute qu’ils avaient eue seulement quelques heures plus tôt.

« Elle n’est pas celle que tu crois, Raja.

— Reste en dehors de ma vie. Tu n’avais pas le droit de m’espionner ! Je l’aime ! »

L’expression de Harlem était devenue un masque impassible. Raja détestait quand il faisait cela. Son mentor maîtrisait si bien ses émotions qu’il arrivait parfois à Raja de se demander s’il en ressentait.

Harlem était un assassin et il avait élevé Raja pour qu’il soit une réplique de lui-même. L’homme noir, imposant et d’une beauté saisissante, l’avait trouvé dans les rues de Simdan alors qu’il n’avait que douze ans et qu’il n’était plus qu’à peine vivant.

Raja rouvrit les yeux et baissa le regard vers ses mains. Même s’il ne le voyait pas, il avait du sang dessus.

Idella l’avait prévenu qu’il perdrait un petit bout de son âme chaque fois qu’il tuerait. Ils s’étaient juré, par un serment de sang, de conserver une petite parcelle de leurs âmes l’un pour l’autre afin de ne pas s’égarer. Il craignait que Harlem ne connaisse de repos tant que ce ne serait pas le cas.

« Tu ne sais pas ce que c’est que l’amour, avait asséné Harlem d’un ton posé. Tu ressens du désir pour elle, Raja. Elle a été entraînée pour susciter ce genre de sentiments chez toi. Elle se sert de toi, fiston. Quand elle en aura fini, elle fera exactement ce qu’on lui a ordonné de faire. »

Raja avait fusillé son mentor du regard. Une rage aveuglante s’était frayé un chemin de feu en lui. Pourquoi Harlem devait-il détruire tout ce qui était agréable ? Pourquoi devait-il contrôler le moindre aspect de la vie de tout le monde ? Voilà pourquoi il avait essayé de garder secrète sa relation avec Tasha. Il savait que Harlem essaierait de la détruire.

« Qu’est-ce que tu crois qu’elle va faire ? » avait-il exigé de savoir tout en connaissant déjà la réponse.

Harlem avait levé une main pour la poser sur l’épaule de Raja, mais s’était contenté de la laisser retomber. À sa grande surprise, Raja avec lu du regret dans ses yeux. L’homme plus âgé ne montrait que très rarement des regrets — dans aucune circonstance.

« Elle obtiendra les informations qu’elle a eu l’ordre de récupérer, puis elle t’éliminera… et moi et peut-être Idella. Et peut-être d’autres encore, selon la quantité d’informations qu’elle arrivera à avoir. »

Raja avait secoué la tête, mais au fond de lui, il avait soupçonné Harlem de parler en connaissance de cause. Cependant, cela ne rendait pas plus facile le fait de prendre en considération ce qu’il disait.

« Tu te trompes, avait-il dit d’une voix étranglée. Tasha n’est pas comme ça. Elle m’aime.

— Je croyais t’avoir mieux entraîné que ça, Raja. Fais des recherches. Tu aurais dû les faire il y a six mois quand elle t’a abordé pour la première fois. »

Il était resté figé dans l’entrée et avait regardé Harlem tourner les talons et partir. Alors qu’il inspirait profondément pour tenter d’apaiser la colère qui l’habitait, un mouvement dans l’escalier avait attiré son attention.

Idella, mince et grande pour une fille de quatorze ans, s’était levée de la marche sur laquelle elle avait été assise. Elle avait descendu l’escalier, ses yeux emplis de compassion plantés dans les siens tandis qu’elle lui tendait un dossier. Ses yeux avaient brillé de larmes, mais elle les avait retenues.

« Ne…

— Il le fallait, Raja. On s’est promis de toujours veiller sur l’autre. Je… Tu es tout pour moi. S’il te plaît, lis ça avant de la revoir… pour moi. »

Elle lui avait fourré le dossier dans les mains et avait remonté l’escalier.

Il avait lu son contenu.

Celeste Romanoff, alias Tasha Rhodes, membre du FSB ; le service des renseignements extérieurs de la Fédération de Russie.

Objectif : Harlem Jones — assassin présumé d’Abbas Mohammadi, marchand d’armes iranien, le cinquième marchand d’armes travaillant avec le Kremlin à avoir été assassiné au cours des deux dernières années.

La liste d’informations avait continué, chaque détail lui retournant un peu plus l’estomac. Ce qui l’avait le plus frappé, c’était les photos de lui avant que Tasha — Celeste — et lui ne se rencontrent. L’horodatage indiquait qu’elles avaient été prises près de dix mois plus tôt et le montraient devant la maison, en train de jouer au basket, de faire de la moto et bien plus. Il y avait eu une photo d’Idella entourée d’un cercle rouge.

Garantie potentielle pour obtenir les informations.

Ce n’était pas Harlem qui avait tué Mohammadi, du moins, pas directement. Raja et Idella l’avaient éliminé dans un marché à Téhéran treize mois auparavant. Cet homme était responsable de la mort d’un nombre incalculable de civils, dont quatorze enfants. Leur bus scolaire avait été piégé afin qu’il explose.

La tête de Raja se releva brusquement lorsqu’il entendit le bruit distinctif du verrou. Il aurait pu le manquer s’il ne s’était pas attendu à l’entendre. Jurant silencieusement, il empoigna le couteau et s’accroupit dans la baignoire.

Quelques secondes plus tard, le rideau de douche fut ouvert d’un coup sec. Raja bondit, son épaule passant sous le bras tendu de Tasha. Le couteau serré dans sa main gauche, il l’attrapa. Elle hurla, surprise par sa contre-attaque. Il saisit son poignet quand elle tenta de compenser sa posture défensive, mais il força son bras à se lever, pointant son pistolet vers le plafond.

Le carrelage au-dessus de sa tête vola en éclats et retomba dans la baignoire au moment où l’arme tira. Par chance, le silencieux qu’elle avait ajouté épargna leur ouïe. Entre le silencieux et l’eau de la douche, les bruits de leur affrontement étaient étouffés.

Ils se battirent pour le couteau et le pistolet, la respiration lourde. Il attaqua Tasha, lui laissant une fine mais longue et profonde entaille en travers du ventre. Elle tenta de se libérer, mais il raffermit encore sa prise sur sa main armée. Elle leva son autre main pour lui griffer le visage et il lâcha son couteau pour parer son attaque. La lame rebondit et glissa au fond de la baignoire.

Il remarqua sombrement que Tasha avait commis l’erreur d’être entièrement vêtue pour l’attaquer. Cette erreur allait peut-être sauver la vie de Raja. Il agrippait du tissu, pas de la chair glissante. Elle portait une tenue semblable à celles qu’Idella et lui mettaient lors de leurs missions : une chemise à manches longues, un pantalon et des chaussures noirs — permettant de masquer toute éclaboussure de sang.

Il tira sur sa main et l’entraîna sous lui dans la baignoire. Une autre balle toucha la paroi en fibre de verre derrière sa tête, découpant un trou propre dans la surface lisse, tandis qu’ils se battaient pour prendre l’avantage.

Serrant les dents, Raja leva le bras de Tasha et tapa sa main contre le bord de la baignoire. Le pistolet tomba sur le sol et glissa sous le meuble-lavabo.

Tasha tenta de lui mettre un coup de genou à l’entrejambe. Pendant qu’il essayait de faire tomber son pistolet de sa main, elle avait trouvé son couteau, qui s’était rapproché de la bonde. Elle tenta maladroitement de planter la lame affûtée dans ses côtes, mais la force de Raja et sa prise sur ses vêtements trempés lui permirent de parer le coup. Dans ce minuscule espace, ils ne cessaient de se cogner contre les parois.

Les pieds de Raja glissèrent, il se retourna et le rideau de douche s’emmêla autour de leurs jambes mouillées. Ils finirent inévitablement par basculer par-dessus le bord de la baignoire et s’étaler dans l’espace étroit entre les toilettes et le meuble-lavabo. La barre de douche et le rideau ne firent qu’ajouter à la confusion.

Il perdit le couteau dans le rideau de douche… mais elle aussi. Après s’être tortillée sous lui, Tasha parvint à se libérer. Elle fit une roulade et lui asséna un coup de pied, le talon de sa bottine noire le touchant à l’entrejambe. Il grogna alors que la douleur explosait en lui et qu’il résistait au besoin de se rouler en boule pour se protéger. À la place, il empoigna sa cheville au moment où elle ouvrit la porte de la salle de bain à la volée.

Elle tomba contre le mur en face de la porte. Se hissant sur ses pieds, il récupéra le couteau et le pistolet, et vit qu’elle n’était plus contre le mur.

— Tu es un garçon intelligent, Raja, lança-t-elle. Quel dommage que je doive te tuer !

Raja pencha la tête et tendit l’oreille. La chambre d’hôtel comprenait un lit king size, deux tables de chevet, un fauteuil dans un coin, un bureau et sa chaise, et une longue commode surmontée d’une télévision.

Les sorties étaient au nombre de deux : la porte principale et la porte qui donnait sur une chambre adjacente à la leur. Il savait qu’elle était inoccupée parce qu’il l’avait louée avant de rencontrer Tasha.

— Pourquoi tu fais ça, Tasha, où devrais-je t’appeler Celeste ? demanda-t-il, connaissant déjà la réponse mais ayant besoin de l’entendre le dire.

— Où est Harlem Jones ? exigea-t-elle de savoir.

— Qu’est-ce que tu veux à Harlem ?

Il posa le couteau sur le meuble-lavabo, prit son pantalon à une main et l’enfila, passant le pistolet d’une main à l’autre jusqu’à ce que le jean atteigne ses hanches. Il remonta la fermeture Éclair assez haut pour qu’il ne tombe pas et reprit le couteau.

— Pourquoi tu ne me donnes pas les informations que je veux, Raja ? On partage quelque chose de bien. Tu es l’un des meilleurs amants que j’ai jamais eus. Pourquoi y mettre fin maintenant ?

— Peut-être parce que tu viens d’essayer de me tuer ! rugit-il avant de se mordre la lèvre inférieure et de se maudire pour sa réponse dictée par l’émotion.

— Tu ne devrais pas le prendre personnellement, susurra-t-elle. Sors de la salle de bain pour qu’on puisse en parler. J’ai peut-être été trop… hâtive. Je veux juste parler, Raja. Je t’aime, chéri.

— Très bien, je sors.

Il éteignit la lumière de la salle de bain et en sortit dans une roulade, le pistolet qu’elle avait perdu dans la bataille pointé dans la direction de la voix de Tasha.

Le bois et le plâtre explosèrent au-dessus de la tête de Raja. Il n’avait qu’une fraction de seconde pour tirer avant qu’elle ne s’aperçoive qu’il était bien plus bas que ce qu’elle croyait.

Son premier coup de feu la toucha à l’épaule. Le second à la poitrine. Elle tomba sur le fauteuil dans le coin avec une expression stupéfaite. Le pistolet qu’elle tenait bascula de ses doigts avant de tomber sur le sol recouvert de moquette avec un bruit sourd.

Il se redressa de toute sa hauteur, son arme toujours pointée sur elle. Contournant le lit, il donna un coup de pied dans le pistolet de Tasha pour l’éloigner d’elle avant de se baisser et de plaquer deux doigts dans son cou. Il savait déjà qu’elle était morte, mais il avait besoin de s’en assurer.

Il éloigna sa main et sortit son téléphone de la poche avant de son pantalon. Quelques secondes plus tard, la voix grave de Harlem se fit entendre. Il déglutit alors qu’il essayait de parler.

— J’ai besoin d’un nettoyage, finit-il par dire du bout des lèvres.

— Quinze minutes, répondit Harlem avant de raccrocher.

Raja baissa son téléphone. C’était tout ce qui devait être dit.

Il se força à réagir et fit appel aux compétences qu’on lui avait inculquées depuis ses douze ans. Il s’habilla, fit son sac, fit disparaître toute empreinte de la pièce et fouilla les affaires de Tasha à la recherche de choses utiles ou incriminantes. Une fois qu’il eut fini, il sortit de la chambre par la porte communicante.

L’équipe de nettoyage enlèverait et se débarrasserait du corps de Tasha, nettoierait la pièce, réparerait les dégâts et serait partie avant la fin de la nuit. Raja ferma doucement la porte et se dirigea vers l’escalier. Il sortit du bâtiment quelques secondes avant que l’équipe de nettoyage n’y entre.

Après avoir déambulé sans but à travers les rues de New York City, il se retrouva dans le parc qui bordait le fleuve Hudson. Il s’approcha du bord de l’eau et s’appuya contre la rambarde. Il prit le pistolet de Tasha à sa ceinture et l’examina.

L’avait-il aimée ?

Non. Il doutait sérieusement d’être capable d’aimer sincèrement un autre être humain. Ce que son oncle n’avait pas détruit quand il avait assassiné les parents et les frères et sœurs de Raja, Harlem et Tasha s’en étaient occupés.

Même avec Idella, il ne se dévoilait pas entièrement. Aimer quelqu’un signifiait être trahi par cette personne ou la regarder mourir.

— Tu ne comptes pas t’en servir, j’espère, dit une jeune femme derrière lui.

Il fit volte-face, l’arme levée, mais ne rencontra que des ombres. Il fouilla les ténèbres du regard jusqu’à distinguer la fille. Un foulard couvrait la moitié basse de son visage. Il la reconnut immédiatement et baissa son arme.

— Qu’est-ce que tu fais là, Midnight ? demanda-t-il.

Celle-ci haussa les épaules.

— J’arrivais pas à dormir. J’aime la nuit.

Raja se détourna.

— C’est Harlem qui t’envoie ?

Il démonta le pistolet aussi vite qu’il le put et lança les morceaux dans le fleuve.

— Non… c’est Idella. Elle s’inquiète pour toi, répondit Midnight.

— Tu peux lui dire que je vais bien, répliqua-t-il sèchement.

— T’as qu’à lui dire toi-même.

Raja se retourna pour dire à Midnight d’aller se faire voir, mais il vit qu’elle avait déjà disparu et qu’Idella se tenait à sa place. Il déglutit. Un frisson le parcourut et il inspira profondément, tentant de contrôler les émotions qui faisaient rage en lui.

Idella ne dit rien. Elle se contenta de s’avancer vers lui et de le prendre dans ses bras. Quelques secondes passèrent avant qu’il ne lui rende son étreinte. Un sanglot remonta dans la gorge de Raja et il resserra ses bras autour du corps fin de son amie.

— Je suis là pour toi, chuchota-t-elle.

— Je sais. Je sais, répondit-il dans un murmure.

Plus jamais, jura-t-il silencieusement. Je ne m’ouvrirai plus jamais à personne d’autre.

ChapitreUn

Dima, Simdan,

Dans le présent :

— Le palais est libre, Raja. Les dernières forces de ton oncle se sont rendues, dit Hussain.

Raja le remercia d’un signe de tête. Inspirant profondément, il reporta son attention sur la vue qui s’offrait à lui. La gravité de la situation le frappa de plein fouet.

Il n’était plus simplement Raja Hadi, un orphelin, un garçon sans domicile fixe, un assassin, un chef rebelle. Il était Raja Hadi, le légendaire roi de Simdan, l’héritier légitime du trône et le sauveur de Simdan.

Il refoula sa fatigue et considéra avec regret les dommages causés au palais et les hommes tombés au combat. Les bâtiments pouvaient être réparés, les vies détruites non. Son oncle, le cheikh Zulfirquar Kaffir, devait répondre de beaucoup de choses, dont l’assassinat de la famille de Raja.

— On a perdu combien d’hommes ? demanda-t-il.

— Quatorze. Vingt-six autres ont été blessées, mais ils se rétabliront, répondit Hussain.

Raja acquiesça d’un signe de tête.

— Je veux une liste de leurs noms. Ajoute les noms des membres de leurs familles encore en vie. Organise le nettoyage de ce merdier. Je veux que la ville soit débarrassée de tout ce qui est lié à mon oncle. Préviens les généraux que je veux les voir avant demain matin. Il est temps de rendre à Simdan la gloire qu’il mérite.

— Je veillerai à ce que ce soit fait. Dois-je demander au médecin de s’occuper de toi en premier ? s’enquit Hussain.

Raja lança un regard à sa manche ensanglantée et secoua la tête.

— Non, je peux m’en occuper. Le médecin doit se focaliser sur les blessés.

Hussain inclina la tête et quitta le toit du palais par une porte étroite. Raja continua à se forcer à contempler l’état de Simdan, dévasté par la guerre. Au-delà du mur surmonté de barbelés, de la fumée s’élevait des nombreux incendies allumés par les troupes en fuite de son oncle. Ceux qui le soutenaient ne voulaient laisser que la destruction dans leur sillage.

Comme si mon oncle ne l’avait pas déjà fait pendant son règne.

L’armée de son oncle avait plus été vaincue de l’intérieur que de l’extérieur. Le pays avait été dévasté par la mainmise de Kaffir, et la nouvelle du retour du véritable roi avait envoyé une vague d’espoir à travers Simdan.

Les habitants s’étaient retournés contre les rares personnes encore loyales à son oncle. Poussé par le désespoir, Kaffir avait ordonné la destruction de villages entiers qui s’étaient rebellés contre lui… mais il avait découvert ceux-ci déserts et piégés.

Lorsqu’on leur avait donné l’occasion de se libérer de la tyrannie, le plus gros des troupes de Kaffir s’était rendu et avait juré fidélité à Raja. Il sourit avec détermination et fierté. Le peuple l’avait accepté. L’armée le suivait à présent. Il était temps de reconstruire.

* * *

Deux semaines plus tard, Raja regardait par les fenêtres de son bureau. Des bruits de construction résonnaient partout autour de lui.

Son téléphone vibra. Il aurait préféré l’ignorer, mais il savait que s’il le faisait, son premier dignitaire étranger ne lui laisserait plus un instant de répit. Non, c’était plus prudent de répondre à l’appel quotidien.

— Quels sont les dégâts aujourd’hui ? demanda la voix très familière et rauque.

Raja lâcha un petit rire et se carra dans son siège.

— Les mêmes qu’hier et qu’avant-hier, et qu’avant-avant-hier.

— Je veux une clinique à mon nom… oh, et une école. Disons deux écoles, parce que j’en veux une pour les arts, dit Idella.

Raja sourit. Grâce à ses contacts et à ceux d’Idella, des contributions financières, du matériel, et des fournitures indispensables affluaient à Simdan. Grâce à Bugs, la geek innovatrice qui les avait aidés à de nombreuses reprises, son oncle et ses sbires avaient échoué à faire sortir clandestinement des milliards de dollars du pays. Tout lui avait été rendu… avec les intérêts.

— Je donnerai ton nom et celui de Tarek à une demi-douzaine d’écoles, promit-il.

— N’oublie pas l’hôpital.

— Je croyais que c’était une clinique, dit-il en riant.

— Tu connais Tarek. Ses frères et lui voient grand.

— Oui, je n’ai pas oublié, répondit-il sèchement.

— Comment tu vas ? Comment va ton bras ?

Il secoua la tête.

— Je croyais que tu avais arrêté de te mêler des affaires de tout le monde, dit-il en se détournant de la fenêtre.

— De tout le monde, oui. Des tiennes, jamais, répondit-elle doucement.

Il leva le bras et le fit bouger. Il sentait encore un très léger inconfort. La balle avait traversé. Heureusement pour lui, ç’avait été un petit calibre.

— Mon bras va bien. J’ai connu pire. Tu m’aurais tapé sur la tête pour avoir pleuré quand on m’a recousu, plaisanta-t-il.

— J’aurais pris une photo ! Tu as… pleuré ? Oh, j’ai manqué une belle occasion d’avoir de quoi te faire chanter, rétorqua-t-elle avec un regret mielleux.

— Comment va Tarek ? Je suppose qu’il est toujours en vie ?

— Il va bien. Il est encore plus protecteur maintenant que je suis enceinte, fit-elle avec un faux soupir.

Sous le choc, Raja se raidit.

— Tu es… enceinte ? Comment ? Quand ?

Le rire ravi d’Idella se réverbéra en lui. Il n’avait jamais imaginé son amie… eh bien, il ne l’avait jamais imaginée en mère. Elle avait toujours plus été l’image d’une sœur mortellement dangereuse dans sa vie.

— Oui, je suis enceinte et si je dois t’expliquer comment c’est arrivé, ça va devenir légèrement gênant. Pour ce qui est du quand, j’en suis à quatre mois. Je voulais attendre d’être sûre que tout allait bien avant d’en parler. Ça devient de plus en plus difficile de le cacher, ajouta-t-elle sur une note plus douce.

— Je viendrai te voir dès que ce sera sans danger, promit-il.

Un silence tomba avant qu’elle ne réponde.

— Tu me manques, Raja. Je suis aussi super fière de toi, dit-elle, la voix émue.

— Tu n’es pas en train de te ramollir, j’espère ? la taquina-t-il.

Elle renifla.

— Fichues hormones. Non. J’imagine qu’il va falloir que je tue quelqu’un pour le prouver.

— Plus maintenant, habun.

— Je t’appelle demain. J’envisage d’ajouter un musée à ma liste. Je t’aime, répondit-elle d’un ton plus assuré.

Raja secoua la tête et raccrocha. Il s’enfonça encore plus dans son siège.

Idella allait être mère. Son rire grave attira l’attention d’ouvriers qui travaillaient non loin et qui sourirent. Ce qui l’avait encore plus ébranlé, c’était ses deux derniers mots… « Je t’aime ».

Son sourire s’évanouit tandis qu’il regardait par la fenêtre d’un regard absent. Des souvenirs sombres d’une autre femme qui lui avait dit ces mots lui revinrent à l’esprit. Il inspira profondément, chassa ces souvenirs, et attribua les mots inattendus d’Idella à sa grossesse.

Raja releva la tête lorsqu’il remarqua qu’un ingénieur britannique d’âge moyen qu’il avait engagé parlait à un ouvrier. Secouant la tête, il prit le plan de la ville roulé sur son bureau et se leva.

— Alfred ! Il faut qu’on trouve la place pour un musée, lança-t-il.

* * *

Jawahir, pays voisin de Simdan :

Avec les bruits de l’agitation de la ville, Katie Ashe aurait pu se croire chez elle… sauf qu’il faisait plus chaud… qu’il y avait plus de sable… et que les tenues des gens mêlaient vêtements modernes et vêtements traditionnels, plus adaptés à ce climat aride. Ce n’était pas difficile de distinguer les locaux des touristes.

Ces six derniers mois, elle avait eu l’impression de vivre un conte de fées, et elle savait qu’être à Jawahir allait lui manquer. Elle avait déjà prévu de chercher d’autres postes qui lui permettraient de voyager. À présent qu’elle avait goûté à la liberté loin de Los Angeles, elle en voulait plus.

— Veuillez préparer vos cartes d’embarquement. Gardez tous vos effets personnels sur vous à tout moment et signalez tout objet ou activité suspects aux agents de sécurité les plus proches. Bon voyage, annonça une voix féminine à travers les haut-parleurs.

Katie redressa la bretelle de son sac à dos qui avait glissé de son épaule. La queue avança lentement avant de s’arrêter. Elle ouvrit sa besace et vérifia encore une fois qu’elle avait son passeport, puis sortit sa carte d’embarquement.

Elle prenait le bus pour se rendre à Simdan par les routes montagnardes. Jalila, une amie proche qu’elle avait rencontrée ici, vivait à Dima, la capitale. Le voyage pour s’y rendre serait long et nécessiterait qu’elle change de bus en chemin.

Son ventre se contracta d’enthousiasme tandis qu’elle tendait sa carte d’embarquement au chauffeur et qu’elle se frayait un chemin vers le milieu du bus. Elle rangea son sac à dos au motif floral coloré dans le compartiment à bagages au-dessus de son siège et prit place côté fenêtre, soulagée d’être arrivée tôt. À en juger par la longue queue qui commençait à se former, le bus allait être plein à craquer.

Elle serra sa besace contre sa poitrine, heureuse de pouvoir observer les gens. La vie à Jawahir n’avait rien à voir avec sa vie à Los Angeles. Chez elle, les gens pensaient que vivre dans un pays étranger était effrayant, mais elle-même avait toujours eu peur dans son propre quartier !

Une femme qui portait un bébé et tirait une petite fille derrière elle s’assit un peu plus à l’avant du bus. La fillette se retourna et observa Katie de ses yeux curieux entre les deux sièges.

Katie sourit et la salua en langue des signes. La petite fille gloussa et disparut derrière le siège. Un passager s’installa sur l’un des sièges entre la fillette et elle, bloquant ainsi toute visibilité entre elles pour le reste du voyage.

Katie soupira. Jouer avec la fillette aurait rendu son voyage plus agréable.

Une autre passagère se dirigea vers le fond du bus et jeta un coup d’œil amusé à Katie en passant et cette dernière se sentit soudain gênée par sa dégaine de touriste. Sa peau pâle et ses traits ne dénotaient pas forcément au milieu de l’immense variété d’apparences des personnes natives de la région, mais ses vêtements…

Jalila se moquerait d’elle si elle la voyait. Actuellement, son amie était en pleine phase steampunk victorienne. Ses cheveux arboraient des mèches bleues, roses et lavande, et elle portait de longues jupes fluides, des chemisiers en coton amples et des corsets ajustés.

Pour Katie, c’était beaucoup trop. Ses longs cheveux noirs étaient coiffés en deux tresses ce jour-là. Son chapeau de paille à larges bords tombants était recouvert de pin’s des différentes villes qu’elle avait visitées. Les montures de ses lunettes de soleil étaient ornées de petits strass. Son chemisier blanc et son jean délavé étaient simples.

Comparé à celle de Jalila, son apparence était passe-partout, mais elle sa tenue différait tout de même des thobes fluides que la plupart des passagers portaient.

La queue était presque terminée à présent. Un garçon efflanqué traversa l’allée et ralentit. Elle leva les yeux et sourit.

Le garçon trébucha et regarda derrière lui avant de se précipiter vers le fond du bus. Un homme à l’épaisse barbe noire et d’une humeur massacrante s’assit à côté d’elle.

Elle se pressa subtilement le plus possible contre la vitre. Il agrippa le siège devant eux.

L’anneau épais qu’il portait à la main droite attira son attention. La gravure des armoiries d’une famille ou d’une organisation en ornait le chaton.

Les compagnons de l’homme s’assirent sur les sièges devant Katie. Le visage de l’un deux était barré d’une longue cicatrice irrégulière, qui allait du coin de son œil jusqu’à sa bouche. Le visage de l’autre était couvert. Sa respiration sifflante lui évoqua celle du vieil Henry, un ami de longue date et le propriétaire de la salle de boxe qui se trouvait sous l’appartement dans lequel sa mère et elle vivaient. Henry souffrait de BPCO et d’emphysème à cause d’années de tabagisme. Contrairement à lui, l’homme ici était assez gros et sa façon de se déplacer dénotait une certaine sédentarité.

L’homme à la cicatrice regarda dans la direction de Katie. Celle-ci se tassa sur son siège, baissa son chapeau et tenta de se faire le plus petit possible. Elle se tourna vers la vitre, essayant de faire abstraction des odeurs corporelles âcres des hommes. Ça sentait aussi mauvais qu’à la salle après un entraînement des gars.

Elle grogna intérieurement. Le voyage jusqu’à Yasir durerait plus de vingt-quatre heures. Elle serra plus fort sa besace tandis que le bus s’éloignait de la gare routière.

Après dix-huit heures de trajet, Katie conclut que se rendre à Dima en bus était la pire idée du siècle. La nuit était tombée alors qu’ils traversaient la frontière avec Simdan. Elle était épuisée, affamée, assoiffée, et il fallait qu’elle aille aux toilettes. Le seul point positif, c’était que son odorat s’était habitué à l’odeur des hommes et qu’elle n’avait plus à refouler des haut-le-cœur.

Les hommes autour d’elle parlaient à voix basse. Elle ne parlait pas couramment arabe, mais elle aurait pu comprendre la majeure partie de ce qu’ils disaient si elle était moins fatiguée et plus disposée à se concentrer. Jalila avait été une aide merveilleuse dans sa compréhension de la langue et la façon de la traduire en langue des signes.

Le mot « tuer » attira brusquement son attention et un sentiment de danger l’envahit.

— On tuera le faux roi la veille de l’Aïd, disait l’homme à la cicatrice.

— Hadi est dans le désert. On le tuera là-bas, ajouta l’homme à côté d’elle.

— Le sauveur de Simdan ne deviendra pas plus que ce qu’il est maintenant.

La déclaration sifflante du dernier homme provoqua une onde de choc chez Katie. Le sauveur de Simdan, l’homme dont Jalila était profondément éprise et qu’elle vénérait comme un héros. Ils prévoyaient d’assassiner le nouveau roi de Simdan.

Katie déglutit et tenta de calmer les battements frénétiques de son cœur. Des bribes de la conversation des hommes commencèrent à remonter des profondeurs de ses souvenirs et prirent alors tout leur sens.

Ils s’étaient réfugiés à Jawahir avant la fin de la guerre. Ils avaient parlé d’un homme nommé Kaffir. Jalila lui avait également parlé d’un homme qui portait ce nom, en l’associant à quelques adjectifs dégoûtants.

Kaffir avait disparu dans les derniers jours de la guerre civile de Simdan en essayant d’emporter des milliards de dollars, mais le nouveau roi, le cheikh Hadi, avait arrêté le transfert d’argent avant que Kaffir ne puisse s’enfuir avec. Ces hommes retournaient en douce dans le pays dans l’intention de tuer Hadi et de restaurer le pouvoir de Kaffir.

Katie ne connaissait pas grand-chose à la politique de Simdan, seulement ce que Jalila lui avait raconté. La plupart des histoires avaient semblé romantiques, des contes dignes des Mille et Une Nuits. L’héritier du trône depuis longtemps disparu était revenu et avait vaincu son oncle malveillant. Le récit était déjà une légende.

Une explosion sous elle la fit sursauter. Le bus fit une embardée sur l’étroite route. Des articles de journaux sur des accidents de bus lui traversèrent l’esprit alors qu’elle regardait par la vitre avec horreur. Elle songea ensuite que si tout le monde mourait, au moins les méchants ne pourraient pas tuer le prince charmant de Jalila.

Plusieurs minutes plus tard, le chauffeur arrêta enfin le bus au milieu de la route. Des enfants pleuraient et de nombreux grognements, gémissements, et discussions agitées se faisaient entendre tandis que les gens commençaient à rassembler leurs affaires et à descendre du bus. Les trois hommes dangereux ne bougèrent pas.

— Je… euh, il faut que je… excusez-moi, s’il vous plaît, balbutia-t-elle en anglais en regardant son voisin.

Il grogna et se leva. Elle passa devant lui en serrant sa besace contre elle, offrant un sourire nerveux aux deux hommes assis sur le siège de devant.

Elle se dépêcha de traverser l’allée, descendit les marches d’un pas mal assuré et faillit tomber dans sa hâte de sortir du bus. Dehors, plusieurs personnes s’affairaient tandis que d’autres commençaient à suivre la route.

Katie regarda autour d’elle, indécise. Le chauffeur du bus marmonnait dans sa barbe et donnait des coups de pied dans le pneu crevé. Elle décida que la meilleure chose à faire, c’était de soulager sa vessie douloureuse, puis de demander au chauffeur ce qu’il fallait faire.

Après un nouveau coup d’œil autour d’elle, elle remarqua un amas de rochers derrière le bus, en haut d’une petite colline. Elle s’y précipita, contente que la lumière de la lune soit suffisante pour qu’elle y voie, mais pas assez pour que tout le monde assiste à ce qu’elle s’apprêtait à faire.

Un long soupir soulagé lui échappa à l’instant où elle put enfin se soulager. Elle se lava les mains avec des lingettes prises dans sa besace. Alors qu’elle s’apprêtait à redescendre vers le bus, elle entendit une détonation caractéristique.

Son cœur cessa de battre un instant. Elle connaissait ce bruit ; il n’était que trop fréquent chez elle.

Elle s’accroupit et jeta un coup d’œil vers la route. Deux des hommes faisaient rouler le corps du chauffeur du bus vers le bord de la falaise pour le précipiter dans le vide. Un rapide coup d’œil lui assura que tous ceux qui étaient restés en arrière, avant qu’elle n’aille au petit coin, avaient depuis rejoint les autres passagers qui s’étaient mis en marche pour rejoindre Yasir.

Le troisième homme sortit de derrière le bus et observa les alentours avec insistance. Elle se plaqua contre les rochers, espérant se fondre dans son environnement. Leurs voix, bien que basses, lui parvinrent.

— Iblis ! Tu veux attirer l’attention sur nous ? gronda l’homme à la voix sifflante.

— Je comptais l’étrangler, mais il se débattait trop, répondit le voisin de siège de Katie. Il savait qui on était et commençait à paniquer, il voulait plus d’argent pour garder le secret. Il aurait pu prévenir les autorités qu’il nous avait vus. Personne ne viendra ici de sitôt. Et quand ils viendront, ils penseront qu’il a été tué par des voleurs.