Bain tragique au Pouldu - Serge Le Gall - E-Book

Bain tragique au Pouldu E-Book

Serge Le Gall

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Beschreibung

Lise Domachel est enlevée sur la plage par un homme. Elle plonge alors dans un cauchemar...

Qu’il est agréable de prendre un bain en solitaire, tôt le matin, dans cette petite crique du Pouldu ! C’est ce que fait régulièrement Lise Domachel, qui aime aussi danser, légèrement vêtue, sur la plage. De quoi attiser des convoitises. Cette habitude vient précisément de la mettre en danger. Un homme se glisse derrière elle, l’immobilise, lui bande les yeux, la fait monter à l’arrière d’un fourgon et l’emmène vers une destination inconnue.
Le commissaire Landowski s’empare de l’enquête avec le concours de sa compagne magistrate et de ses collègues policiers. Partant du Pouldu, ses investigations vont le mener de Moëlan-sur-Mer à Quimperlé en passant par Riec-sur-Bélon et Doëlan. De victime en victime, le divisionnaire va découvrir le plan d’élimination méthodique d’un assassin assez astucieux pour rester dans l’ombre. Mais le temps presse ! Lise, seule et recluse, n’a que peu d’espoir d’en sortir vivante…

C'est une véritable course contre la montre qui s'engage dans ce trente-troisième tome des enquêtes du commissaire Landowski !

À PROPOS DE L'AUTEUR

Dans la collection Pol’Art, Serge Le Gall a mis en scène les tribulations du détective Samuel Pinkerton.
Dans la collection Enquêtes et Suspense, il vous propose de participer ici à la nouvelle enquête du désormais célèbre commissaire divisionnaire Landowski.

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Couverture

Page de titre

Cet ouvrage de pure fiction n’a d’autre ambition que de distraire le lecteur. Les événements relatés ainsi que les propos, les sentiments et les comportements des divers protagonistes n’ont aucun lien, ni de près ni de loin, avec la réalité et ont été imaginés de toutes pièces pour les besoins de l’intrigue. Toute ressemblance avec des personnes ou des situations existant ou ayant existé serait pure coïncidence.

PROLOGUE

Finistère-Sud. Commune de Clohars-Carnoët. Bord de mer. Lieu-dit Porsac’h. Mardi 8 heures du matin

Il y a du vent.

Lise s’en sert quand elle danse.

Il y en a souvent, comme si le régisseur du mouvement de l’air avait choisi ce lieu parmi d’autres pour s’amuser avec l’océan et le projeter inlassablement sur les rochers saillants de cette partie de côte abrupte. Que sait-on vraiment des éléments qui régissent notre planète ?

La grève en pointillés sert aux riverains pour mettre leurs canots à l’eau. Quelques agriculteurs y viennent prélever du goémon pour amender leurs champs. À part eux, il n’y a pas grand monde à approcher le bord de l’eau, l’accès n’étant pas des plus aisés et la chute toujours possible.

Il faut quand même admettre que c’est un endroit où les petites criques se méritent. D’abord c’est loin du centre-bourg. Ensuite la route qui y mène est sinueuse et étroite. On n’y arrive pas par hasard ou alors de nuit parce que la pluie battante a flouté les panneaux indicateurs.

Mais à la belle saison, c’est un endroit très agréable qui donne envie de lire, d’écrire ou de peindre. Ou de ne rien faire, allongé dans la chaise longue. Les maisons sont nichées dans des écrins de verdure au bout de chemins déserts et discrets où le visiteur non averti se fourvoie et revient sur ses pas sans avoir découvert le havre de paix. Tranquillité permanente et discrétion assurée.

Le long du bord de mer serpente une section du GR34 et les marcheurs vont jusqu’à Doëlan ou en reviennent. Le paradis au naturel. On se croise, on se rencontre. On se parle parfois et, si le cœur vous en dit…

Là en face de la falaise, il y a une langue de roche qui s’avance fièrement dans la mer et qui résiste à ses assauts depuis des siècles. Entre elle et la terre ferme où se situe un curieux parking aux ornières très marquées, se niche une petite crique discrète. Elle paraît totalement inaccessible à moins d’y accoster par mer calme, sans peut-être pouvoir en repartir. Peut-être que dans des temps reculés, les naufrageurs y pratiquaient leur activité criminelle que l’on appelait alors d’une façon peu catholique “fortune de mer”.

Sur le promontoire qui n’est pas bien large, on aperçoit une silhouette inattendue voire incongrue qui se meut délicatement dans l’espace légèrement embrumé. C’est une jeune femme qui danse face à la mer.

Élancée, pieds nus, elle porte un tee-shirt gris très court, moulant à l’excès qui n’arbore aucune marque et laisse voir un nombril non saillant. Le pantalon resserré à la taille est court lui aussi mais bien plus ample. Coloré comme un patchwork psychédélique avec une dominante fuchsia, comme des taches de sang diluées par les embruns, il bouge bien au gré des mouvements et la brise s’en amuse.

L’inconnue solitaire danse lentement. Ses gestes sont déliés et harmonieux comme s’ils épousaient le sens du vent. Alors que tout s’agite autour d’elle, elle semble hors du temps. Seuls ses cheveux mi-longs semblent s’irriter sous l’agitation de l’air. Tel un fétu de paille, elle est si mince qu’une bourrasque pourrait la bousculer et la faire basculer dans le vide si proche. Peut-être cette approche du danger lui donne-t-elle de l’inspiration pour son ballet très personnel et conduit certains de ses gestes. Parfois l’art se choisit des amis infréquentables.

Et puis brusquement, le ballet semble terminé et la danseuse remet ses fines chaussures. Ensuite elle remonte à grands pas vers la côte.

Elle ne rejoint pas le parking où d’ailleurs, il n’y a aucune voiture à l’attendre. Sur sa droite, elle prend une sorte de sentier en descente qu’on croirait réservé aux bouquetins d’un parc naturel et disparaît dans ce qui semble un gouffre mystérieux tant il est anxiogène à regarder d’en haut. C’est drôle cette faculté du vide à tenter de vous attirer vers une fin certaine. L’accident tutoie très bien le suicide.

L’inconnue sort de l’ombre portée par la roche et réapparaît tout en bas sur la courte plage de sable et de cailloux. Elle se place au centre de la petite anse comme si elle ne voulait rien perdre du spectacle, ôte ses chaussures de ballet qu’elle dépose hors de portée de la vague puis elle fait glisser son pantalon coloré qu’elle plie et insère sous les chaussures noires.

En dessous, elle ne porte rien et ne laisse pas apparaître la moindre pilosité. Puis, c’est au tour du tee-shirt qu’elle glisse entre les plis du pantalon.

Elle est nue.

Elle se relève. Un petit bidon rouge apparaît dans sa main gauche. Elle devait l’avoir glissé sous sa ceinture pour faire sa marche. Elle se désaltère d’une bonne gorgée du liquide puis dépose l’objet sur ses affaires entre les deux chaussons comme pour le bloquer. Face à la mer qui l’attend, elle s’étire et fait quelques flexions sans se soucier du moindre regard qu’on pourrait porter sur elle. C’est d’ailleurs improbable. Il est tôt et on est encore hors-saison. Dans cette faille discrète, elle se situe à plusieurs mètres en dessous du niveau du sol. Il faudrait se pencher dangereusement pour tenter de l’apercevoir furtivement. Et quand bien même puisqu’elle ne se cache pas.

Jambes écartées et bras en croix, elle s’immobilise et elle ferme les yeux. Un rite, une prière. On n’en sait rien. Deux minutes plus tard, elle rompt le charme de sa contemplation et s’approche du bord de l’eau. Lentement elle y glisse les pieds comme si cela tenait d’un rituel précis puis elle s’avance. L’eau caresse les cuisses bien galbées, mouille son entrejambe, noie le bassin harmonieux, remonte le ventre si plat puis le dessous des seins jusqu’à atteindre enfin la gorge à faire perdre pied à la naïade.

Elle se met alors à nager superbement. Du dos crawlé en direction du large sans vraiment creuser l’onde qui l’accueille puis un retour en brasse énergique créant des bouillons. Elle décrit ensuite un grand cercle en brasse coulée en longeant les bords de l’anse puis recommence son manège à la manière d’un mouvement perpétuel. Elle réalise son parcours plusieurs fois et avec grâce comme si le temps s’était arrêté quelques minutes pour contempler chastement l’ondine du petit jour.

La solitude du matin appelle à la sérénité. C’est peut-être ce que cette nageuse est venue chercher auprès d’une nature encore intacte, la mer, les rochers, le vent. La solitude.

Personne ?

Rien n’est moins sûr ! Vous le savez très bien. La vie a déjà dû vous l’apprendre. Mais si on aime prendre le risque…

Encore quelques minutes de nage puis la belle sirène s’extrait lentement de la mer. L’image est discrète mais magnifique. La fraîcheur accentuée de l’océan ne semble pas avoir d’effet sur sa peau. L’eau serpente sur son corps en respectant les pleins et les déliés sans animosité. Une sorte de caresse en remerciements du respect fait à l’élément naturel. Peut-être aussi l’invitation du lieu à revenir demain et tous les autres matins du monde.

L’image est si belle qu’on se croirait dans le jardin d’Éden. Pourquoi ne pas arrêter le temps et rejeter le mal au-delà de l’horizon ?

Mais le monde est ainsi fait que le paradis lui est trop souvent étranger pour le laisser exister… Puis le destin s’en mêle. Il devait s’ennuyer à regarder cette histoire sans paroles. Il n’est pas accro au bonheur. La belle inconnue comprend brutalement qu’elle est en train de le découvrir à ses dépens.

Et que rien ni personne n’aura le pouvoir de changer les choses. Il s’agit là d’un simple rapport de force où la proie magnifique est bien identifiée. L’animalité ne peut être exempte de nos vies. L’instinct du prédateur n’est jamais très loin.

Même s’il y a un peu de bruit, des petits cris plaintifs de biche aux abois, une détresse pathétique et des glissements de galets sous des pas nerveux, on ne peut pas vraiment parler de résistance tumultueuse. C’est curieux comment l’évidence de l’échec s’impose assez vite à la victime désignée.

Ne reste finalement posée sur le sable grossier qu’une petite bouteille en plastique rouge. À moitié vide ou à moitié pleine. Le choix est toujours difficile. C’est au destin de choisir son camp.

Lise espère : « Peut-être que quelqu’un retrouvera la gourde rouge. Et me sauvera ! »

I

– Dis Lando, tu fais quoi là ? Je croyais que tu avais l’intention de t’occuper de la haie cet après-midi ?

Le commissaire Landowski était confortablement installé dans le canapé vieux cuir que Lorraine Bouchet, sa compagne et magistrate au Parquet de Paris, avait chiné dans une brocante des plus improbables dont elle avait le secret.

Il répondit vivement :

– Je n’ai pas dit que je n’y allais pas ! Je n’ai juste pas dit quand !

Elle chantonna :

– Des mots, toujours des mots, les mêmes mots…

– Pousse pas, Lorraine ! Tu n’es pas Dalida et je ne suis pas Delon !

Lorraine soupira fort pour qu’il l’entende et balança :

– On fait ce qu’on peut avec ce qui reste ! Landowski se redressa dans le canapé.

– Tu me cherches à cause de cette foutue haie qui n’arrête pas de pousser ? Il y a de la pluie, il y a du soleil. Forcément la nature en profite. Et puis on ne vit pas ici à l’année ! Je ne vais pas passer mes vacances à couper les branches, les ramasser, les porter à la déchetterie et recommencer !

– Et tu proposes quoi à la place ?

– Un mur en parpaings et c’est marre !

– Mais c’est horrible à voir ! Toujours les solutions radicales hein ?

– Des fois, c’est plus simple non ?

– Tu te dérobes, je vois bien ! Mais si tu as mieux à faire, dis-le-moi ! Je suis en âge de comprendre, tu sais !

Le commissaire brandit un des deux journaux locaux qu’on leur glisse dans la boîte aux lettres chaque matin.

– Je me tiens au courant des actualités d’ici. J’aime bien savoir ce qui se passe dans le coin.

– Si ça t’amuse !

– Je cherche même le prix de vente des langoustines sous criée ! C’est te dire.

Lorraine secoua la main droite l’index levé à la manière de la maîtresse d’école qui réprimande l’élève dissipé.

– Si c’est une manière détournée pour me demander d’aller en chercher un kilo pour midi, tu peux te brosser mon p’tit père ! Si tu veux en manger, tu te bouges, tu prends ta petite bourse de célibataire et tu y vas toi-même !

Landowski ne réagit pas. Il continua à froisser les pages du journal en faisant volontairement du bruit.

– Alors cette haie ?

La magistrate ne laissait pas tomber. Elle avait les mains posées sur les hanches à même la peau. Ce matin-là, elle avait passé un tee-shirt moulant hyper court.

– T’as trop chaud ou quoi ? demanda Landowski, histoire de l’asticoter un peu.

– Je suis chez moi. Je fais ce que je veux.

– Moi aussi !

– Sauf qu’on n’a pas le même statut à propos de cette maison !

– Holà ! C’est quand même bien toi qui n’as pas voulu que j’en paie la moitié !

– Un rêve comme celui-là, ça ne se partage pas !

– Dis-moi alors ce que je te dois pour le loyer !

– Je ne disais pas ça pour ça !

– Pourquoi alors ?

Lorraine haussa les épaules.

– Mais je n’en sais rien. Tu sais Lando, t’es fortiche pour m’embrouiller. Après je ne sais plus où j’habite !

– Y en a qui disent que c’est l’amour qui fait ça !

– Ne cherche pas à détourner la conversation, si tu veux bien. J’te connais. Ensuite tu vas m’embourber à me faire oublier comment je m’appelle !

– C’est me faire beaucoup d’honneur !

Le divisionnaire souffla.

– On est arrivés hier soir ! Tard en plus ! J’ai eu une semaine de ouf avec des tarés qui croient dur comme fer qu’en faisant exploser le monde aujourd’hui, il sera meilleur demain. Ceux-là, on va les traîner des décennies. Ensuite ils sortiront de taule et on remettra ça !

– On dirait que tu ne crois pas beaucoup à la réinsertion !

– J’espère toujours mais…

Lorraine resta silencieuse.

– On a trois jours, reprit le commissaire. Aujourd’hui samedi, je fais cool. Je ne suis pas en service. Toi non plus. Nos collègues respectifs sauront gérer la police et la justice du pays sans nous. T’inquiète ! La révolution attendra bien lundi non ?

Lorraine n’avait pas changé de sujet.

– Je ferais bien d’employer quelqu’un pour le faire, dit-elle presque pour elle. Ce serait plus sûr.

– Couper la haie ? Tu devrais.

Landowski prit une petite voix pleurnicharde et ajouta :

– Enfin Lorraine, tu sais combien je suis maladroit ! Je pourrais me blesser !

Elle répondit fermement :

– Même avec une éponge si je m’en tiens à cette frayeur maladive qui te tient éloigné de l’évier !

Landowski se leva et s’approcha de la baie vitrée donnant sur la mer. Il l’ouvrit davantage.

– On n’est pas bien là ? Qu’est-ce qu’on est bien !

– C’est des paroles de chanson ça !

– Et alors si ça m’plaît de les emprunter !

Lorraine se gratta le front.

– Écoute Lando, j’ai bien compris que je n’ai qu’à téléphoner à un jardinier.

Elle grimaça et susurra :

– Et si tu ne fais ni jardin ni vaisselle ni rien dans la maison, comment tu vas occuper tes trois jours ? Il y a toujours à faire si on veut bien se prendre par la main !

Agacement visible du grand flic qui défendait farouchement son statut d’homme libre.

– Comment ça, je vais rien faire ?

– C’est curieux quand même ! Je ne t’ai pas vu t’encombrer d’un foutu dossier de deux kilos comme d’habitude, histoire de jouer au justicier en bord de mer ! Parce que ce scénario-là, on l’a déjà vu sur grand écran !

– Dis tout de suite que j’emporte une bonne excuse avec moi pour éviter les tâches ménagères du week-end !

– Oui, je pense que c’est un peu ça. Tu restes un flic, je ne vais pas te le reprocher ! Sauf que par hasard, ton copain Ange a toujours une affaire merdique dont personne ne veut à te proposer ! Comme par hasard, c’est quelque part dans le coin ! En plus, ton copain Jim se rend disponible pour y mettre son grain de sel. Comme ça, vous avez toute latitude pour jouer votre numéro de trio infernal…

– Pas infernal ! Efficace ! On n’a pas démérité, résultats à l’appui ! On a fait du ménage !

– En poussant la poussière sous le tapis !

– La République nous en est reconnaissante !

– Si tu as les mollets qui enflent, ne t’inquiète pas hein ! J’ai de la pommade si tu veux !

– Tu sais bien que, des fois aussi, il pleut, que les jours sont courts ou qu’il ne fait pas chaud. Parfait pour la lecture ! Les procès-verbaux, ça demande un minimum de concentration. Ici c’est le lieu idéal. Si on peut faire avancer les choses…

– Et donc tu t’occupes, c’est ça ! Et moi, je fais potiche dans ton décor de macho ! Manque plus que le plumeau et le foulard noué à l’antillaise !

– Hey Lorraine, tu en emportes aussi des dossiers des fois !

– Peut-être mais toi, tu te laisses embobiner par une jeune épouse abandonnée qui a besoin qu’on la sorte de la mouise, un innocent aux mains pleines ou je ne sais qui d’autre pour te mettre à battre le bocage breton à la recherche de la vérité qui n’est pas bonne à dire !

– Tu exagères, Lorraine !

– Même pas ! Il t’arrive fréquemment de jouer avec le feu. La dernière fois, tu es passé assez près de la case prison pour entendre le cliquetis des entraves !*

Lorraine sembla revoir les images et ajouta :

– J’ai le souvenir du bruit ! J’ai connu ça quand mon père était en poste au centre pénitentiaire de Caen !

– Dans cette affaire à Quimper, j’étais accusé à tort ! claironna Landowski.

– Tu nous as mis le doute…

– J’ai bien vu !

– Tu peux nous remercier, tes collègues Ange et Jim et moi !

– Mais je l’ai fait Lorraine. Je vous ai invités dans un trois macs Michelin !

– C’était bien le moins !

– Tu as apprécié la poularde de Monsieur Duplantier et le gâteau Opéra !

Tous les deux comprirent que leur passe d’armes à fleurets mouchetés pouvait mener à une véritable prise de bec risquant de leur pourrir le week-end. D’un commun accord, ils baissèrent donc d’un ton.

– À vrai dire, lâcha la magistrate, moi j’en ai apporté un de dossier !

Landowski se mit à rire franchement.

– Tu m’asticotes et ensuite tu avoues ! releva le commissaire.

– Je n’avais pas vraiment le choix.

– Et c’est quoi ?

– Ça n’a rien à voir avec une affaire criminelle. C’est du droit plutôt. Le procureur général de Paris doit faire un discours à la Cour de cassation la semaine prochaine. Chantal Arens, la nouvelle première présidente sera présente. Il compte donc sur moi pour lui concocter quelques belles pages parce qu’il a l’intention de remettre un dossier documenté aux personnalités présentes !

– Une occasion à ne pas rater si je comprends bien !

– Tout juste ! Je te rappelle que j’occupe un poste de première importance auprès de lui et que je n’ai pas l’intention de me faire piquer ma place !

– Y a des embusqués ?

– Toujours ! L’inverse serait anormal !

– Je sais très bien que tu aimes ce que tu fais…

– Mon patron m’a tracé les grandes lignes. C’est à moi de m’y coller. Je vais remplir les blancs et donner de la vigueur au texte sans faire trembler les ors de la République ! Ensuite lui, il remettra ça à sa sauce. C’est le deal.

– Faut faire le job…

Landowski s’en trouvait tout à coup ragaillardi. Il ajouta :

– À propos d’affaire locale, j’en ai une…

– Quoi ? Oh non Lando. Après ce qu’on vient de dire, ce n’est pas possible !

Lorraine était au bord de l’apoplexie. Réelle ou feinte, difficile à savoir…

– Tu m’as tournée en bourrique avec tes explications à la noix et tu oses revenir à la charge ? C’est encore un coup de ton collègue de la DGSI qui profite de ton week-end pour faire d’une pierre deux coups ?

Landowski grimaça.

– Ne critique pas avant de savoir ! Attends que je t’explique le truc. Si c’est nécessaire, tu monteras dans les tours ensuite ! En fait, ce n’est pas vraiment une affaire…

– Alors c’est quoi ? C’est pas Ange qui en est à l’origine ?

– Eh non, cette fois c’est Jim !

– Ils jouent très bien l’alternance pour cacher la misère, tes deux collègues ! De l’un ou de l’autre, je m’attends au pire !

– Quand on était à la BRB notamment, j’ai apprécié qu’ils soient là dans les coups durs. On a eu des collègues à terre pendant ces années. Avec les malfrats, faut avoir les yeux partout si tu veux rester en vie.

Il fixa Lorraine dans les yeux.

– Sinon je ne serais pas là à te regarder.

Il ajouta :

– Avec amour.

Lorraine Bouchet écarquilla les yeux.

– Avec, avec… ? Tu peux le redire ça ?

Landowski sourit. Attitude qui méritait d’être notée vu qu’elle était assez rare.

– La bague, la bague ! martela Lorraine.

– C’est démodé !

– Pas tant que ça ! Justement, je sens que tu es en train de changer d’avis. Tu progresses à grands pas ! Si si !

– Tu en as de ces certitudes !

– C’est p’têt parce que j’ai consulté une voyante…

Landowski ouvrit de grands yeux.

– Une magistrate émérite qui bascule dans l’occultisme, on aura tout vu ! Tu vas faire tourner les tables bientôt ?

– Tu joues au macho mais, dans le fond, tu as un cœur tendre…

– Elle portait un chapeau pointu et une baguette magique qui lançait des étoiles filantes, ta magicienne ?

– Arrête de tout tourner en dérision, c’est agaçant à la fin !

– Elle t’a dit quoi au juste ta fée Clochette ?

– Mais ça ne te regarde pas ! Les consultations de ce genre, c’est perso. Si on évente les propos, on brise le charme et c’est foutu !

– Tu as parfaitement le droit de croire à ces balivernes !

– On aime ce qu’on veut entendre et ça ne fait pas de mal ! Et puis parfois, ça marche !

Lorraine s’avança vers la baie vitrée et croisa les bras sans se retourner.

Un silence salutaire s’installa puis la vie reprit son cours.

– Tu connais Le Pouldu ? demanda le commissaire dans son dos.

La magistrate haussa les épaules.

– Bien sûr ! La maison de Marie Henry ! Gauguin, Maufra, Filiger…

– Je ne te parle pas de l’histoire de l’art mais plutôt côté rando, tu vois !

– Et c’est quoi le trip alors ?

– Ce mois-ci, il ne fait pas bon se baigner dans les criques désertes !

Lorraine secoua la tête.

– L’eau est froide à cette période l’année, dit-elle. En plus, il doit y avoir des vagues ! Si c’est ça ton idée géniale, ne compte pas sur moi !

– C’est vrai que tu as les tympans fragiles.

Lorraine soupira et tenta d’accélérer le mouvement.

– Et si tu arrêtais de parler en énigmes ? Tu y arrives ou quoi ?

De quoi faire ricaner le grand flic qui aimait bien les joutes oratoires avec sa compagne, qui lui valaient généralement une récompense, après…

– En bord de mer, il y a un chemin prisé des marcheurs. Le long de la côte escarpée, continua-t-il, il y a des petites anses discrètes. Quelle que soit la température affichée, les adeptes des bains de mer toniques s’y rendent dès qu’ils le peuvent. Ils se baignent à l’abri des regards dans la tenue de leur choix.

– Il n’y a pas de mal à ça ! C’est à chacun de voir…

– C’est aussi prendre un risque : malaise, chute, mauvaise rencontre. Ou tout simplement pneumonie !

– Pourquoi pas peste bubonique ! Là tu cherches à faire pleurer dans les chaumières !

– Non, je veux simplement mettre en garde. C’est super d’être seul face à l’océan et de se créer un moment particulier, très personnel. Sauf qu’il vaut mieux aussi que l’homme solitaire qui marche sur le chemin ne soit pas tout à coup envahi par une pulsion incoercible…

– Tu vois le mal partout. Il n’y a pas que des barjos dans les piétons !

– Faut pas non plus tenter le diable !

Lorraine revint au milieu du salon.

– Et donc, c’est quoi cette insinuation ? Ce n’est pas parce qu’il y a un risque potentiel que toutes les femmes doivent rester cloîtrées et ne s’aventurer au dehors qu’en compagnie de leur compagnon, fils ou père !

– Des fois, ça se passe mal non ?

– C’est ça le sujet de ta mystérieuse affaire ?

Landowski grimaça.

– Il y a un mois au matin, une jeune personne se serait rendue sur le sentier des douaniers. Probablement pour prendre un bain…

– Et elle a été agressée ?

– Pire ! Elle a disparu !

– Toutes celles qui ne donnent plus signe de vie ne sont pas mortes, heureusement !

– Mais certaines si !

– On a retrouvé sa voiture, des objets, des vêtements ?

– Rien de tout ça. Elle s’est évaporée.

– Quand il ne reste rien, c’est que la personne est partie ailleurs, non ?

– Alors tu penses qu’elle n’a pas disparu, c’est ça ?

– Chacun vit sa vie. Il n’y a pas de sang, de voiture abandonnée portière ouverte, pas de vêtements déchirés accrochés aux arbres du talus…

– Faut que tu joues la dérision, hein !

– Je force le trait parce que l’explication peut être très banale.

– Il faut déjà vérifier si c’est le cas.

– Ton affaire-là, elle est dans le journal ?

– Oui. Jim m’a invité jeudi midi pour m’en parler.

– Toujours dans votre cantine des Batignolles ?

– C’est un endroit sécure ! Les clients sont de la maison et le jeudi c’est daube façon grand-mère. C’est l’endroit où on peut parler sans crainte, critiquer le gouvernement, la hiérarchie. Se raconter des trucs de mecs !

– Je vois le genre. Nous les femmes, on doit prendre cher !

– On se défoule un peu, c’est vrai…

– Et après le calva, Jim t’a parlé d’un fait divers…

– En service, pas de picole ! Il m’a indiqué les dates des faits et j’ai facilement retrouvé l’article.

– Et lui, il a quoi à voir là-dedans ?

– Tu sais qu’il se rend périodiquement dans les régions de France pour présenter le bilan annuel des œuvres sociales de la police aux actifs comme aux retraités !

– Je ne vois pas bien le rapport…

– Il y a quelques mois, il est venu faire son show à Pont-l’Abbé.

– Active, c’est un peu long !

– J’y arrive ! Pour la sonorisation et la mise en place, il n’en est plus à la lampe à huile. Il ne trimbale plus un matos lourdingue dans un fourgon tôlé qui a servi sur les manifs de 68. Il utilise les services de sociétés spécialisées dans l’événementiel. Il en dégote une sur le secteur de sa présentation.

– On continue demain, dit Lorraine, ou tu termines avant que je rendosse ma panoplie de la parfaite ménagère pour tuer le temps ?

– Ils étaient deux à s’occuper de la partie technique, une jeune femme et son collègue. Le son, la lumière, la balance, les enceintes, le projecteur, le timing, tu vois ?

– Je vois très bien ! J’ai déjà assisté à une conférence. Si, si !

– Une petite équipe efficace, m’a dit Jim !

– Donc ça veut dire qu’il a remarqué la jeune femme.

– Tu sais Jim…

– L’homme c’était son compagnon, son mari, son amant ?

– Rien de tout ça a priori.

– Comment tu sais ? T’es flic ou colporteur de ragots. Faudrait savoir !

– Jim m’a dit que ce n’était que son associé. Ils travaillent ensemble depuis un moment. Je l’ai cru, tout simplement. Rien n’empêche d’investiguer si besoin !

– Et donc Jim Sablon dans toute sa splendeur de dragueur à l’affût lui a trouvé des qualités intrinsèques à cette technicienne de congrès !

– Des ?

– En clair, elle lui a plu quoi !

– Oh Lorraine, j’avais compris ! Dans le mémo actu auquel on a accès chaque matin via notre boîte mail, on peut lire les brèves au niveau national. Enfin quand on a le temps. Puisqu’il y a une disparition présumée criminelle, le fait divers était relaté. Il y avait le nom de famille de la disparue, surtout son prénom. Jim, ça l’a fait tilter. Il a cherché un peu puis il en a conclu que c’était la jeune femme qu’il avait vue pour la partie technique de sa présentation.

– Comme tu passes quelques week-ends à Trévignon, il a pensé que tu trouverais bien un moment pour y aller jeter un œil. Histoire de voir s’il n’était pas passé à côté d’une sympathique rencontre. Voilà pourquoi tu te rencardes dans le journal !

– C’est presque ça sauf si cette disparition n’est pas fortuite !

– La nénette en question, elle a le droit de vivre sa vie sans que des flics sur le retour viennent vérifier son emploi du temps ! Tu ne vas quand même pas jouer au rabatteur pour ton copain !

Landowski s’insurgea :

– Mais qui te parle de ça, Lorraine ?

– Jim doit avoir déjà la nostalgie du plateau de fruits de mer que je sers sur la terrasse, moi j’dis !

– La technicienne, elle n’a pas reparu chez elle, ni à son travail, ni nulle part…

– Elle est peut-être partie sur un coup de tête, à Ibiza, Tombouctou ou en Terre Adélie avec un musclé pois chiche aux cheveux d’or qui fait du surf en milieu hostile ou du parapente ! Comme toutes, elle se lassera en jurant qu’on ne l’y reprendra plus !

– C’est pas toujours comme ça !

– Souvent ! Et puis il n’y a pas que le sexe dans la relation d’un idéal de dualité, il y a aussi la conversation…

– C’est pas beau d’être jalouse, Lorraine ! Il y a bien des couples improbables au départ qui regardent aujourd’hui leurs petits-enfants jouer dans le jardin avec le chien. Il n’y a pas que des rencontres éphémères !

– Je voulais dire qu’elle s’est rendue libre et que, justement, si elle a disparu du paysage, c’est peut-être parce qu’elle est arrivée à mettre son rêve en route et qu’il faut la laisser le vivre ! Elle ne vous a rien demandé, que je sache !

– Elle doit avoir un compagnon, un boulot, une maison…

– Justement tout ce qu’elle ne veut plus avoir si ça se trouve ! Quand on coupe les ponts, c’est fini de chez fini !

– Tu choisis l’option qui t’arrange…

– On a trouvé du sang ?

– Non.

– Une demande de rançon ?

– Non.

– Une voiture abandonnée ?

– Non.

– Des vêtements ? Des chaussures ? Une montre ?

– Rien de tout ça !

– Des témoins ont-ils été intrigués par l’attitude d’un homme seul au bord de la falaise à l’heure supposée des faits ?

– Non.

– On est certain qu’elle y est allée ?

– Même pas !

Lorraine hocha la tête.

– Et donc on a en magasin, un flic du 36, titi parisien, collectionneur de shampooineuses de banlieue et un commissaire divisionnaire terreur des truands qui se montent tous les deux le bourrichon avec un fantôme qui est peut-être allongé sur la plage de Koh Phi Phi en train de lire un bel article didactique dans le dernier Cosmopolitan !

– Comme tu y vas ! Est-ce que j’ai dit que j’allais mener une enquête ?

Lorraine s’amusa.

– Surtout que tu rentres avec moi mardi matin…

– En attendant, je peux quand même me renseigner !

– Et échafauder des hypothèses…

– Le flic ne commence pas par formuler d’hypothèses, Madame la juge ! Il s’en tient aux constatations. Il mène son enquête à partir des éléments relevés : scène de crime, témoignages, voisinage. Ensuite il assemble le puzzle.

– Oh Lando, tu n’es quand même pas en train de me faire un cours de l’école de police là !

– Vous les juges, vous ne savez pas comment on travaille ! C’est quand même assez fou, ça !

Lorraine fit la moue.

– Après tout, fais comme tu l’entends !

– Comme ça, je te foutrai une paix royale et tu pourras écrire ton pensum tranquillement…

– Et allez ! Un p’tit coup de retape à l’ancienne ! Mais tu me prends pour qui, Landowski ?

– Pour la femme qui partage ma vie, c’est aussi simple que cela !

Les mots ont aussitôt touché la magistrate qui se radoucit.

– Et qu’est-ce que tu comptes faire ?

Il haussa les épaules.

– Aller sur place du côté du Pouldu et ailleurs, marcher, regarder, interroger, tenter de comprendre et peut-être trouver.

– Ce n’est pas en un week-end que tu vas régler l’affaire !

– Disons que je vais défricher un peu !

– Et ensuite ?

– Je respecte la hiérarchie. Si je dois rentrer, je rentre.

Lorraine le fixa.

– Tu me dis tout où je me renseigne ?

– Quoi tout ? Je reste disponible c’est tout !

– Dis-moi franchement s’il est question que Jim rapplique dans les prochaines heures ?

– Pas que je sache !

– Et Ange ? ajouta-t-elle.

– Pas prévu non plus.

Elle haussa les épaules.

– Je ne te crois pas. On en reparlera quand ils seront là !

Landowski se défendit :

– On a quand même une hiérarchie…

– Qui ferme les yeux à force de vous voir jouer les Texas Rangers en Basse-Bretagne !

– Mais non, ils suivent nos enquêtes et ils s’en mêlent quand il le faut. Jusqu’à présent, on a fait du bon boulot. Pas très académique peut-être mais tout le monde y a gagné. Les victimes, la police, la Justice, l’ordre public. Même une aide-ménagère qui ne demandait rien à personne qui vient de passer à la caisse !

– Un jour, vous allez tomber sur un os tous les trois ! Vos protecteurs seront contraints de vous lâcher et la facture sera salée. Y a des aigris qui moisissent au placard qui s’en donneront à cœur joie de vous voir à l’amende !

La magistrate s’approcha du canapé.

– Fais-moi plaisir, Lando ! Accepte d’entrer dans la préfectorale comme je te l’ai dit ! Tu as les prérequis exigés par les textes ! Ensuite je me ferai muter au palais de justice du département où on t’aura nommé. Aux vacances, on pourra même voyager : les Antilles, La Réunion…

– Saint-Pierre et Miquelon !

– Et alors ? Y a bien des gens qui y habitent non ?

– Fait pas chaud !

– Tu n’es jamais content !

Landowski plia le journal.

– Moi j’aime aller sur le terrain. Dans un bureau, je vais dépérir. De la paperasse, des réunions, des mondanités, c’est ce qui m’attend dans le poste que tu me proposes. Tout ce que je déteste !

– Et à moi, tu y penses ? J’ai peut-être envie d’ailleurs ! Tu te la joues un peu perso non ? Et tu continues à prendre des risques…

Landowski lui prit les mains.

– Ne crains rien, Lorraine ! Qui va réussir à m’avoir hein ? Personne ! Je ne vais pas mourir.

Et il l’attira dans ses bras.

*  Voir Vengeance d’automne à Quimper, même collection.

II

Séquestration de Lise

« J’ai froid. J’ai envie de faire pipi. Comment on fait quand on se trouve dans un débarras encombré de matériaux ? On dirait le hangar d’un entrepreneur en bâtiment. Pas très clean pour accueillir une femme.

Et puis j’en ai marre de ce silence ! J’ai l’impression d’être une morte dans cette pénombre qui me fait si peur. Tout à l’heure, je me suis approchée de la fenêtre. Les carreaux sont ternes et salis. De toute façon, cela ne me servirait à rien de pouvoir voir au travers ; pour ce que j’ai pu distinguer de l’extérieur, c’est un remake des Hauts de Hurlevent. Quelques branchages malmenés, une brume grise. Sur la gauche, j’ai cru apercevoir une balise de chenal puis elle a disparu. Ici, rien n’est vrai ni certain. Du flou et du vent. Difficile d’avoir des repères. Peut-être l’océan plus loin mais, malgré ce bruit de fond qui m’est familier, je n’en ai pas la certitude. La seule que j’aie, c’est celle d’avoir été enlevée.

Ça me fait pleurer. Je ne suis plus rien. Je n’existe même plus et si je disparaissais pour de bon, il n’y aurait pas grand monde à s’inquiéter de mon absence.

C’est vrai que j’ai vécu en solitaire, aimant ces hommes pour ce que je croyais qu’ils allaient m’apporter et les rejetant bien vite parce qu’ils ne correspondaient pas au souvenir que j’avais gardé de celui qui m’avait comblée.

Enlevée ? Je ne sais même pas par qui. Dans la crique, il ne s’est pas montré. Il m’a prise par-derrière alors que j’étais tournée vers le large. Un moment que j’adore. Une fois sortie de l’eau, j’aime bien laisser les gouttes ruisseler. Je sens leur fraîcheur. J’existe.

Il a joué la surprise qui a engendré la peur et j’ai perdu toute perception de ce moment incroyablement fort. Un moment de détresse infinie.

Je m’en sens sale. Sale de ce lieu poussiéreux, puant l’humidité marine. Sale de celui qui m’a traînée ici. Sale de moi-même puisque je n’ai même pas su résister à l’adversité.