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Une inspectrice de police est confrontée à une série de meurtres énigmatiques dans les environs de Saint-Étienne-du-Rouvray. Les circonstances réelles restent obscures. Sur les lieux du crime, elle découvre des indices confus qui ne permettent pas réellement de dresser le profil d’un potentiel suspect. A-t-on affaire à un humain, un animal ou un extra-terrestre ? Les événements s’enchaînent de façon complexe du début à la fin de l’enquête. Pendant ce temps, un marcheur tranquille ne réalise pas qu’il est lié à ces incidents. Comment résoudre l’énigme du bois ?
À PROPOS DE L'AUTEUR
Abdelkarim Belkassem est écrivain et enseignant de littérature arabe. Il cultive également un profond amour pour la musique classique, étant un joueur d’oud au sein d’un orchestre arabo-andalou. Il participe en tant que ténor dans le chant arabo-andalou et oriental. Auteur d’essais, il s’adonne aussi à l’écriture de romans, créant ainsi un lien entre ses racines culturelles arabes et francophones.
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Abdelkarim Belkassem
L’inspectrice et le tueur au bois dormant
Roman
© Lys Bleu Éditions – Abdelkarim Belkassem
ISBN : 979-10-422-0516-4
Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122- 5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122- 4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335- 2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
La Marche des Harraga, Éditions ThoT, 2016
Amina Zouri, une histoire du Maroc, Éditions ThoT, 2018
La Mémoire de Saghir, Éditions ThoT, 2019
Un Chirurgien à New York, thriller, Le Lys Bleu Éditions, 2019
Thomas Sif Espace, science-fiction, Le Lys Bleu Éditions, 2019
Mythomanies, roman jeunesse, Le Lys Bleu Éditions, 2019
Les énigmes du Hameau, polar, Le Lys Bleu Éditions, 2019
Dictons de Jaddati et expressions populaires du Maroc, Le Lys Bleu Éditions, 2019
Le Lycée sans foi ni loi, Éditions Thot, 2020
Deux Chats et les Hommes, Le Lys Bleu Éditions, 2020
Maroc, les oubliés de la guerre 39/45, Le Lys Bleu Éditions, 2020
La Sagesse des chats, jeunesse, Le Lys Bleu Éditions, 2020
La Bête et le Boss, Éditions ThoT – Polar /Prix du polar ABCD, 2021
Arthur, la Seine , Violette et moi, récit, Le Lys Bleu Éditions, 2021
La Seine des crimes, polar, Le Lys Bleu Éditions, 2021
Le portier des chats, Le Lys Bleu Éditions, 2022
Le joueur d’oud, Le Lys Bleu Éditions, 2022
Léo, mon petit chat doré, Le Lys Bleu Éditions, 2023.
C’est un choc ! François reçoit une nouvelle inattendue de son médecin généraliste, en ce jour de fraîcheur, alors qu’il passe une visite de routine.
— Vous êtes diabétique ! lui révèle-t-il avec un sourire contrit.
L’homme n’a rien compris de cette annonce même s’il en a entendu tous les mots, pourtant très clairs.
Yeux écarquillés, il fixe le praticien, sidéré, dans l’attente d’un autre diagnostic qui pourrait le sauver de ce fléau de siècle.
Comment peut-il l’accepter, lui qui croit qu’il a une santé de fer et qu’il ne tombera jamais malade jusqu’à son dernier jour ? Il a tout pour se garder en bonne santé, repousser toute souffrance physique et ressentir une jeunesse éternelle !
Sa femme, à ses côtés, l’accompagne pour le soutenir. Il n’a rien à cacher, tout comme elle, sur leur santé. Savoir leur permet de compter l’un sur l’autre, en cas d’urgence.
Le ciel est tombé sur la tête de Soisik avant que François ne réagisse. Elle sait qu’il ne supporte pas la maladie, pas plus que les autres, comme elle lui répète à chaque fois qu’il crie son désarroi.
Le médecin tente de faire comprendre à son patient, sa maladie. Ce n’est pas la fin du monde, se soigner est possible et sa vie ne changera pas...
— Tu pourras vivre normalement, dit patiemment le praticien pour ne pas générer plus d’anxiété.
Il sait que son patient va s’imaginer mourir là, sur le champ. François réagit déjà ainsi pour un simple rhume ou une légère grippe. Il est de nature inquiète.
Quand il pense être malade, tous les signes d’un cancer lui apparaissent. Il en frissonne déjà !
François souhaite des explications tout en cherchant une échappatoire mentale... Mais cette fois, il se sent enfermé par son destin !
L’héritage familial ne joue pas en sa faveur ni l’âge. À peine la soixantaine, qu’il attendait impatiemment, car c’est le début d’une deuxième vie. Celle de la retraite, avec le choix de passer son temps à se faire plaisir, sans rendre de comptes.
Il a tout mis en œuvre pour maintenir sa bonne forme, pour voler de ses propres ailes, mais un nouveau destin frappe à sa porte. C’est une épée de Damoclès... sur lui, qui a eu la chance d’arriver à cet âge-là sans séquelles !
Pour s’assurer du pré-diabète de son malade, le médecin prescrit une nouvelle analyse de sang.
François était heureux cette fois, car il croit que les choses retourneront à la normale, après quelques jours. Il fait confiance à son corps et à son psychisme pour le tirer d’un mauvais pas.
Mais le risque est réapparu. François a senti que rien ne redeviendrait comme avant. Une sensation profonde qui le laisse penser que quelque chose se passe à son insu.
Depuis plus d’un an, des malaises apparaissaient. Des frissons le parcourent quand il tarde à manger. Manque ou trop de sucre, il n’avait pas d’explication. Il fait passer ces manifestations pour trop d’efforts du quotidien avec ce qu’il fait pour lutter et vivre.
Le médecin lui suggère d’écrire son expérience. Le diabète peut être un bon sujet.
— C’est le livre que je n’aimerai pas écrire et encore moins vivre ! répond François avec un sourire ironique.
Le médecin ne peut rien faire pour l’apaiser. Rester calme et attendre la suite... On ne peut pas être sauvé d’une mort certaine.
— Si le médecin soignait, il se soignerait lui-même ! dit toujours le père de François.
C’est lors de ces circonstances que François réalise que son défunt père avait raison. Alors qu’il se moquait de lui et le prenait pour un ignare !
Normalement François et sa femme repartent du cabinet le cœur gai, après la visite de routine trimestrielle. Pas cette fois, il a le cœur serré, honteux d’être malade !
Surtout de cette pathologie qui a eu raison de sa mère. Elle est morte du diabète il n’y a pas si longtemps.
François n’avait pas eu le temps de faire son deuil, comme disent les Occidentaux. Mais c’est un battant. Il en avait assez vu de son vivant, dès son enfance. Solide comme un roc ou une montagne de l’Atlas, dont il aime tant le nom.
Quand il a obtenu la nationalité française, il a modifié son prénom et son nom pour éviter les racistes et ceux de l’extrême droite qui veulent la mort des étrangers. D’innocentes victimes des circonstances. On ne choisit ni son origine ni son lieu de naissance. Et les Berbères, tel François, sont fidèles à leurs racines. Et qui ne l’est pas, est un traître.
Sa femme tente de l’apaiser.
— Tu n’as rien de grave ! Ce n’est pas un cancer. Tout rentrera dans l’ordre avec un traitement et un régime. Tu n’es pas comme ta mère qui refusait les soins et se laissait mourir. Une autre mentalité chez ces personnes illettrées du Maghreb !
François écoute et ce n’est pas dans ses habitudes. Quand il entend parler de sa mère, il arrête rapidement la discussion. Sa mère est la ligne rouge à ne pas franchir, et même avec sa femme il se taira, boudeur, pendant des jours de représailles.
Ses pensées étaient ailleurs, même s’il semblait attentif et essayait de faire siens ces conseils, un échappatoire dans sa situation.
Il ressentait que cette maladie était bien là, présente en lui et il se voyait déjà mourir.
— C’est la fin ! Quelle souffrance d’être diabétique !
Il se remémore tous les malades qu’il a connus puis ceux qu’il approche au quotidien et pense à tous les effets dus au diabète.
Le premier qui lui revient, c’est Haj Kabour, un riche voisin dans les années 80 au Maroc.
Il avait de quoi payer ses soins, mais il n’y avait plus rien à faire, c’était trop tard. Encore jeune, la cinquantaine, il passait sa vie entre sa maison et l’hôpital.
C’était un marchand de matériaux de construction que François, enfant, allait voir, en passant ou pour y faire des achats. Haj parlait avec obsession de son diabète et du mal que cela lui occasionnait partout. Surtout aux pieds, mais aussi au dos. Parfois au foie ou aux intestins.
François se souvient d’un vieil homme de sa famille qui plaisantait sur les souffrances, l’âge venant.
— Le médecin me dit, quand je lui signale mes maux, que c’est la maladie de la mort. Il n’y a que la tombe qui pourra me sauver !
Il acceptait son sort comme tous ceux du bled, d’autant plus qu’il n’avait pas de quoi se soigner ou que les hôpitaux manquaient. Les connaissances des médecins étaient restreintes, aussi !
Haj Kabour a fini par se faire amputer. C’était le début de la fin. Tout s’est précipité et ses infections se sont accentuées, jusqu’au jour où on a annoncé ses funérailles.
C’était ça l’image du diabète dans la tête de François.
Les diabétiques jeûnent sans que ce soit le ramadan. Ils ne mangent plus rien. La nourriture est devenue un poison et c’est le signe de la mort.
On ne se soigne plus, surtout les pauvres. Quand ils ressentent des malaises, ils prient jusqu’à l’ultime départ.
Deux maladies étaient le sphinx des années 80 au Maghreb, la tuberculose et le diabète. Quand on en a une, on prépare ses testaments.
— On est en France et en 2023 ! dit Soisik pour le raisonner.
Il n’écoute plus ces voix extérieures, concentré sur la peur qui le ronge. Rien ne peut le sauver de la mort et personne ne peut le distraire, même pas son amoureuse. Il en est là où personne ne peut partager le ressenti. Seul devant les ténèbres et le dragon qui a dévoré les anciens. Personne n’est éternel !
C’était la deuxième fois que François le fréquentait. À cause du Covid et d’un échange qui a mal tourné avec une secrétaire de l’ancien laboratoire, il a changé de lieu.
Comme toujours, quand on sympathise avec le personnel et qu’on échange avec eux, on se fait agresser tôt ou tard parce qu’il n’y a plus de respect entre le patient et le soignant. Il croit qu’il a le droit de tout dire, avec familiarité, comme si on était chez eux, alors qu’on est dans un lieu public.
Les consignes sont claires. Port du masque et respect du nombre de 6 personnes à l’attente. Pourquoi une vieille ronchon ferait-elle sa loi et entrerait malgré le nombre atteint de patients ? Pourquoi la responsable ne dit-elle rien ? Et si on réclame le respect de la loi, la réceptionniste rabroue l’intervenant en criant...
Il ne sera pas le premier ni le dernier. Et c’est ainsi que les clients désertent et ainsi, le labo fermera.
C’est ça la vengeance !
François s’est levé très tôt pour l’examen, mais comme au Maroc, il veut être reçu sans rendez-vous.
Le fait d’être pressé par un horaire le rend nerveux et le stresse. Il aime se lever quand il veut et se rendre à son examen de santé, sans heure précise.
À son arrivée le matin, il était seul dans le parking. Le laboratoire était fermé. Il a lu les horaires d’ouverture et le seul choix qui lui reste, c’est d’attendre. Encore faut-il s’assurer que les patients sont reçus sans rendez-vous.
François se souvient d’une visite, il y a longtemps, où il avait été accepté tout de suite. Il s’était présenté parce que son labo refusait de le recevoir dans la journée lors du ramadan. Il aurait été obligé de jeûner durant 24 h.
Voilà, une petite Fiat blanche. Une jeune blonde en descend après s’être coiffée et attaché ses cheveux angéliques. On dirait une extraterrestre posée sur le parking dans un vaisseau spatial.
François l’observe sans soupçonner qu’elle travaille au laboratoire, car il y a plusieurs boutiques ainsi que l’hôtel de ville. Le parking sert à tous, y compris aux occupants des appartements.
7 h 30. François regarde sans cesse sa montre. Les minutes passent avec une lenteur inégalable et ça l’agace !
La jeune femme engage la clé dans la porte du labo alors vite, il sort et se met à courir pour arriver près d’elle, avant qu’elle ne disparaisse dans les bureaux. Une employée ne s’attarde pas pour répondre aux questions des patients avant l’heure officielle d’ouverture. Sur la porte, tout est affiché. Il faut se débrouiller...
François, en vrai Maghrébin, ne veut pas changer ses habitudes. Il pose des questions, comme au bled et s’attend à des réponses. Il a de la chance, les infirmières sont gentilles et serviables. Il faut dire que certains clients étrangers ne savent pas lire le français.
La jeune femme aperçoit François et l’attend. Il porte le masque malgré le recul de la vague Covid-19. Par peur, les gens ont gardé leurs protections. Certains sont malades et d’autres ne le sont pas. Il vaut mieux respirer difficilement que d’être contaminé, et séjourner à l’hôpital !
François lui demande s’il peut faire des analyses, même sans rendez-vous. Dans un grand sourire, elle lui confirme qu’on lui trouvera un créneau.
C’est un grand soulagement pour lui. Il retourne dans sa voiture attendre l’ouverture du laboratoire.
— On reçoit en premier ceux qui ont rendez-vous et ensuite ceux qui se présentent spontanément, annonce l’hôtesse d’accueil.
L’attente fut brève. Il n’y avait pas beaucoup de monde et les trois préleveuses étaient rapides et efficaces. Il est content, car c’est la personne qui l’a renseigné qui lui fait la prise de sang. Elle lui donne envie de présenter son bras alors qu’il arrive qu’on se sente mal devant un visage sévère et fermé, qui n’aide pas à se relaxer, alors qu’il y a déjà l’inquiétude du résultat.
François avait l’habitude de ces analyses trimestrielles depuis plus de vingt ans. Parfois, cela se passe mal. Rien de plus qu’une infirmière qui n’a pas bien dormi. On ne joue pas avec la santé des patients pourtant. Sa femme finit toujours par désapprouver celles qui ne sont pas attentives, qui manquent de douceur.
— On n’est pas des pierres, mais des êtres vivants ! rabroue-t-elle dans la situation.
François était très détendu après les prélèvements et il suffisait d’attendre les résultats. Il croit que le non-respect de 9 h de jeûne avant l’analyse sera la cause de la montée de sa glycémie. Il fait tout pour essayer de prouver qu’il n’est pas diabétique.
Sauf qu’on ne peut pas fuir quand on se trouve dans les griffes de la pathologie du siècle.
Le résultat est moins favorable que ce qu’espérait François et le médecin refuse de le laisser sans soin. Il veut le préserver de séquelles donc il lui prescrit un médicament.
Pour un diabète léger de type 2, la Metformine/Glucophage, 2 gélules de 500 mg par jour !
François est insatisfait de cette posologie. Il désire avoir une chance de ne pas figurer sur la liste des diabétiques, mais le médecin ne cède pas. La norme c’est 1,25 et François a 1,26 g, mais il a décidé de le traiter.
François est un « élu » qui n’a jamais eu de graves maladies, mais ses 60 ans commencent à jouer et cela change la donne.
— On devient des personnes vivant sous traitement, pensait François au Maghreb.
Il faut se rendre à l’évidence. Un jour ou l’autre, on souffrira de quelque chose. On rencontre tous les jours des malades. Le diabète n’est rien si on le compare au cancer.
Il faut être en accord avec soi-même, se raisonner pour retrouver une vie semblable à celle d’avant. Et éviter un diabète débutant, l’insuline voire le coma...
— Le diabète est un tueur dormant ! Il faut tout faire pour l’écouter dans son corps et son âme et lutter contre lui de toutes ses forces.
Les jours passent et François est de plus en plus convaincu que sa vie ne sera plus identique. Quelque chose en lui a changé et comme lui a dit le médecin :
— Vous réussirez, avec le sport et la diète à régler votre glycémie, mais vous êtes et vous resterez toujours diabétique !
C’est le mot qu’il ne veut pas entendre. Tomber malade, c’est la fin de son monde. Il ressent parfois de légers malaises, mais c’est tout. Il fréquente les médecins préventivement comme s’il se vaccinait.
C’est une jouissance d’entendre dire :
— Tout va bien, cher Monsieur et on va tout mettre en œuvre pour vous maintenir en bonne santé.
Quoi de mieux ?
Ensuite, on réalise que le plus important, c’est la gratuité. Un don de Dieu comme dirait un croyant ou un don de la nature selon le penseur matérialiste.
En attendant le second résultat, François prie en silence. Personne ne sait qu’il pense à Dieu. C’est à lui seul qu’il parle. Il est convaincu d’être entendu. Où il est et d’où il parle, Dieu le reçoit. C’est le même qu’il honorait au Maroc. Aucune différence même si François a décidé de changer de nom. Dieu le connaît même sous son patronyme français.
Quand François rentre au bled, il est appelé par son nom arabe et quand il revient en France, par le français ! Entre les deux, son cœur balance.
Chez lui, au Maroc, mais aussi chez lui, en France, il est étranger. N’oublions pas qu’il a obtenu la nationalité française et il en est fier.
Mais avec le diabète, être Français ou Marocain ne change rien à la situation. Le seul sauveur ultime, c’est la tombe. Fini de souffrir de la maladie.
— On dit que la vie n’est qu’une souffrance ! ressasse-t-il quand il se sent mal dans sa peau.
— Voilà le résultat : 1,23 g de sucre. Vous êtes diabétique ! dit le médecin. On fera le nécessaire.
François veut une autre chance, modifier la situation. Mais le médecin, expérimenté, sait qu’il n’y a qu’une solution.
François perd confiance en son médecin et essaie de le pousser à renoncer. Le praticien refuse, car il apprécie beaucoup François et ne veut pas le laisser face à son sort. Il veut lui éviter les effets dévastateurs du diabète, ce tueur silencieux.
Une nouvelle étape débute. Le médecin inscrit son malade sur la liste des patients en longue maladie. Le cœur lourd, François suit les étapes du dossier. Des pannes intermittentes d’internet retardent la transcription comme toujours dans les moments importants. Mais le médecin ne se lasse pas, il finit par enregistrer François.
— Maintenant, vous serez suivi gratuitement ! Pris en charge à 100 % par l’assurance maladie, dit le médecin avec un sourire malin.
François dans son for intérieur est prêt à payer pour ne pas être diabétique. Il n’est pas raisonnable, comme d’habitude, et s’en moque. Dès qu’il s’agit de sa santé, il refuse les conseils.
— Si le médecin soignait, il se soignerait lui-même ! dit François fataliste comme son père.
C’est une surprise pour lui, le Berbère. Redevenir sportif, après 20 ans d’arrêt ? C’est quelque chose que François ne pouvait pas imaginer.
Ni par refus ou parce qu’il n’aime pas le sport, mais par déception et fatigue.
Les années s’accumulent au plus profond de son corps. Le diabète en est déjà un signe, après l’hypertension.
Après la quarantaine, il a eu une défaillance tous les 20 ans... Signe que son rendez-vous avec la mort approche.
— On meurt de quelque chose, un jour ou un autre ! Personne n’est éternel, selon son père.
Il est vrai que le vieux Hussein a commencé à voir ses amis disparaître. Quand il sort de chez lui, il ne connaît plus personne. Il constate que ses anciennes connaissances ont quitté cette terre. Une retraite prolongée, définitive, dans l’au-delà.
La femme de François n’aime pas qu’il parle de la mort. Elle s’angoisse, mais lui ne pressent rien de ce qu’elle pense. Cependant, il comprend que ce n’est pas bien de parler de sa mort, car ainsi on la provoque, on attire l’attention de la faucheuse sur soi.
— Si on parle du loup, il sort du bois !
Des idées d’Orient et du Maghreb. Ne pas penser au mal, sinon il arrive au galop.
C’est vrai que ce n’est ni cartésien ni scientifique de la part de François, le fils des Universités, comme l’appellent ses frères et ses amis. Il a du mal à oublier les traditions et l’éducation reçues pendant l’enfance. Elles restent collées au cerveau, comme l’huile de cannabis sur les côtés de la pipe. Même après son nettoyage, imprégnée l’odeur diffuse très loin.
François était un vrai sportif, une force de la nature. Il aimait se mettre en avant et paraître en héros ou courageux. Il s’avançait vers n’importe quel challenge, les yeux fermés. On aurait dit qu’il était suicidaire de vouloir se dépasser autant !
Sans connaissances des sports, il aime courir, sauter, boxer et catcher et surtout faire comme les jeunes de son âge ou plus encore, comme les aînés.
François faisait de la maçonnerie avec son père,. Il allait chercher de l’eau à la fontaine ou dans les puits du village, avec des seaux. Il montait le ciment, le sable et les briques aux étages. Il cassait des pierres pour bâtir les murs. Il ne refusait rien.
Sa mère, de temps en temps, lui conseillait d’être attentif à son thorax. Les côtes sont fragiles et donc il ne fallait pas augmenter les charges.
Mais à qui parlait la mère ? Le jeune ne freine pas et rien ne lui fera faire marche arrière.
Les jours passaient et sa force diminuait. François se devait d’être prudent. Il voyait, autour de lui, ce qui arrive si on tombe malade par bêtise.
Il avait besoin de conserver ses forces pour des activités en plus de ses études.
L’alerte, ce fut la sensation d’une forte brûlure au thorax quand il courait. Après l’adolescence, il se sentait très fatigué en s’entraînant à l’athlétisme deux fois par semaine.
— Privilégie tes études. Le sport, tu pourras toujours en faire par la suite ! recommande le professeur d’éducation physique.
Il a constaté que François force et doit se ménager. Après son 18e anniversaire, François se souvient des conseils de son entraîneur de rugby. Il se fatigue trop, physiquement, et son âme en a assez de la souffrance.
Quand son médecin, en France, à ses 40 ans, lui suggère de faire un peu de sport, il lui répond qu’il est fatigué et qu’il ne peut plus souffrir. L’énergie qui lui reste, c’est pour survivre le reste de ses jours.
Le médecin propose le sport comme soin et François le sent comme une usure.
Il est vrai que son corps a subi dans le passé, ce qui lui a laissé des séquelles dans la mémoire. Il a senti la peur l’handicaper de plus en plus alors il ne se met plus en danger et fait le moins d’effort possible.
On lui demande de marcher et François ne peut pas agir plus que dans sa routine quotidienne. Le médecin insiste et François est gêné. Il n’aime pas mentir et dire qu’il fait des séances de marche alors il lui dit, qu’un jour, il recommencera... Être citadin ne facilite pas une bonne santé. On mange trop et on bouge moins. Avec l’âge, le corps commence à dysfonctionner et de graves maladies apparaissent.
« Obligé, mais pas kamikaze ! » pense François.
Cependant, c’est une question vitale. Les médicaments ne suffisent pas, à eux seuls pour lutter contre le diabète. Il faut être en bonne forme grâce au sport. Même en marchant une demi-heure par jour, comme lui a conseillé le médecin.
François essaiera ! Le médecin ne comprend pas son patient. Ce n’est pas un essai qu’il veut, mais qu’il s’exécute. À vos ordres mon commandant, comme à l’armée !
— Le diabète est une guerre et il faut lutter pour la gagner. On va le battre ensemble ! Soyez sûr que vous pouvez vivre normalement, sans contrainte.
François ne peut pas comprendre, il pense que le diabète est une mort à petit feu. Il en est effrayé puisque sa mère en est morte.
Le parcours pris pour ses circuits par François, il l’appelle son chemin de croix ! Comme le Christ avec sa croix sur le dos. Une souffrance éternelle pour François, plus que celle, mythique, du Christ.
François est musulman, il ne croit pas à ce chemin, d’après le Coran, mais il se voit sur le chemin de croix de l’humanité. Que cette vie n’est qu’un malheur du début à la fin.
— Il faut que je m’adapte. Ma force physique est partie, mais la technique et les connaissances sont toujours là, puisque mon cerveau et ma mémoire fonctionnent.
Comme dit Jacqueline :
— J’ai la chance que mon cœur et mes poumons soient sains et saufs, à 90 ans ! C’est de la joie malgré les difficultés physiques.
Le matin, à 5 h, François part marcher. C’est un bon début.
Il débute le traitement contre le diabète et il craint un coma hypoglycémique. Pourtant il ne déjeune pas avant de partir... Paradoxe !
Comment son corps réagira-t-il au médicament ? Comment supportera-t-il l’effort après plus de 20 ans d’inactivité sportive ? Comment pourra-t-il marcher très loin de chez lui alors qu’habituellement il ne bouge qu’en accélérant sa voiture ?
Il en avait assez. De l’énergie seulement pour sa petite vie. « Pour son confort personnel, pour prendre soin de sa personne », comme le dit Élise, un petit sourire moqueur sur les lèvres !
La vie est un mouvement et le corps a besoin de se tenir en équilibre et en bonne santé. Se bouger pour se préserver.
C’est son premier jour de sport et de traitement. La première prise et le lendemain matin, le sport. Comme a proposé le médecin, 30 minutes par jour.
François est quelqu’un qui ne fait pas dans la demi-mesure. Il respecte les ordres, surtout avec le diabète. Il ne plaisante plus, lui qui pense vivre plus de 100 ans ! C’est une déception. La vie est dans la main de Dieu ! dit François, comme un croyant oriental. Personne ne sait quand il mourra ni de quelle maladie. On peut mourir avec un morceau de pomme avalé de travers !
Il n’y a pas de jeune ou de vieux, celui qui est en bonne santé et celui qui est malade. À chacun son destin et son heure. Dieu qui a le pouvoir de décider de la vie de ses créations.
Le matin très tôt François, sur deux pieds solides, aime marcher avant son repas. Le ventre vide et léger. Il veut sentir sa poitrine libre pour bien respirer. Le danger pour lui, qui est phobique, c’est de manquer d’air.
Une sensation venue de l’enfance et un stress sans source ni cause. La peur de la tuberculose qui signifiait la mort.
François n’a jamais consulté de psychiatre ! Pour lui, Maghrébin, c’est pour les fous. On ne peut pas dépenser notre peu d’argent pour parler alors que des patients du bled n’ont même pas de quoi consulter un généraliste, une fois par an.
Pour François et sa famille, le dispensaire et l’hôpital public sont un paradis si on y trouve un médecin ou même un infirmier !
On ne demande pas grand-chose quand on a des difficultés pour régler la facture. Prendre ce qu’on nous donne et dire : Al Hamdou Lilla, je suis satisfait !
Ce fut une nuit blanche ou presque ! François se soucie. Pourtant, pour lui, il est possible de gagner cette guerre contre cet animal féroce. D’un coup de poing ou d’épée, il le mettra à terre et vaincra, comme les gladiateurs romains ! Sauf qu’on n’est pas dans l’arène devant des spectateurs encourageant les héros. Seul et chaque jour est une nouvelle bataille.
François n’a pas de tenue de sport, sauf un survêtement. Il a gardé l’esprit sportif – chez lui – avec des tenues en jersey élastique qui lui permettent d’être à l’aise. C’est un bon début, cet état d’esprit.
Il calcule le trajet pour une marche d’une heure ou moins. Il veut vérifier sa capacité et sa force.
François s’est préparé et est sorti de sa maison. Sa femme dormait. La rue était vide et le soleil n’était toujours pas levé. Il a eu le bonheur de commencer à marcher à la fin de l’été. Il fait tout de même 4 °C le matin à Rouen ! Il reste encore quelques semaines avant l’arrivée de l’hiver. Il sera habitué à sa pratique avant d’affronter le froid, son ennemi juré.
En arrivant en Europe et en France, il n’avait jamais foulé la neige. Il se souvient d’il y a 20 ans ! La voir tomber de chez soi. Il craignait le froid et évitait de sortir sauf pour quelques courses et en se couvrant de plusieurs couches de lainages. On aurait dit Harma, un homme habillé de peaux de mouton le 2e jour de la fête de l’Aïd ! Des centaines de kilos de laine sur le dos !
Quand François retourne au Maroc pour ses vacances, il porte un 3/4 et des pulls même s’il fait chaud. Par 40 °C ! Les gens le regardent ébahis. Parfois, on lui fait la remarque :
— Il fait chaud aujourd’hui, vous ne le sentez pas ?
François hoche la tête sans un mot. Il sait qu’ils ont raison. Le froid et dans sa tête, comme un état dépressif caché sous le tapis. Il était mal à l’aise au Maroc avec ses 30 ans, diplômé et demandeur d’emploi. Une fin de vie ! Des années d’études sans perspectives !
Le chemin de croix pour lui n’est pas seulement la maladie, mais aussi l’inutilité. Un secret resté dans les profondeurs de son âme sensible.
Ce matin l’air était frais, mais sans plus. Il lui fallait s’habituer à marcher rapidement, seul dans la noirceur de la nuit.
C’était déjà un miracle de trouver la force de se lever. François, quand il voyage tôt, se sent mal. Comme un étranglement, un manque d’air qui l’étouffe. Rien de physique selon lui, tout est psychique.
C’est une affaire de contrariété, c’est tout. Quelque chose qui se manifeste à son insu, qui lui dit qu’il obligé de circuler et qu’il n’a pas le choix. Tout lui est difficile à ce moment-là. Même pour quelques kilomètres. Surtout le départ.
Ensuite, la tension nerveuse disparaît et il se sent mieux. Comme si de rien n’était. Il sent le sang battre dans ses veines et sa bouche redevient humide.
Il croyait que rien ne fonctionnait dans son corps et que cela bloquait sa respiration. Une sensation de mort imminente. C’était mécanique chez lui. Rien de visible et aucun médecin n’avait pu faire de diagnostic.
Pas d’effet sur sa santé. Il est gêné de ne pas se maîtriser et cela majore l’angoisse. Il s’imagine perdre le contrôle de sa vie !
François se laisse aller à un rituel, se lever à son gré. Manger selon son envie, sauf pour marcher et sortir après. Sans contrainte. Comme ça, il domine son corps et sa respiration. C’est ce qu’il a trouvé de mieux.
Il pense que ces marches l’aideront à bien respirer, à s’adapter à l’air froid. Il se promène doucement puis il accélère la cadence, jusqu’au bout de son souffle. Il ne se met pas en situation de crise et reprend sa respiration normale. C’est une technique qu’il maîtrisait dans sa jeunesse d’athlète.
La seule chose sur laquelle il insiste, c’est d’être bien couvert. La chaleur l’habite. Comme un homme du désert, un Sahraoui.
C’est son bonheur quand le soleil se lève et réchauffe la terre et les corps !
Il dit que le froid est un enfer et la chaleur, le paradis sauf qu’en Europe, c’est le gel qui tue, chaque hiver, les sans-abri. En Afrique, c’est la chaleur qui ôte des vies.
Dès sa sortie, François se concentre sur sa respiration. Il s’éloigne doucement de sa maison, s’arrête de temps en temps pour vérifier son souffle et voir si ses poumons se remplissent suffisamment. Son corps s’échauffe, ses muscles se relâchent et il respire à fond.
La solitude joue, elle aussi, un rôle pour apaiser le corps et l’esprit.
François prévoit de revenir sur ses pas s’il se sent mal. Il emporte des sacoches avec de l’argent, une carte bancaire et un téléphone portable. Quelques biscuits s’il se sent en manque du sucre et de l’eau. Il est prévoyant depuis un malaise en pleine forêt de Saint-Étienne-du-Rouvray. Il roulait en vélo et arrivée au bout de la piste près de l’école de police d’Oissel, il s’est senti perdre conscience. Il n’en connaissait pas la cause, fatigue ou hypoglycémie ? Il avait l’habitude de partir s’entraîner à jeun et n’avait rien à manger.
La chance a mis un jeune cycliste sur sa route. Il a vu François défaillir et s’asseoir sur une grosse pierre. L’homme est venu voir ce qui n’allait pas en lui tendant une barre de céréales chocolatées. Un ange qui le sauvait de la mort, selon François !
Après avoir mangé, sa force est revenue peu à peu. Il a trouvé le courage de reprendre son vélo et de parcourir la route du retour.
Pour une fois, il n’avait pas stationné sa voiture à proximité et sa femme était restée chez eux, sans savoir ce qui lui arrivait.
François fait attention, en ce premier jour, à sa réaction au traitement. Il a très peur d’avoir une baisse de taux de sucre et donc un coma. Son imagination est fertile ! La posologie prescrite n’est pas si élevée pour lui créer un malaise... Il est, en réalité, prédiabétique et le médicament est préventif.
Tout se passe bien. Chaque jour François progresse et élève la cadence. Il est heureux de marcher, de se promener et de visiter les lieux. Content de passer près des deux facultés où il aurait aimé étudier, l’école d’ingénieurs et la faculté des sciences.
François profite de chaque occasion pour visiter ces lieux de culture et de recherches. La fête de la science était, pour François et sa femme – qui ne manquaient les portes ouvertes pour rien au monde – un moment privilégié avec des têtes pensantes. Surtout quand on est en retraite. On aime entretenir ses neurones et découvrir des innovations.
L’histoire des sciences et son centième anniversaire avaient été une occasion inoubliable pour François. Ce n’est pas tous les jours qu’on voit le moteur d’une fusée qui a voyagé dans l’espace. Quoi de mieux pour François qui regrette de ne pas être scientifique et savant ? Ce que sa mère aurait aimé qu’il soit et dont elle a rêvé dès le jeune âge de son fils.
François est heureux de marcher. Il partage ces moments avec des fans sur YouTube. Il filme son trajet et explique ses rencontres y compris celles avec des animaux.
Chaque jour est différent, chaque moment, une histoire nouvelle. Tout fait son bonheur, un oiseau qui chante dans un arbre, un homme qui sifflote la nuit, une femme partie tôt à son travail et qui se presse. Un employé qui nettoie la rue ou la cour du supermarché. Un malade qui attend très tôt le taxi pour aller à l’hôpital pour ses soins ambulatoires. Tout est amusant ou étonnant. Cela facilite son trajet qui lui semble très court. Question de se refaire une santé.
C’est un matin pas comme les autres !
Levé à 4 h, troublé par une sensation bizarre. Un cauchemar encombre un coin de la tête de François. Le pouls déraille. Comme un tremblement tachycarde.
Adolescent, François se dirige vers l’ancienne maison de ses parents. La route est sombre, comme un jour de voyage dans le temps ! Il quitte une maison pour aller dans une autre, proche de là, où vit sa mère. Son père habitait la première, comme si les parents étaient séparés, contrairement à la réalité ! François rêve...
En lui, deux idées combattent, mais François n’a pas le choix ni le pouvoir de privilégier l’une des deux !
— Vais-je chez ma mère ou non ?
C’est sa façon de réfléchir et d’échanger avec lui-même ou avec son démon !
Il marche toujours et ressent une grande faim.
En ce temps-là et dans la bohème de François étudiant, la maison de sa mère était le restaurant toujours ouvert, mais il fallait marcher pour y arriver. Faire profil bas en attendant que la mère propose le plat ou ordonne à la sœur de le faire. Cette dernière baissait la tête parce qu’elle se sentait obligée d’obéir et que ça ne lui plaisait pas.
Elle ne voulait pas que son frère mange. Elle préférait qu’il reste à jeun et qu’il souffre, le ventre vide. Pour le punir de quelque chose auquel il ne peut rien : être né garçon !
Les femmes sont jalouses des hommes, même s’ils sont à leur service et à leurs ordres. On les déteste parce que, même sans richesse, il est le plus fort et le plus respecté dans la société.
Alors quand une femme a un peu de pouvoir pour les punir et les humilier, elle n’hésite pas. À commencer par la mère qui utilise la faim pour faire tomber les montagnes, c’est-à-dire les hommes.
C’était la méthode des jours de la faim que la mère a connu comme tous les Marocains au moment de la colonisation française ou avant. Le gouvernement punissait le peuple en le tenant par le ventre.
— Si ton chien a faim, il te suivra facilement ! dit le dicton populaire.
Sa souffrance, pour François et son peuple, c’est bien la faim et son enfer.
L’homme peut tuer ou faire n’importe quoi, pour un morceau de pain.
François, encore dans son rêve, marche donc vers chez sa mère. Il arrive au bout de la rue et voit comme un camion de pompiers ou une ambulance, devant la porte de la maison maternelle.
Son cœur se lève et la bile remonte. Il sent des brûlures le long de l’œsophage. Ses pieds s’alourdissent et François se fige. Que va-t-il découvrir ?
C’est la première fois qu’il voit que la porte s’ouvre ou est ouverte. Un orchestre joue dans le local d’un four du quartier.
C’est bizarre ! François entre. Dès qu’il y pose le pied, il entend la voix d’un homme.
Il se demande ce qu’y fait un étranger, car ce qui n’est pas une habitude dans sa famille, ni dans la société orientale. Il s’avance, croyant que l’homme menace la mère ou les sœurs et donc il doit être – traditionnellement – le protecteur de la famille.
Il se retrouve en face d’un convive assis sur un matelas posé au sol, au milieu de la cour. Il mange la soupe de la mère. La voix de la sœur parvient de la cuisine. L’homme ne bouge pas et continue son repas en baissant la tête.
Tout à coup, la mère s’assoit au bout du matelas, comme si elle protégeait l’intrus de la colère de son fils !
Bousculé par le cauchemar, François ouvre les yeux et se retrouve en France, dans un autre temps. Il avait entre 30 et 40 ans dans le songe et il se réveille 20 ans après !
Il se lève, comme à son habitude et revêt ses vêtements de sport. Six chats bousculent ses pieds et risquent de le faire tomber. Ils marquent leur présence pour obtenir leur pâtée.
François aime bien marcher avant de nourrir les chats, mais son amour pour eux l’empêche de les laisser sur leur faim. Alors il dépose leur repas dans les gamelles. Deux ou trois cuillerées chacun avec le parfum qu’ils préfèrent, poisson, bœuf, poulet ou autre et des croquettes à volonté.
François a le cœur et l’esprit apaisés après les avoir nourris. Il marchera, heureux de son action envers ces petits bouts de chou collés à nous, qui donnent tant d’amour et de fidélité.
Deux survêtements, un bonnet, trois pulls, un manteau avec une capuche, un cache-col et des gants, voilà l’équipement du sportif ! François sort comme un pompier qui se prépare à entrer dans un four ou comme un scaphandrier dans la profondeur de la mer.