Mortelle Bigoudène - Annie Le Coz - E-Book

Mortelle Bigoudène E-Book

Annie Le Coz

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Beschreibung

En plein semi-marathon entre La Torche et Pont-L'Abbé, un paysagiste trouve la mort !

« Le jour de ta dernière course approche. »
Phrase prémonitoire ? Possible…
« Le semi-marathon bigouden fait une victime » titre Le Télégramme.
« La Torche-Pont-L'Abbé : un mort » annonce Ouest-France.
Un dicton populaire dit que la vengeance est un plat qui se mange froid. Et en ce jour de semi-marathon entre La Torche et Pont-L'Abbé, c'est un paysagiste reconnu qui va en faire les frais… définitifs.
Sa femme qui ne croit pas à un décès accidentel, porte plainte contre X. L'enquête est ouverte…

Suivez le capitaine Paoli entre La Torche et Pont-L'Abbé, dans le 6e tome de ses enquêtes au rythme haletant !

À PROPOS DE L'AUTEURE

Après avoir exposé son héros, le capitaine Paoli, à de dangereuses pérégrinations dans les rues de Quimper, en compagnie des "cloches", puis au Cap Caval où il a été soupçonné d’enlèvement, Annie Le Coz lui propose cette fois, après un détour sur les contreforts des Montagnes Noires, de retrouver le Pay sBigouden comme terrain d’investigation.

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Couverture

Page de titre

Cet ouvrage de pure fiction n’a d’autre ambition que de distraire le lecteur. Les événements relatés ainsi que les propos, les sentiments et les comportements des divers protagonistes n’ont aucun lien, ni de près ni de loin, avec la réalité et ont été imaginés de toutes pièces pour les besoins de l’intrigue. Toute ressemblance avec des personnes ou des situations existant ou ayant existé serait pure coïncidence.

REMERCIEMENTS

Cette histoire a vu le jour grâce à une idée que m’a suggérée Charles.

Comme je devais trouver le lieu du geste fatidique, je me suis rendue sur le parcours de la course La Torche-Pont-L’Abbé en compagnie de Fabrice, lui-même participant du semi-marathon.

Merci aussi à Jean-Marc C. pour les précieux renseignements qu’il m’a fournis.

Enfin, je tiens à remercier Fred pour sa disponibilité et ses remarques aussi judicieuses que judiciaires.

I

Dimanche 1er octobre 2006.

Dix ans déjà, cette année, que l’on courait entre La Torche et Pont-L’Abbé, et 2150 invités avaient répondu présent : 1300 sur le 10 kilomètres et 850 sur le semi-marathon. Parmi eux, Jean-Claude Mushingantahe, Nathalie Vasseur, Armel Roussel et Sybille Phelippeau qui seraient les quatre grands vainqueurs du jour.

Le premier sur le semi, pour la quatrième fois d’affilée, en 1 heure 9 minutes et 13 secondes ; la deuxième en tant que première femme de cette même distance en 1 heure 20 minutes et 5 secondes ; le troisième, vainqueur du 10 kilomètres en 30 minutes et 9 secondes et la quatrième, première des 10 kilomètres en 37 minutes et 28 secondes.

Dans cette épreuve sportive également ouverte aux compétiteurs handicapés, le vainqueur des 21,100 kilomètres handibike fut Sébastien Denis en 42 minutes et 31 secondes et dans la catégorie fauteuil, sur la même distance, ce fut Jean-Lou Abiven en 56 minutes et 30 secondes*.

*

Son tour de sortir du fourgon attribué aux handicapés arriva. On roula son fauteuil jusqu’à la plateforme électrique. Quelques secondes plus tard, la plateforme toucha le sol et Do, poussant ses roues, s’éloigna du véhicule.

Do parvint à se mettre à l’écart afin de vérifier son matériel.

— Parfait, ça n’a pas bougé.

Les coureurs arrivaient en navette, avec leur sac de sport. Dès qu’ils avaient posé pied à terre, ils entraient dans le hangar mis à leur disposition pour servir de vestiaire et troquaient leurs vêtements pour leur tenue de compétition : chaussures de course, short, t-shirt sur lesquels ils épinglaient leur dossard. Aussitôt prêts, beaucoup quittaient la cour pour s’échauffer.

Do connaissait ce rituel, ce n’était pas sa première participation à la Bigoudène.

— Do !

— Ah, Vincent !

— Salut ! Ça va ?

— Ça va, mes roues sont gonflées à bloc ! Et moi aussi ! Et toi, paré pour ta dernière course ?

— Oui, je me suis bien entraîné. J’ai l’intention d’attaquer dès le départ, mais… chut ! Pas un mot aux autres ! fit Vincent à Do en promenant son regard autour de lui.

— T’en fais pas pour ça ! lui répliqua Do en souriant.

Vincent et Do regardèrent d’autres compétiteurs.

Parmi eux, ils reconnurent le vainqueur du semi de l’an passé parmi quelques habitués.

— J’aurais été étonné qu’ils ne soient pas là, dit Vincent.

— Tu penses, ils n’allaient pas rater ta dernière course, plaisanta Do. Et moi, encore moins !

— Allez, arrête de me chambrer !

— Mais quoi, c’est la vérité, c’est ta dernière course, mon vieux, la dernière !

À ce moment, un haut-parleur annonça le départ imminent des compétiteurs handisports.

— Bon, j’y vais, dit Do en posant les mains sur ses roues. Souhaite-moi bonne chance…

— Merde !

— Merci.

Do se fraya un chemin jusqu’à la ligne de départ où, déjà, d’autres handisports s’étaient rassemblés. Cinq minutes plus tard, entre deux haies de coureurs valides qui les applaudissaient, les compétiteurs en fauteuil roulant s’élancèrent pour cette nouvelle édition de la Bigoudène, une épreuve dont la popularité n’était plus à faire.

Puis tous les autres partirent. Déroulant leurs foulées, chacun à son rythme, dosant leur effort, ils avançaient, coudes au corps, telles les bielles des anciennes locomotives à vapeur. Sous le soleil, mais par un vent de 70 kilomètres/heure.

Dans le regroupement prévu au point de ravitaillement, Do repéra le numéro de dossard de Vincent, le 220. Il ne restait plus qu’à atteindre le sommet de la côte en y mettant une grosse dose d’énergie car c’était là qu’il fallait le toucher. Là, dans le virage qui s’étirait sur la portion plane devant la chapelle de Tronoën.

Ça y était, on était sur le plat. Dépasser celui-ci, éviter cet autre… Ce n’était pas aisé. Sans perdre sa cible de vue, Do se rapprocha.

Il fallait agir vite, profiter du ralentissement, venir au contact.

Do prit la seringue, injecta le produit et profita d’une bousculade pour se débarrasser de l’objet devenu aussi inutile qu’encombrant.

— Ah ! C’est toi… fit Vincent en voyant Do à sa hauteur.

— Adieu Vincent !

Do accéléra et se lança dans la courte pente descendante.

*

Vincent s’écroula, entraînant d’autres participants de la course dans sa chute. Mais si les autres se relevèrent, ce ne fut pas son cas – les muscles tétanisés, il en était totalement incapable – et la dernière vision qu’il emporta avec lui fut celle de semelles se rapprochant sur le bitume.

Alors que des spectateurs, témoins de cette chute spectaculaire, s’inquiétaient autour de lui, un motard de la gendarmerie assurant la sécurité de la course, arriva au ralenti sur sa grosse cylindrée.

— Que se passe-t-il ?

— Une chute collective. Les autres sont repartis… mais lui a l’air sonné.

— Bien, j’appelle du secours. Veuillez vous écarter pour ne pas gêner le passage des coureurs, Messieurs-Dames, ordonna le représentant de la maréchaussée en rangeant sa moto près de Vincent pour l’isoler de la course.

Il lança son appel par radio, éteignit son moteur et descendit de son engin.

— Quelle est la gravité de ses blessures ?

— Il est mort ! répondit quelqu’un.

Cette annonce plongea le groupe de spectateurs dans la consternation et les voix qui, un peu plus tôt, s’élevaient pour encourager, adoptèrent un ton beaucoup plus discret par respect pour la victime.

Une ambulance, escortée d’un motard, arriva quelque temps plus tard. Un médecin et deux ambulanciers sortirent du véhicule. On se salua, puis le médecin s’agenouilla près du corps, ouvrit sa sacoche et fit les constatations d’usage. Pour en arriver rapidement aux mêmes conclusions que les spectateurs : Vincent était mort.

— Vous pouvez enlever le corps, dit-il aux ambulanciers en signant le permis d’inhumer. Je vous laisse le soin d’annoncer la mauvaise nouvelle à sa femme, Brigadier ?

Le motard opina.

Le corps de Vincent fut placé sur un brancard et recouvert d’un drap avant d’être chargé à l’arrière de l’ambulance dont on referma aussitôt les portes. Puis, encadré des deux motards, le véhicule sanitaire s’éloigna en direction de Pont-L’Abbé.

*

Aussitôt prévenu, le capitaine Dunant avait téléphoné au procureur de la république de Quimper pour l’informer du décès de Vincent. Quelques instants de répit avant d’assumer la lourde tâche dont il avait déchargé le motard.

— Vous avez contacté sa famille, Capitaine ?

— Pas encore, je m’apprête à le faire.

— Bien. Bon courage !

Sitôt son téléphone raccroché, Dunant prit son képi et quitta la gendarmerie à bord d’une petite voiture de fonction.

Il avait sonné et attendait qu’on lui ouvrît tout en rajustant sa tenue, pourtant impeccable.

— Oui ? fit timidement la femme qui n’osait pas ouvrir grand sa porte.

— Capitaine Dunant, Madame, se présenta-t-il en la saluant. Vous êtes bien madame Leblond ?

— Oui… C’est pourquoi ? questionna-t-elle, légèrement méfiante devant l’uniforme.

— C’est au sujet de votre mari, Madame. Puis-je entrer ?

— Heu… oui… bien sûr…

Dès qu’il eut franchi la porte, il la referma doucement derrière lui.

Avec tout le tact nécessaire dans ce genre de situation, le capitaine Dunant annonça à Patricia Leblond la mort de son époux.

— Vincent… mort ? Mais… ce n’est…

— Hélas ! Je suis désolé, Madame, dit-il en appuyant ses mots d’un hochement de tête.

La plainte douloureuse et les pleurs de Patricia, sous le choc de la mauvaise nouvelle, s’élevèrent. Oubliant la fonction de l’homme qui était devant elle, presque défaillante, elle se laissa tomber contre lui.

— Allons, Madame… tenta-t-il de la calmer.

— Pas Vincent… pas lui !

— Venez, allons nous asseoir, dit-il en l’emmenant vers le salon.

Avisant une petite desserte sur laquelle se trouvaient quelques bouteilles d’alcool, il choisit celle de cognac et en versa un peu dans un verre qu’il revint donner à Patricia.

Elle y trempa les lèvres.

— Co… comment est-il mort ?

— En pleine course, d’une crise cardiaque.

— Ce n’est pas possible… Il… il était en pleine forme.

Hubert Dunant n’eut pas le courage de lui dire qu’il arrivait que de jeunes hommes meurent sur des terrains de football, alors qu’eux aussi étaient en pleine forme. Car il savait que ces mots ne seraient que piètre consolation. Il conserva donc le silence.

— Où… où est Vincent ?

— Son corps a été transporté à l’hôpital de Quimper, il n’y avait plus de place à l’Hôtel-Dieu.

Patricia posa son verre et se leva ; elle tremblait.

— Il faut que j’aille là-bas, je veux le voir !

— Je crois qu’il vaut mieux que je vous y emmène ; vous n’êtes pas en état de conduire, Madame.

*

Le capitaine Dunant dut attendre la sixième sonnerie avant que le procureur ne réponde.

— Désolé de vous déranger à nouveau, Monsieur le procureur, s’excusa-t-il.

— Qu’y a-t-il ?

— Je sors à l’instant de chez madame Leblond. Je l’ai emmenée voir son mari.

— Elle l’a reconnu ?

— Oui, mais ce n’est pas la question.

— Quelle est-elle, en ce cas ?

— Madame Leblond ne croit pas en la mort naturelle de son mari.

— Mais… ne m’avez-vous pas dit que le médecin qui a constaté la mort avait délivré le permis d’inhumer ?

— Si. Mais madame Leblond m’a parlé de menaces.

— Des menaces ? Nombreuses ? Récentes ?

— J’avoue que je ne l’ai pas questionnée précisément à ce sujet. Elle était tellement choquée que je n’ai pas voulu en rajouter.

— Justement, vous venez de le dire, c’est peut-être l’effet du choc… Vous disiez que vous sortiez de chez elle ?

— Oui, j’ai attendu l’arrivée de son médecin avant de m’en aller.

— Lui avez-vous parlé ?

— Un peu. Lui aussi a été très surpris d’apprendre le décès de Vincent Leblond.

— Bon, j’ai bien pris note de ce que vous venez de me dire, mais nous allons en rester là. Au revoir, Capitaine.

— Au revoir, Monsieur le procureur.

*  Source : Le Télégramme du lundi 2 octobre 2006.

II

Le capitaine Paoli, surpris par l’averse, se mit à courir et s’engouffra dans l’entrée de l’immeuble abritant le détachement de police judiciaire à Quimper. Il secoua sa veste et grimpa le vieil escalier de bois familier.

— Salut Amos ! Quel temps ! fit-il en pénétrant ses locaux de fonction.

— Salut ! Tu as lu les journaux ?

— Pas encore puisque je ne les achète jamais. Pourquoi ?

— Tiens, regarde ! lui dit le lieutenant Verdier en lui mettant les quotidiens sous les yeux.

« Le semi-marathon bigouden fait une victime » titrait Le Télégramme ; « La Torche-Pont-L’Abbé : un mort » annonçait Ouest-France.

— Tu y étais, hier, non ?

— Oui, car Éric y participait.

— Pour revenir à ce que titrent les journaux…

— Je n’ai aucune idée de ce qui s’est passé, dit François.

Il s’installa à son bureau et ouvrit Le Télégramme à la page 8.

« Un coureur décède au cours du semi-marathon. Hier, alors que la course était bien partie, une chute s’est produite, impliquant cinq coureurs. Alors que quatre hommes se relevaient avec des blessures superficielles, le cinquième restait au sol, sans doute victime d’un traumatisme crânien. Vincent Leblond était âgé de trente et un ans, marié et père d’une petite fille de cinq ans. »

— Ouais, ça ne dit pas grand-chose. Voyons Ouest-France.

« Le semi-marathon bigouden endeuillé. Hier, un coureur amateur a trouvé la mort alors qu’il participait à la Bigoudène, la célèbre course reliant le site de La Torche à Pont-L’Abbé. Cinq hommes ont été impliqués dans cette chute collective, mais l’un d’eux ne s’est pas relevé. Il s’agit de Vincent Leblond, âgé de trente-deux ans, paysagiste bien connu du milieu horticole de La Torche, puisqu’il se fournissait régulièrement en bulbes auprès de producteurs locaux. »

— À mon avis, sa mort est suspecte, dit Amaury Verdier.

— Qu’est-ce qui te fait croire ça ?

— Si elle était due à un accident cardiaque, les journaux l’auraient dit.

— Tu en es sûr ?

— Quasiment !

— Quoi qu’il en soit, tant que nous avons été là-bas, je n’ai remarqué aucune agitation particulière. Du mouvement, oui, bien sûr, mais comme il en existe généralement dans ce genre de manifestation. Rien de plus.

— Ah bon…

Paoli replia les journaux et se plongea dans son courrier.

*

Il était presque dix heures, lorsque Patricia Leblond se présenta à la gendarmerie de Pont-L’Abbé.

— Bonjour Madame, l’accueillit une jeune fille en uniforme.

— Bonjour. Je voudrais déposer plainte.

— Pour un vol ?

— Non. Mon mari a été tué.

Ne s’attendant pas à une telle déclaration, la jeune fille écarquilla les yeux. Mais se ressaisit rapidement.

— Voulez-vous patienter un instant ? Je vais chercher quelqu’un.

— C’est au capitaine Dunant que je veux parler.

— Je regrette, Madame, le capitaine est occupé. Je vous demande un instant, je vais revenir tout de suite avec quelqu’un qui va s’occuper de vous.

Alors que la jeune gendarmette prenait son téléphone, le capitaine Dunant passa derrière elle. Le visage de Patricia Leblond s’éclaira en le voyant.

— Capitaine ! l’appela-t-elle.

— Madame Leblond ! Bonjour Madame. Mais… que faites-vous ici ?

— Bonjour… Je… J’ai eu le temps de réfléchir… Je viens déposer plainte.

— Déposer plainte ?

— Oui, je veux savoir ce qui est arrivé à mon mari. Vincent n’a pas pu mourir comme ça, c’est impossible !

— Capitaine, téléphone pour vous !

Le combiné passa de la main de la gendarmette à celle de Dunant. Pendant sa conversation, il regarda Patricia dont les yeux implorants ne le quittaient pas.

Il raccrocha, puis dit :

— D’accord, veuillez me suivre, Madame.

*

Il l’avait écoutée et recueilli sa plainte.

— Et… maintenant ? Que va-t-il se passer ?

— Eh bien, je vais informer le procureur de votre dépôt de plainte contre X, dit-il en se levant.

— Ah ! fit-elle en l’imitant.

Il fit les quelques pas qui le séparaient de la porte et l’ouvrit, invitant ainsi Patricia à sortir.

— Rentrez chez vous, maintenant, Madame, et reposez-vous un peu, lui conseilla-t-il.

— Mais… comment saurai-je si…

— Je vous promets de vous tenir au courant. Au revoir, Madame.

— Au revoir.

Il la regarda se diriger vers la sortie, referma sa porte en secouant la tête et se rassit à son bureau. Une minute plus tard, il était en ligne avec le procureur.

— Madame Leblond sort de mon bureau. Elle a déposé plainte contre X.

— Allons bon !

— Remarquez que je n’en suis pas plus étonné que ça, répliqua Dunant.

— Bon, eh bien, il ne vous reste plus qu’à envoyer quelqu’un à l’Hôtel-Dieu pour assister à l’examen de corps.

Après avoir précisé au procureur que la dépouille de Vincent Leblond était à la morgue de Quimper, le capitaine Dunant informa qu’il assisterait lui-même à cet examen et qu’il irait lui en rendre compte ensuite.

*

La voiture de la gendarmerie contourna le bloc de béton par la droite et se rangea au pied d’un escalier.

Dunant en sortit et se dirigea vers une porte vitrée à laquelle il sonna. Un peu de patience, et on vint lui ouvrir.

— Bonjour. Capitaine Dunant, se présenta-t-il. Je viens pour un examen de corps.

— De qui s’agit-il ? s’enquit l’employé en refermant la porte.

— Vincent Leblond.

— Ah oui ! Le docteur Leclerc vous attend. Si vous voulez bien me suivre, c’est par ici.

Lorsque Dunant fut prêt, il traversa le couloir et poussa la porte numéro 2. L’assistant tira une poignée de l’armoire réfrigérée et fit coulisser le plateau sur lequel gisait le cadavre de Vincent Leblond. Deux minutes plus tard, le corps fut installé sur la table en inox et l’assistant retira le drap qui le couvrait.

Séverin apparut, vêtu d’une blouse et d’un grand tablier, un masque et des lunettes de protection sur le visage, les mains gantées.

— Bien. Nous allons donc commencer l’examen du corps de Vincent Leblond. Il s’agit d’un homme de type européen âgé de trente-deux ans. Taille…

Il étira la toise horizontale et mesura la victime.

— 1,68 mètre. Poids… José, tu l’as pesé ?

— Oui, 63 kg.

— Poids : 63 kg. À en juger son apparence, il était plutôt musclé et bien proportionné. Bien, commençons par la face. On note quelques éraflures et égratignures du visage, probablement consécutives à une chute en avant.

— C’est effectivement comme cela qu’il a été trouvé, face sur le bitume, plaça Dunant.

— Ces blessures sont complétées par des écorchures au niveau des paumes, dit Séverin en soulevant les mains de Leblond. Il en est de même pour les genoux. De légères éraflures apparaissent au niveau de l’abdomen et du torse. Nous pouvons donc dire que toutes ces blessures et les hématomes qui leur sont associés, se sont produits au moment de la chute de monsieur Leblond. D’autre part, on note des cicatrices anciennes de blessures ayant nécessité des points de suture, en haut du front, à la limite du scalp, ainsi qu’à l’épaule gauche. C’est bon, on peut le retourner ?

Hubert Dunant ayant acquiescé, Séverin Leclerc et José, son assistant, retournèrent le corps avec précaution.

— Comme nous pouvons facilement le constater, le côté postérieur de la victime ne porte pas les blessures observées sur le côté antérieur. Il n’existe pas de trace de choc, la victime n’a donc pas été poussée violemment par-derrière. Mais… Attendez… il me semble que…

Séverin Leclerc se saisit d’une loupe et se mit à scruter la peau de la victime un peu plus haut que la zone lombaire. Regardant toujours à travers sa loupe, il passa un doigt léger à un endroit précis.

Dunant s’approcha de la table.

— Vous avez quelque chose ? demanda-t-il, intrigué, au docteur Leclerc.

— Oui, regardez ce point sombre.

Il accorda quelques secondes au gendarme, puis demanda à José de prendre des photos, dont un gros plan de ce qu’il désignait.

— Comme vous pouvez le voir, grâce à la loupe, ce point de couleur n’est pas un nævus pigmentaire commun, c’est-à-dire un grain de beauté. Il s’agit d’un minuscule hématome ayant un centre en relief bien net. Avez-vous une idée de ce que c’est ?

— On dirait une grosse épine ou un dard, émit Dunant.

Il se redressa puis décida :

— On arrête là, Docteur, je dois informer le procureur.

— On vous le garde au frais, alors ?

— Oui, jusqu’à nouvel ordre. Merci Messieurs, au revoir.

*

Une fois sorti, le capitaine Dunant prit le temps de respirer quelques bouffées d’air pur avant de reprendre sa voiture.

Il descendit au palais de justice et se fit indiquer le bureau du procureur.

— Entrez, Capitaine ! Asseyez-vous, je vous prie.

— Merci. Tenez, je vous apporte le compte-rendu de l’examen du corps de Vincent Leblond.

— Qui n’a rien donné, bien sûr… fit le magistrat en se carrant dans son fauteuil.

— Détrompez-vous, Monsieur le procureur.

— Pardon ?

— Je vous en prie, prenez le temps de lire.

Et Dunant vit ses yeux s’arrondir lorsque ceux-ci arrivèrent à la ligne décrivant la découverte du dard.

— Il semble que sa femme ait raison… osa Dunant.

— Pas si vite, Capitaine. Ne tirons pas de conclusions hâtives d’un simple examen externe. Cet objet a pu pénétrer dans le dos de la victime alors qu’elle tombait au sol.

— Je ne pense pas, car Vincent Leblond n’a aucune blessure au dos.

Le procureur relut les premières lignes.

— J’en conviens.

— Et je vous rappelle que la veuve m’a parlé de menaces.

— Je n’ai pas oublié. Hum, oui, tout cela est étrange…

Le magistrat se tut pendant un moment.

— Bon, eh bien, il ne reste plus qu’à ouvrir une enquête. Mais, vu ma charge de travail, je ne vais pas pouvoir la suivre, dit-il en composant un numéro de téléphone.

Un peu plus tard, il raccrocha et annonça qu’une information judiciaire était ouverte et que l’affaire serait suivie par le juge Morgan Potier. Dunant le remercia et se retira.

III

Vers quinze heures, le téléphone troubla le silence de la PJ.

— PJ de Quimper, lieutenant Verdier, j’écoute… Ah ! Oui, il est là… Oui, je vous le passe. François, c’est pour toi, Potier, le juge d’instruction, annonça Amaury en masquant son micro de téléphone avant de basculer la communication sur le poste de son chef.

— Allô ? Oui, c’est moi… Bonjour Monsieur le juge. Oui, je peux venir, bien sûr… Le temps de faire le trajet…

— Qu’est-ce qu’il veut ? interrogea Verdier.

— Il ne me l’a pas dit. Je te laisse la boutique, je file au palais.

Moins de dix minutes plus tard, François Paoli faisait son entrée dans le bureau du juge. Mais celui-ci n’était pas seul. Deux gendarmes étaient assis en face de lui, le lieutenant Violay de la BR de Quimper et le capitaine Hubert Dunant.

— Bonjour ! Entrez et asseyez-vous, Paoli, l’invita le magistrat.

— Bonjour Messieurs, dit l’arrivant.

— Je pense qu’il est inutile de faire les présentations, car vous vous êtes croisés sur l’affaire de la disparue des Cormorans*, n’est-ce pas ? Mais ce que vous ignorez sans doute, Paoli, c’est que le capitaine Dunant a pris le commandement de la gendarmerie de Pont-L’Abbé au début de l’été par voie de mutation.

Si le lieutenant Violay se contenta de le saluer d’un signe de tête, le capitaine Dunant, lui, tendit la main à Paoli.

— Bonjour François. Comment allez-vous ?

— Ça va, et vous-même ?

— Content d’avoir changé de secteur.

Sur invitation du juge, Paoli prit place à la gauche de Dunant.

— Avez-vous lu la presse, Paoli ? lui demanda Morgan Potier.

— Pas vraiment… Pourquoi ?

— Il y a eu un décès sur le semi-marathon bigouden. Vous n’en avez pas entendu parler ?

— Très peu, si… C’est un de mes collègues qui y a fait allusion. La victime laisse une femme et un enfant, je crois…

— C’est exact. Et c’est ce qui explique votre présence ici.

— Je crains de ne pas comprendre…

— Je laisse la parole au capitaine Dunant. Allez-y, Capitaine.

— Lorsque j’ai rencontré madame Leblond pour la première fois, elle m’a dit qu’elle ne croyait pas à une mort naturelle de son mari. Pourtant, on lui a expliqué que Vincent avait pu mourir d’une commotion cérébrale provoquée par la chute ou même d’un accident vasculaire cérébral ou cardiaque. Elle y croit d’autant moins qu’il était chez son médecin le lundi matin précédant la course, que ce dernier l’a trouvé en excellente forme et lui a signé son certificat médical. Patricia Leblond pense qu’on a tué son mari et que le meurtrier a agi pendant la course.

— Un homicide ? En pleine course ? Au vu et au su de tout le monde ?

— C’est ce qu’elle pense.

— Peut-être ne veut-elle simplement pas affronter la réalité, avança Paoli, mais ce n’est pas une raison pour porter plainte pour homicide.

— L’examen de corps auquel le capitaine Dunant a assisté aurait tendance à abonder dans le sens de madame Leblond. D’autre part, elle a lui a confié que son mari avait reçu des lettres de menaces. Vincent Leblond en aurait reçu trois.

— Vous avez vérifié ? demanda Paoli à Dunant.

— Pas encore.

— Excusez-moi, Monsieur le juge, mais je ne vois pas en quoi je puis être utile.

— La gendarmerie ayant plusieurs missions à effectuer dans les prochains jours, le lieutenant Violay et le capitaine Dunant sont venus solliciter de l’aide. Voilà pourquoi je vous demande de coopérer avec eux et, en particulier, avec le capitaine Dunant, à moins que vous ayez quelque chose sur le feu…

— Vous êtes mieux placé que moi pour le savoir, Monsieur.

— En ce cas, l’affaire est entendue. J’appelle le légiste, dit Morgan Potier en décrochant son téléphone.

Quelques mots échangés avec son correspondant, puis il raccrocha et annonça :

— Le docteur Leclerc procédera à l’autopsie de Vincent Leblond demain à 15 heures.

— Bien, j’y serai, répondit Paoli.

— Moi aussi, dit Dunant.

*  Voir “Caval” à Saint-Guénolé, même auteur, même collection.

IV

Le lendemain après-midi, peu avant quinze heures, Paoli retrouva Dunant devant la porte de la morgue.

— Bonjour François !

— Bonjour Hubert ! Prêt à attaquer ?

— Ma foi, je dois avouer que les autopsies ne sont pas ma tasse de thé. Je dois en avoir quatre ou cinq à mon actif, pas plus, car chaque fois que j’ai pu déléguer, croyez-moi, je ne m’en suis pas privé.

— Un peu comme moi, privilège des chefs… Mais j’ai dû assister à plus d’une vingtaine, je pense. Ce n’est pas pour cela que c’est une partie de plaisir, loin s’en faut, dit François en pressant le bouton de sonnette.

Ce fut l’assistant qui leur ouvrit et les introduisit dans le bureau de Séverin Leclerc.

— Salut Sev ! Comment va ?

— Salut François ! Bonjour Capitaine.

— Bonjour Docteur.

— Bien, allez vous habiller et rejoignez-moi dans la seconde salle.

Paoli emmena Dunant au vestiaire où ils enfilèrent une blouse.

— Tenez, Hubert, avant d’enfiler les gants, voici du baume au menthol.

— Merci.

Ils entrèrent ensemble dans la salle d’autopsie. Séverin Leclerc alluma la grosse lampe suspendue au-dessus de la table sur laquelle était étendu le corps nu de Vincent Leblond.

— Alors, il est où ce dard dont on m’a parlé ? interrogea Paoli.

— Ici, lui désigna le légiste. Fiché dans l’épiderme dorsal. José, des pinces, s’il te plaît.

— Un instant, Séverin, l’interrompit Paoli. Laisse le dard en place, j’appelle Boissy.

— Le gars de la balistique ?

— Oui, répondit-il en composant un numéro. Laurent, c’est François. J’ai besoin de toi.

— En général, c’est pour ça que tu m’appelles.

— Oui. Bon… J’ai un macchabée sur les bras et on vient de trouver un dard fiché dans son dos. J’ai besoin de ta science, tu peux monter nous rejoindre à la morgue ?

— Ah ! T’es à la morgue…

— Oui, Séverin s’apprête à faire l’autopsie du type.

— D’accord, je fais au plus vite.

— Merci Laurent.

En attendant l’arrivée de Laurent Boissy, le docteur Leclerc et son assistant emmenèrent le corps dans une pièce voisine pour faire des radios.

— Qu’en dites-vous, Hubert ?

— Je me pose des questions sur cette espèce de dard. La première étant : a-t-il joué un rôle dans la mort de Leblond et, si oui, lequel ? Et vous ?

— C’est également ce à quoi je pensais. Mais de par sa localisation, sa présence est un élément suspect en soi. Nous en saurons plus lorsque Sev et son assistant auront fini l’autopsie.

— Les voici.

Effectivement, on pouvait entendre le grincement des roulettes du brancard qui revenait. Séverin et José venaient de remettre le corps à plat ventre sur la table quand le spécialiste en balistique fit son entrée dans la salle d’autopsie.

— Bonjour à tous ! Tiens, tu as un stagiaire, François ?

— Pas du tout. Je te présente le capitaine de gendarmerie Dunant.

— Oh, pardon ! Excusez-moi, Capitaine. Dunant hocha la tête, signifiant ainsi que les excuses étaient acceptées.

— Qui est-ce ? questionna Boissy en posant les yeux sur le corps nu.

— Vincent Leblond.

— Le semi-marathonien qui est mort sur la Bigoudène ?

— Je vois que tu lis les journaux. Bon, penche-toi et regarde ça.

— Hum… oui, je vois, dit Boissy.

Tout comme les autres l’avaient fait, il passa le bout de son doigt sur la petite partie saillante.

— Tu as fait des radios, Sev ?

— À l’instant, répondit le médecin légiste.

— Le dard figure dessus ?

— Oui, et on le voit très nettement. annonça Séverin en plaquant deux clichés côte à côte sur un négatoscope qu’il alluma. Le voici. Pour avoir une image aussi blanche, je parierais pour du métal. D’ailleurs, vu la forme biseautée de l’extrémité, José et moi avons pensé à une aiguille.

— Une aiguille ?

— Oui, comme celles qu’on adapte aux seringues pour faire des piqûres.

— En effet, ça y ressemble. Donc, il a fallu être tout près de la victime pour la piquer, répondit Boissy.

— C’est tout ?

— Non, je peux aussi te préciser son angle et sa profondeur de pénétration. Pour cela, il suffit d’introduire une sonde rigide dans le canal de l’aiguille.

— Alors, vas-y, fais-le.

Laurent Boissy se mit au travail sous les regards attentifs des enquêteurs, du médecin légiste et de son assistant. Tout en l’effectuant, il écrivit quelques notes sur un calepin.

— Voilà, c’est fait. Tu peux l’extraire, Séverin.

— José, tu as sorti des pinces ?

— Tu les as posées sur le chariot, à côté de la tête.

— Ah ! Oui… c’est vrai.

Le geste précis et sûr, Séverin pinça le dard et le retira de la peau. Il le lâcha dans un plateau en inox. Le bruit confirma son idée.

— Vous avez entendu ?

— Oui, et tu avais raison, il s’agit bien d’une aiguille, dit Paoli en se penchant sur l’objet.

— Elle est entière ? questionna Dunant.

— Je ne sais pas, il faudrait l’examiner de près.

— Y en a-t-il d’autres, Sev ? interrogea Paoli.

— Je vais voir… répondit le légiste en reprenant sa loupe.

Une poignée de minutes après, il se redressait en secouant la tête.

— Non, Messieurs, c’est la seule.

— Bien. Nous allons la mettre sous scellés. Ce qu’ils firent après l’avoir mesurée.

— Si vous êtes prêts, nous allons maintenant procéder à l’autopsie.

— Eh bien, moi, je vous laisse, annonça Boissy. Tu auras mon rapport demain, François.

— Merci Laurent. Salut !

*

— Il semble que la veuve Leblond ait raison, commenta Paoli une fois qu’ils furent revenus au grand air. On a bel et bien tué son mari.

— Oui. Proprement et en silence, si j’ose dire. Pas banal, n’est-ce pas ?

— Non, pas vraiment.

— Il est 17 heures 45, que diriez-vous d’un café ?

— D’accord.

Ils descendirent du Frugy dans la voiture de service de Dunant qui se gara sur la place de la Résistance.

— Terrasse ou intérieur ? proposa Dunant lorsqu’ils furent devant L’Épée.

— Intérieur, ce sera moins bruyant.

François Paoli repéra une table et y mena Hubert Dunant. Il prit la bonne place, celle qui lui permettait d’embrasser la salle du regard. Au garçon qui s’approcha de leur table, Dunant commanda deux cafés.

— On m’a dit que vous aviez bouclé l’enquête qui vous avait conduit en Normandie avec succès…

— C’est exact. L’arrestation d’Alexis Delair m’a permis de libérer la jeune femme qu’il détenait dans sa cave.

— Elle s’appelait Clara Morvan, n’est-ce pas ?

— Vous êtes bien informé, rétorqua François Paoli, un brin soupçonneux.

— J’ai eu l’occasion de rencontrer le lieutenant Violay à mon arrivée en Bretagne.

— Ah !

— Et nous avons un peu parlé de vous. Il m’a dit que vous étiez un bon flic, mais que les apparences avaient été contre vous.

Leur conversation fut interrompue par le retour du garçon apportant leur commande. Afin d’éviter que Dunant, si sympathique fût-il, s’éternisât sur ce sujet, Paoli orienta l’échange sur un autre.

— Comment envisagez-vous notre collaboration, Hubert ?

— D’abord, si vous n’y voyez pas d’inconvénient, je préférerais le tutoiement.

— Entre nous, d’accord, mais pas devant nos hommes.

— Ça me va. Pour répondre à ta question, je pense que tu devras descendre à Pont-L’Abbé.

— Oui, cela me semble pertinent, ne serait-ce que pour aller sur les lieux du crime. Sinon ?

— Cet après-midi, mes hommes devaient faire un premier tri.

— Un tri ?

— Oui, j’ai l’intention d’interroger des compétiteurs.

— Pas tous, j’imagine, car ça fait un sacré paquet, je crois.

— Le sacré paquet, comme tu dis, s’élève à 2150 participants, dont pas moins de 850 coureurs de semi. Infos relevées dans le journal et vérifiées auprès de l’organisation de la course. Nous avons lancé un appel à témoins parmi les spectateurs dès hier matin.

— Je suppose que vous n’avez pas encore eu de réponse…

— Non.

Paoli vida sa tasse, puis relança :

— À ce propos, nous avons bien fait d’assister personnellement à l’autopsie cette fois.

— Je suis d’accord avec toi. Le docteur Leclerc semble bien posséder son sujet.

— C’est le cas. Je le croirais bien capable de trouver une aiguille dans une botte de foin pour peu qu’on lui en laisse le temps.

— Pourtant, quand on voit son bureau, on ne peut pas le qualifier de roi de l’ordre !

Paoli ne put s’empêcher de rire.

— Il dit qu’il s’y retrouve, c’est le principal.

— Quand auras-tu son rapport ?

— Demain, je pense. Il connaît mon exigence.

— Ton exigence ou ton impatience ?

— Disons les deux, ce sera plus juste. Que dirais-tu de pousser jusqu’à mes locaux ?

— Pourquoi pas ?

*

Tandis qu’ils marchaient le long de l’Odet, le téléphone mobile de François Paoli vibra dans sa poche.

— Allô ? Ah ! C’est toi, Clara… Bonsoir, ça va ? Je ne sais pas… Peut-être… Je te rappelle, d’accord ? D’accord, je t’embrasse.

Il referma le clapet de son téléphone et l’enfouit dans sa poche.

— Clara… C’est une coïncidence ou bien… ?

— Oui, c’est bien celle à laquelle tu penses.

— Excuse-moi, je ne voulais pas être indiscret.

— Ce n’est rien. Nous y voici, annonça Paoli en composant le digicode et en poussant la porte.

Il passa devant Dunant et monta l’escalier.

— Les locaux ne payent pas de mine, mais on a ce qu’il faut en matériel. Toujours là, Amaury ?

— J’allais m’en aller.

— Je te présente le capitaine Dunant avec qui nous allons travailler pendant quelque temps. Capitaine, le lieutenant Verdier.

— Bonsoir Lieutenant, le salua Dunant en lui tendant la main.

— Capitaine. Bien, excusez-moi, mais il est grand temps que je me sauve. Bonne soirée !

— Ciao, Amos ! À demain !

Paoli fit faire le tour du propriétaire à Dunant qui commenta :

— C’est assez exigu, dis-moi, constata-t-il en regardant les bureaux rapprochés et les piles de dossiers entassées à même le sol. Combien êtes-vous ici ?

— Habituellement, quatre.

— Pas de cellule de garde à vue ?

— Non, on se sert de celles du commissariat voisin. Et ce n’est pas plus mal, tu sais. Ça évite d’entendre râler et brailler les types qu’on y a mis.

La visite terminée, ils redescendirent et Dunant prit congé.

Paoli donna l’ordre d’aller chercher la voiture de fonction au centre hospitalier, puis s’en alla vers la sienne.

— François !

— Éric ! Paul ! Comment ça va, les mecs ? Pas trop fatigués ?

— Ça va. On a récupéré de notre course. Au fait, tu sais qu’un coureur a trouvé la mort sur la Bigoudène ?

— Oui. Je dois même participer à l’enquête.

— Quelle enquête ?

— Le décès de Vincent Leblond est suspect, répondit Paoli qui ne voulait pas en dire trop devant le frère d’Éric.

— Si on savait son numéro de dossard, on pourrait peut-être t’aider, proposa Paul.

— Son chrono, ce serait mieux.

— Je retiens ton idée, Éric.